Les « -ová » des noms de famille au féminin (2e partie)

Tina Turnerová, photo: CTK

Salut à tous les tchécophiles de Radio Prague – Ahoj vám všem, milovníkům češtiny Radia Praha ! Cette semaine, nous allons revenir sur un thème que nous avions abordé il y a quelques semaines de cela, à savoir la particularité que possède la langue tchèque de « féminiser » les noms de famille, qu’ils soient d’origine tchèque ou étrangère, en ajoutant le suffixe « -ová » lorsque ces noms sont portés par des femmes. Lors de la première émission, nous nous étions efforcés d’expliquer pourquoi il en est ainsi et l’utilité de cette règle pour l’emploi de la grammaire tchèque. Pour cette fois, nous allons nous pencher sur d’autres aspects en nous intéressant notamment aux noms étrangers.

Tina Turnerová,  photo: CTK
Vous le savez peut-être déjà : une des légendes du rock américain, Tina Turner, sera de nouveau en concert à Prague, le 27 avril prochain. Treize ans après, le public tchèque aura donc de nouveau l’occasion d’assister au show de celle qu’il appelle plutôt Tina Turnerová. Pour les Tchèques, et pour les étrangers habitués à vivre en République tchèque, l’ajout du suffixe « -ová » n’a rien de choquant. Mais la chanteuse et les étrangers qui se rendront spécialement à Prague pour assister au concert seront sans doute plus surpris voire choqués en apprenant que la vedette ne s’appelle plus Tina Turner mais Tina Turnerová.

Et il en va de même pour la grande majorité des noms étrangers dès lors qu’il s’agit d’une femme. Ainsi, si l’épouse de monsieur Dupont venait en République tchèque, on l’appellerait « paní Dupontová ». Et ce qu’elle soit chanteuse, peintre, écrivain, politique, sportive ou simple citoyenne. Il s’agit d’un procédé tout à fait naturel pour la langue tchèque et son bon usage. Les Tchèques évitent ainsi des phrases du type « Dupont boit de la bière » - « Dupont pije pivo », desquelles il est impossible de savoir si le sujet est masculin ou féminin et si c’est monsieur ou madame Dupont qui boit de la bière.

Bien entendu, et cela ne vous étonnera pas, il existe quelques exceptions. Ainsi, pour rester dans les exemples avec des noms français, les Tchèques n’ont pratiquement jamais appelé Edith Piaf autrement qu’Edith Piaf. Et celle qui est à leurs yeux la plus grandes des chanteuses françaises n’est devenue Edith Piafová qu’en de très rares occasions. Et il en va de même pour Marylin Monroe. L’explication est que puisque ces deux femmes ont été exceptionnelles dans la maîtrise de leur art, elles font l’objet d’exceptions. Leur talent extraordinaire en a fait des cas uniques qui empêchent tout malentendu. Ainsi, si un Tchèque entend « Piaf pije pivo », il saura très bien qui boit de la bière : que c’est Edith, une femme, et non pas Marcel. Il existe également d’autres types d’exceptions que nous citerons une prochaine fois.

Mais pour en revenir au cas présent, on peut très bien se dire dans le cas de Tina Turner que celle-ci est, elle aussi, tout à fait exceptionnelle, qu’elle possède un talent extraordinaire et qu’il n’existe en résumé qu’une seule et unique Tina Turner. Et c’est tout à fait vrai. Alors pourquoi les Tchèques l’appellent-ils Turnerová ? Eh bien, la réponse est un peu bête, mais c’est tout simplement parce que l’usage le réclame.

Toutefois, une fois cela précisé, ne vous étonnez pas non plus si vous entendez un Tchèque dire par exemple « Tina Turner zpívá dobře », soit « Tina Turner chante bien ». Aujourd’hui, cela est aussi tout à fait possible. Mais encore une fois, l’usage réclame le plus généralement que l’on ajoute le suffixe « -ová » pour obtenir Turnerová. Cela peut paraître un peu compliqué, mais sachez que les Tchèques eux-mêmes se disputent parfois sur la forme qu’il convient d’utiliser pour les noms étrangers. En résumé, certains se posent la question de savoir si l’usage en cours pour les noms tchèques doit également être appliqué avec les noms étrangers. Une loi a d’ailleurs été adoptée il y a quelques années, et nous y reviendrons dans une prochaine émission.

Pan Novák et paní Nováková
En attendant, sachez également que pour les Tchèques qui vivent à l’étranger, le l’ajout du suffixe « -ová » peut également parfois poser problème, et même s’il s’agit d’un couple formé d’un Tchèque et d’une Tchèque. Comment en effet expliquer par exemple à un employé de l’administration d’un pays étranger où on ne parle pas une langue slave que pan Novák et paní Nováková portent exactement le même nom de famille et sont bien tous les deux monsieur et madame Novák ? Simplement, Nováková est la forme féminine de Novák. Très logiquement, un étranger se demande comment Novák et Nováková peuvent être le même nom, alors que sur les cartes d’identité ou les passeports des deux personnes figurent noir sur blanc deux noms aux formes différentes. Et c’est justement afin de mettre un terme à ce genre de malentendus qu’a été adoptée une nouvelle loi que nous évoquerons dans une prochaine émission.

En attendant, portez-vous du mieux possible – mějte se co nejlíp!, portez le soleil en vous – slunce v duši, salut et à bientôt – zatím ahoj !