Visite de la galerie-librairie Ztichlá klika

Ztichlá klika

Pas la peine d’avoir une grande galerie réputée pour monter des projets intéressants. D’ailleurs, parfois c’est dans les projets plus modestes, et moins marchands qu’on découvre parfois des perles rares. C’est ce à quoi s’échine depuis 15 ans Jan Placák avec sa librairie-galerie Ztichlá klika. Depuis quelques temps, une jeune Française, Virginie Béjot, l’aide à monter des expositions et à gérer la boutique.

Virginie Béjot, on se trouve au centre de Prague, près de la place Bethléem dans une galerie qui s’appelle Ztichlá klika. C’est aussi une librairie, qui vend des livres d’occasion ?

« On vend des livres d’occasion, mais aussi de vieux livres, des XVIe, XVIIe et XVIIIe siècle. On a prévu justement d’abandonner les livres d’occasion contemporains et de se concentrer sur les vieux livres. »

Donc des livres plutôt pour collectionneurs ?

« Oui, c’est plutôt des livres pour collectionneurs et pour des personnes qui ont un intérêt pour cela. Ce sont des livres-oeuvres. »

Peut-on décrire l’espace dans lequel on se trouve, la galerie ? Elle est dans le sous-bassement...

« Oui. Il faut descendre les escaliers pour y arriver. C’est un espace assez joli je crois. On fait des expositions tous les mois. Tous les mois ça tourne. »

Alors cette saison-ci, un peu plus longue, cet été, c’est Vladimír Boudník qui est exposé. Qui était Vladimír Boudník ?

« C’est un peintre tchèque. Il a commencé à faire des choses dans les années 1940. Il a vécu la période de la guerre en Allemagne. Quand il est revenu, il a suivi des cours à l’Ecole des Arts et Métiers à Prague. Ensuite il a été interdit comme la plupart des peintres tchécoslovaques. Il a lancé un courant qui s’appelle l’explosionalisme, tout seul. »

Qu’est-ce que l’explosionalisme exactement ?

« Il allait dans la rue, et sur les murs, il dessinait des choses que lui inspiraient les formes, car souvent les murs étaient défraîchis. Les choses tombaient et lui peignait. Il demandait aux passants de regarder et de lui dire ce qu’ils voyaient. Ca provoquait des discussions assez intéressantes. Parfois ça ne provoquait rien, d’autres fois des problèmes. »

C’est presque du street-art, comme on dirait aujourd’hui...

« Oui, du street-art, et des happenings, comme il appelait cela. C’était pour provoquer. C’était aussi pour faire de l’art avec les choses sur place, parce qu’il était impossible de sortir, de voyager. Il pensait à comment changer la société, la faire évoluer par l’art. Il estimait que chacun était capable de faire des choses artistiques. »

J’imagine que ça ne devait pas plaire beaucoup aux autorités, un trublion faisant des happenings dans la rue...

« Non, ça ne plaisait pas vraiment, et ça ne plaisait pas vraiment non plus à certaines personnes qui passaient dans la rue. Souvent il a entendu des choses pas très gentilles. »

Quelle vie a-t-il eue ?

« C’était quelqu’un de très indépendant, il a travaillé dans des usines. Il y créait. Il s’inspirait beaucoup des usines, des machines, de la matière. C’est le personnage central d’un des romans de Bohumil Hrabal, Tendre barbare. Souvent les gens pensent que c’est une figure littéraire mais il a vraiment existé. Il demandait aux ouvriers de faire leurs propres oeuvres. Et il a fait des expositions dans les usines également. »