Finie la compétition exacerbée entre la Slovaquie et la Tchéquie

Selon les dernières données économiques, la Tchéquie n’est plus un pays plus riche que la Slovaquie comme elle l’était depuis la partition de l’ancienne Tchécoslovaquie, le 1er janvier 1993. Nous vous présenterons les grandes lignes d’un article publié dans l’hebdomadaire Respekt qui a été consacré à ce sujet. Au lieu de se tourner vers la Russie, il y a lieu de chercher de nouvelles alternatives commerciales. C’est ce que prétend l’auteur d’un texte publié sur le site du quotidien économique Hospodářské noviny. La position des responsables politiques et, aussi, de l’opinion publique tchèque à l’égard de la crise russo-ukrainienne est un autre sujet retenu dans la presse. Une partie de l’agenda international est également consacré au référendum sur l’indépendance de l’Ecosse, en effectuant un parallèle avec la séparation des Tchèques et Slovaques, survenue il y a 22 ans.

Désormais, la Tchéquie n’est pas un pays plus riche que la Slovaquie, comme elle l’était au moment de la partition de la Tchécoslovaquie, en janvier 1993. C’est ce qu’annonce la dernière édition de l’hebdomadaire Respekt qui se réfère aux récentes données statistiques et qui apporte à ce sujet quelques précisions. En introduction, les auteurs de l’analyse, Marek Švehla et Martin Šimečka, écrivent :

« Il y a 22 ans, une chose à Prague paraissait certaine : la Slovaquie était et devait rester un pays plus pauvre que son voisin tchèque. C’était un constat soutenu par la majorité des économistes de l’époque.... En Slovaquie, non seulement les prix étaient plus élevés et les salaires plus bas, mais en plus le PIB slovaque était d’un tiers inférieur à ce qu’il était en Tchéquie. De surcroît, à la différence de la Slovaquie où était au pouvoir un gouvernement nationaliste plutôt de gauche, la Tchéquie avait un gouvernement s’appuyant sur des économistes confirmés et pragmatiques, à orientation prooccidentale. C’est du moins ainsi que la situation était alors perçue par les Tchèques eux-mêmes."

Le journal rappelle que pendant plusieurs années, l’évolution a confirmé ces prévisions. Les différences entre les niveaux de vie dans les deux pays étaient nettement visibles il y a encore une dizaine d’années, notamment à la campagne. Ce n’est plus vrai aujourd’hui... Vingt ans après, le PIB slovaque représentait 95% du PIB tchèque, pendant que le salaire moyen slovaque a également connu une augmentation considérable. En outre, la Slovaquie qui n’a vu défilé, après le départ du populiste Vladimir Mečiar, que trois différents premiers chefs de gouvernement, pouvait s’enorgueillir d’une grande stabilité politique qui lui a permis de se ranger parmi les Etats européens les plus stables. En revanche, le fait d’avoir vu se succéder en Tchéquie neuf premiers ministres, a placé la Tchéquie parmi les derniers pays de ce peloton. Les auteurs de l’article soulignent également :

« Il faut noter que les Slovaques ont adopté la monnaie européenne commune et qu’ils sont dès lors prêts à participer aux activités de l’union bancaire, de l’union fiscale et d’autres instruments du gouvernement européen commun. Plus encore : cette année, la Slovaquie a dépassé pour la première fois la Tchéquie par le niveau de son revenu national brut... Cela signifie que l’une des certitudes tchèques qui veut que la Tchéquie soit un pays plus riche que la Slovaquie n’est plus valable. »

En analysant les causes de l’état actuel, l’article cite plusieurs économistes qui considèrent notamment que « les Slovaques ont été plus résolus dans le choix de leurs priorités et plus capables d’aboutir à des consensus ». Et de conclure :

« Les vingt années écoulées ont modifié l’ancienne fédération tchécoslovaque non seulement sur le plan économique, mais aussi d’un point de vue des mentalités. Une compétition exacerbée entre Tchèques et Slovaques est dorénavant révolue, ne figurant plus au cœur de leurs aspirations... Il sera toutefois intéressant de suivre comment les deux pays vont évoluer, côte à côte, dans un proche avenir. »

Chercher des alternatives pour le commerce

Photo: Commission européenne
« La Russie n’est pas un bon partenaire commercial ». Tel est le titre d’un commentaire de la plume de l’eurodéputé tchèque conservateur Luděk Niedermayer (TOP 09) rédigé pour le quotidien économique Hospodářské noviny dans lequel celui-ci souligne qu’ « un rapport de marché de qualité doit s’appuyer sur la confiance et le respect des règles, voilà pourquoi l’Union européenne est appelée à chercher des alternatives ». Il écrit :

« Au cours des mois écoulés, le monde qui nous entoure a connu un changement dramatique. Le sentiment de sécurité a disparu... Les efforts des pays occidentaux de contraindre la Russie au respect du droit, sans avoir recours à une confrontation militaire, sont basés sur des sanctions économiques. En même temps, l’Occident vit à l’heure du débat sur la question de savoir ‘si l’on peut se le permettre d’un point de vue économique’... Force est de constater que les pays de l’Union n’orientent vers la Russie que 7% de leurs exportations, tandis que la Russie exporte vers ces pays la moitié de leurs marchandises. Or, c’est plus le Kremlin que Bruxelles qui doit craindre de graves incidences commerciales. »

La perte de débouchés et de sources nécessaires d’énergie, tels sont les arguments des personnes sceptiques à l’égard des sanctions. Luděk Niedermayer estime cependant qu’en dépit des retombées de ces sanctions, « un pays qui ne respecte pas les accords et ignore la souveraineté des Etats ne peut pas constituer un partenaire commercial fiable ». Il explique plus loin :

«On entendra des voix prétendant que dès que les armes se seront tues, il faudra rétablir les contacts commerciaux avec la Russie et oublier les événements du passé. Mais ce serait une erreur. Le Kremlin a montré que sous cette direction, la Russie ne peut être un partenaire commercial fiable et stable... A la place de crainte abstraites liées aux conséquences du déclenchement d’une guerre commerciale entre la Russie et l’Union européenne, il y a lieu de chercher rapidement des alternatives, afin de garantir la stabilité et la prospérité des pays européens. Les instruments pour cela existent, il faut seulement ne pas hésiter et agir. »

Les Tchèques et la crise ukrainienne

Photo: ČTK
« La Tchéquie – un allié hybride ». Tel est le titre d’un commentaire publié sur le site aktuálně.cz dans lequel son auteur Jiří Pehe porte un regard critique sur la position des responsables politiques tchèques à l’égard de la crise russo-ukrainienne qui se présente, d’après lui, comme une « guerre hybride » et qui ne peut être menée comme telle qu’à condition d’un certain louvoiement des pays alliés. Il précise à ce sujet :

« Hélas, force est de constater, que c’est aussi la République tchèque qui figure parmi les membres hybrides de l’Union européenne et les alliés de l’OTAN. Il suffit de rappeler le louvoiement du Premier ministre tchèque autour de la question des sanctions... Et pourtant, on sait que les sanctions représentent une mesure politique plus qu’une mesure économique, dont le but est de pousser l’agresseur à changer son comportement. »

Jiří Pehe signale plus loin que le regard de l’opinion publique tchèque sur le conflit ukrainien semble également ambigu. Il écrit :

« Dans un pays qui avait un des partis communistes les plus puissants en Europe de l’Est et dont le descendant n’a pas été à ce jour interdit, il n’est peut-être pas étonnant de voir combien il y a de personnes qui sympathisent avec la politique actuelle du Kremlin. Si l’on y ajoute les éléments fascisants marginaux de la droite tchèque et le camp postcommuniste au sein de la social-démocratie, il faut se demander, par exemple, ce que révèlerait une enquête sur la question de savoir qui est le véritable coupable de la crise actuelle. »

Or, pour l’auteur du commentaire, la République tchèque est un allié « hybride » ce qui veut dire qu’elle est membre de l’OTAN et de l’Union européenne, sans l’être vraiment.

L’Ecosse : une nouvelle partition « à l’amiable » à l’instar de la Tchécoslovaquie ?

Ecosse,  photo: Gil Cavalcanti,  CC BY-SA 3.0 Unported
S’agissant de l’agenda international, c’est aussi le prochain référendum sur l’indépendance de l’Ecosse qui est largement commenté dans les médias locaux. Dans un texte publié sur le site respekt.cz, Jan Macháček met cet événement en rapport avec la partition de l’ancienne Tchécoslovaquie, il y a plus d’une vingtaine d’années, qui était à l’époque l’exemple d’une partition calme et à l’amiable. En plus, à la différence de l’éclatement des pays comme la Yougoslavie ou l’Union soviétique, la Tchéquie et la Slovaquie représentent aujourd’hui deux Etats démocratiques et relativement prospères. Dans ce contexte, le journaliste écrit :

« Beaucoup d’Ecossais espèrent que l’Ecosse et l’Angleterre arriveront à se séparer à l’amiable, à l’instar des Tchèques et des Slovaques... Il faut cependant rappeler aux idéalistes en Ecosse, que s’il n’y a pas le risque de violence, le divorce pourrait être long, amer et désagréable. A noter aussi qu’en 1992, tant les Slovaques que les Tchèques ont finalement souhaité la partition. Si les Slovaques voulaient s’émanciper, les Tchèques, quant à eux, en avaient assez de discussions à n’en plus finir. Les Anglais, en revanche, ne se réjouissent pas d’un éventuel départ écossais. »

En conclusion, Jan Macháček remarque :

« L’éventuelle indépendance de l’Ecosse affaiblirait et fragiliserait l’Union européenne et l’OTAN dans un contexte où il faut souhaiter au contraire leur renforcement. »