Depuis 40 ans, Brontosaure aide à préserver la nature tchèque

Brontosaure en Ukraine, photo: Mouvement Brontosaure

Le mouvement Brontosaure fête ses quarante ans cette année. Le mouvement écologiste parmi les plus anciens actifs sur le territoire tchèque propose des camps de vacances dans la nature et réunit des centaines des personnes autour du bénévolat tous les ans. Il a également été parmi les pionniers de l’éducation expérientielle en République tchèque. Radio Prague vous propose un entretien avec le vice-président de l’organisation, Michal Švarný.

« Cela fait déjà onze ans que j’ai pour la première fois participé à une activité organisée par le mouvement Brontosaure. C’était un camp de vacances au château Krumlov en Moravie. »

Michal Švarný, le vice-président du mouvement Brontosaure raconte comment il a découvert les activités de cette organisation :« C’était une très bonne expérience. L’année suivante, je suis allé dans un autre camp, j’ai commencé à participer à toutes les activités et pendant cinq ans j’ai été assez actif. Après j’ai décidé qu’il était temps de rendre à Brontosaure ce qui m’avait été donné. »

Devenu président de l’antenne locale à Prague, Michal Švarný est vite devenu vice-président de l’organisation. Le mouvement, appelé du nom d’un dinosaure disparu, a mis les considérations écologiques au cœur de son activité, dès sa conception.

Michal Švarný,  photo: Facebook de Michal Švarný
Michal Švarný : « Il y avait un slogan qui disait que le Brontosaure n’a pas survécu et nous devons faire de l’éducation environnementale pour que l’homme puisse survivre. »

A la conférence des Nations Unies qui s’est tenue en 1973, l’année suivante a été déclarée l’année de la protection de l’environnement. En Tchécoslovaquie, les membres de l’Institut de l’écologie du paysage rattaché à l’Académie des Sciences ont préparé quelques événements.

Michal Švarný : « C’était un si grand succès qu’il y avait des actions spontanées. Au début, elles n’étaient pas vraiment organisées. On n’a pas lancé une organisation cette année-là, mais progressivement, cela est devenu organisation sous l’égide de l’Union de la jeunesse socialiste. »

Il est à noter que ce mouvement qui a progressivement pris une grande ampleur a été initié du haut et rattaché aux structures officielles. Fort logiquement, nous nous posons aujourd’hui la question sur les rapports de Brontosaure au régime communiste, qui n’était pas connu pour être réceptif aux considérations écologiques… Michal Švarný nous livre sa perspective à cet égard :

Brontosaure en Ukraine,  photo: Mouvement Brontosaure
« A l’époque, la question de l’environnement n’était pas une question politique. C’était clair qu’il fallait attirer l’attention sur l’environnement, c’est pourquoi il y avait cette conférence à Stockholm. Par ailleurs, jusqu’aujourd’hui Brontosaure est une organisation apolitique. C’est pourquoi aussi à l’époque, même sous la tutelle de l’Union de la jeunesse socialiste, on jouissait d’une assez grande liberté. Il a fallu faire quelques rapports annuels d’activité, mais sinon il n’y avait pas de problèmes. »

Progressivement, le mouvement a commencé à se structurer et à organiser des camps d’été et des weekends pendant lesquels les jeunes découvraient à la fois l’environnement et s’engageaient dans des activités bénévoles pour le préserver. L’année 1989 représente fort logiquement une rupture, mais c’était une rupture à laquelle le mouvement était préparé :

« L’organisation a préparé pour l’année 1989 un plan pour se séparer de l’Union de la jeunesse socialiste, mais la Révolution de velours s’est produite plus tôt. Donc ce n’était pas une surprise pour Brontosaure de fonder une organisation indépendante car ils avaient déjà ce plan. Néanmoins, au début, il y avait quelques problèmes. Si avant 1989 la structure n’était pas très claire, pendant les deux années suivantes, une partie de l’organisation a fait scission. Elle s’appelait l’Association Brontosaure, mais aujourd’hui il n’y a plus que quatre personnes et c’est le mouvement d’origine qui a survécu. »

Brontosaure en Roumanie,  photo: Mouvement Brontosaure
L’année 1989 a notamment signifié une diversification des activités, comme le précise Michal Švarný :« Aujourd’hui, il y a beaucoup de camps de vacances organisés à l’étranger, en Ukraine, en Roumanie, en Inde. Il est également possible de participer dans les échanges des volontaires européens dans le cadre du Service volontaire européen. Ce sont des choses assez nouvelles pour le mouvement, mais beaucoup d’autres activités restent similaires par rapport au passé. »

Les participants protègent donc la nature, réparent des monuments historiques et prennent part dans l’éducation expérientielle qui leur permet de découvrir eux-mêmes et d’améliorer certaines de leurs compétences. Mais Michal Švarný reste réaliste :

« La plupart des gens qui participent à ces activités ne sont pas les enthousiastes de l’environnement. Souvent ce sont des jeunes qui vont de toute façon à un camp de vacances et tant mieux s’il y a aussi des choses qui ont plus de sens que seulement de jouer, mais c’est surtout pour rencontrer d’autres gens. Normalement, on ne le dit pas, mais la motivation numéro un pour participer à ces camps, c’est de faire connaissance. »

Photo: Mouvement Brontosaure
Outre les dons privés, des nombreuses activités de Brontosaure sont financées par le ministère de l’Education, ce qui permet d’assurer une certaine continuité dans l’offre des programmes de l’organisation où tout le monde s’implique comme bénévole (sauf peut-être quelques agents comptables). Puis, il y a aussi des travaux de rénovation que les bénévoles font. Michal Švarný donne un exemple :

« Si un château fait une rénovation il est prêt à payer pour le travail. Quand ce sont des volontaires comme nous, c’est moins cher pour le château. On utilise ces moyens pour financer les camps de vacances, pour maintenir les frais de participation assez peu élevés pour que les jeunes de tous les milieux sociaux puissent participer à nos activités. »

Aujourd’hui l’organisation compte plus d’un millier de membres et beaucoup d’autres personnes se joignent aux activités organisées par ce millier de bénévoles. Brontosaure propose une vingtaine d’activités en été et une centaine des weekends en nature tout au long de l’année. Certains reviennent régulièrement et tous les ans il y a des nouveaux participants qui découvrent l’organisation. Bref, cela représente au final beaucoup du monde et à cette richesse correspond aussi la richesse d’expériences communes. Brontosaure dispose d’un site internet où les participants rassemblent leurs photos et vidéos des camps. Son vice-président est aussi tout de suite prêt à raconter quelques histoires :

Photo: Mouvement Brontosaure
« Des histoires de Brontosaure de l’époque avant 1989, j’en ai entendu une qui est drôle. Dans un camp de vacances il y avait un festival des films écologiques qu’ils ont appelé écofilm. Puis, le comité national de la municipalité où se tenait le camp a appelé ses organisateurs à s’expliquer à propos d’une chose sérieuse. Quand ils se sont rendus à la mairie, on leur a dit que si les soupçons étaient avérés, cela serait rapporté plus haut et ne resterait pas sans conséquences pour l’organisation. Comment c’est possible que dans un camp pour des jeunes, on projette des films pornographiques, ont-ils demandé. Il s’est avéré que quelqu’un ne savait pas ce que sont les éco-films et il a pensé que ce sont les porno-films. »

Cette histoire s’est bien terminée, les organisateurs du camp ont tout de suite demandé des excuses pour la propagation d’informations mensongères, ce que les représentants de la mairie ont refusé. Néanmoins, pour dédommager les organisateurs, et ayant certainement honte, ils ont fourni du matériel, dont du ciment, à ce camp de vacances.

Des histoires plus récentes, vous vous en doutez, il y en a des milliers. Michal Švarný a participé au premier camp organisé en Inde. Il fait part de son expérience :

« Il y avait un groupe de moines tibétains qui sont allés à Prague le printemps précédent notre voyage en Inde. Nous avons parlé avec eux et nous nous sommes mis d’accord pour leur rendre visite dans leur monastère afin de les aider à réparer quelque chose. Après leur départ, j’ai écrit à un des moines. Pendant quelques mois, je n’ai reçu aucune réponse. Puis, dans un email, il a dit « excusez-moi, je n’ai pas répondu car j’étais parti un mois méditer dans les montagnes. C’était intéressant de voir quelqu’un qui va méditer pendant un mois, ne lis pas son email, c’était intéressant de communiquer avec des personnes comme ça. »

Cela s’est bien passé en Inde ?

Telč,  photo: Comission européenne
« Oui, oui et une chose que j’ai apprise, c’est que pour faire de la charité ou d’aider quelqu’un ou un pays, il faut bien le connaître. La première année, quand nous sommes arrivés, nous avons travaillé dans ce monastère mais plus tard, nous avons appris que c’était un des plus riches de la région car les autres monastères n’ont pas la possibilité d’aller en République tchèque ou communiquer par emails. Mais quand nous étions là-bas, nous avons eu la possibilité de rencontrer les gens de différents monastères, écoles ou orphelinats. Pour les années prochaines, nous avons préparé des programmes pour les aider. Les années suivantes, nous savions mieux où notre aide était nécessaire. »

La fête des quarante ans de Brontosaure aura lieu le 19 septembre à Telč en Moravie. Outre les travaux de bénévolat sur le château de Telč, les organisateurs promettent également des concerts ou des tables rondes sur l’avenir du bénévolat en République tchèque. Ces conférences s’inscrivent dans la logique même de l’action de Brontosaure comme l’a décrite Michal Švarný – il faut d’abord connaître une personne ou un lieu pour mieux savoir comment l’aider.