Le vin tchèque n'est pas de la piquette

Foto: Jana Sustova
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La République tchèque est le pays de la bière, mais ça, on le savait déjà. Ce que l'on sait moins en revanche, c'est que les vignobles tchèques produisent aujourd'hui des vins blancs et même des vins rouges qui peuvent valoir le coup.

Certains viticulteurs tchèques affirment que les vins du pays sont assez bons pour concurrencer des vins italiens ou français. C'est le cas de Pavel Vajcner, président de la société Znovin Znojmo dans le sud de la Moravie :

« Nous sommes plus au Nord, et cela a une influence sur l'arôme, le vin est plus arômatique. Il pleut ici au bon moment en été, lorsque se forgent l'arôme et le goût du vin, alors qu'il ne pleut pas en cette saison dans les pays situés plus au Sud. Nous avons également un sol d'excellente qualité. Non seulement nos vins sont au niveau mais parfois, en ce qui concerne les vins blancs, ils peuvent même être meilleurs. »

Alors les vins tchèques meilleurs que des vins français et italiens ? Comme l'année dernière, Radio Prague a demandé son avis à un expert, Jean-Michel Deluc, directeur de la société Chateauonline :

« Vu de la France, on pense souvent aux pays du Nouveau monde : Amérique du sud, Amérique du Nord, Australie, Afrique du Sud, en matière de vin, mais on oublie trop souvent que très proches de la France, les pays de l'Est ont des rapports qualité-prix intéressants, des vins équilibrés, avec une progression qualitative qui est remarquable. Effectivement, il y a vingt ans, ces vins étaient loin d'être au niveau, mais aujourd'hui on se rend compte que notamment au niveau technique ils ont rattrapé le vignoble français, ou les vignobles italien, espagnol et allemand dans la qualité. »

La semaine dernière, Jean-Michel Deluc a participé à la dégustation de vins organisé par le Centre tchèque de Paris. Directeur d'une société qui fait du commerce de vins en ligne, il avait déjà dégusté des vins tchèques l'année dernière et a donc pu comparer :

« Le niveau était un petit peu plus élevé que l'année dernière, avec beaucoup de vins de bonne qualité, notamment dans les vins rouges. L'année dernière on avait été un peu déçu par les rouges alors que cette année on a trouvé des choses plus qu'intéressantes. Les millésimes 2003 sont d'un niveau bien meilleur. »

Photo : Jana Sustova
Et cette année, à la dégustation de vins de paille de Bohême et de Moravie, c'est un Veltlin rouge (Veltlinske vino) produit dans la région de Mikulov qui a remporté la meilleure note auprès des quatre spécialistes présents.

« C'était un 2003 qui était vraiment excellent, légèrement boisé, très rond, gras, belle fraîcheur et parfait équilibre, et je crois que les dégustateurs l'ont élu à l'unanimité. »

Philippe Faure-Brac, ancien meilleur sommelier du monde, a également participé à la dégustation organisée par le Centre tchèque. Ce dernier a affirmé que certains des vins en compétition auraient leur place sur des marchés étrangers, y compris sur le marché français, un avis que partage Jean-Michel Deluc :

« Le consommateur est en train de changer. En ce qui concerne Chateauonline par exemple, on a une clientèle relativement jeune, qui est beaucoup plus ouverte à des expériences extérieures et qui regarde la qualité d'un vin avant tout et par forcément son origine. L'originalité des cépages peut aussi jouer son rôle. Le Rulandske par exemple est un cépage que les Français ne connaissent pas et qui gagne à être connu, qui peut peut être très bon et plus qu'agréable. »

Photo : Vaclav Sigmund
En 1989, il y avait environ 12 000 hectares de vignes en République tchèque. Quinze ans plus tard, on en compte 19 000, essentiellement en Moravie, sur les collines proches de la fontière autrichienne. Beaucoup de ces nouvelles vignes ont été plantées très récemment. Jaroslav Machovec est le président du Fonds national pour la viticulture :

« Il existe des règlements au sein de l'Union européenne qui empêchent les Etats membres d'étendre leurs surfaces viticoles. Au moment de notre adhésion, nous avons dû cesser de planter. Il y a eu des réclamations, les viticulteurs locaux ont demandé des dérogations, notamment, parce que les surfaces actuelles ne permettent de satisfaire que 35 à 40% de la demande intérieure. Nous avons demandé une période de transition de cinq ans. »

Jiri Sedlo
Malheureusement pour les producteurs tchèques, cette période de transition n'a pas été accordée et les viticulteurs ont dû planter de nouvelles vignes en catastrophe avant le 1er mai dernier. Plus de 3 000 hectares ont été plantés, notamment grâce à une aide de l'Etat de près de 2 milliards de couronnes. Désormais, les viticulteurs et les consommateurs attendent avec impatience de pouvoir goûter les nouveaux vins, produits de ces nouvelles vignes. Jiri Sedlo est le président de l'association nationale des viticulteurs:

« Ce vin devrait arriver sur le marché dès l'année prochaine et surtout en 2007 en grande quantité. Un quart des vignes du pays sont concernées ».

Alors si vous passez en République tchèque ou si vous apercevez du vin tchèque dans les rayons de votre supermarché, n'hésitez pas à goûter, vous ferez peut-être des découvertes...