Un prix littéraire pour Viktor Fischl

Jaroslav Skvorecky et Viktor Fischl, photo: CTK

Le prix littéraire Jaroslav Seifert a été décerné cette année à deux écrivains tchèques pour l'ensemble de leurs oeuvres, Josef Skvorecky et Viktor Fischl. Ce dernier a répondu à quelques questions de Vaclav Richter.

Jaroslav Skvorecky et Viktor Fischl,  photo: CTK
L'écrivain et diplomate Viktor Fischl vit depuis 1949 en Israël. Il a publié son premier recueil de poésies intitulé Printemps déjà en 1933. Aujourd'hui, à l'âge de 92 ans, il continue à écrire. Bien qu'il domine plusieurs langues, il écrit toujours en tchèque, sa langue maternelle. Il se souvient aussi de ses premiers succès littéraires: "Le premier prix que j'ai reçu en tant qu'écrivain a été le Prix de poésie de la maison d'édition Melantrich en 1936. Je l'ai reçu pour le livre intitulé "Les Mélodies hébraïques". Mon premier prix pour une oeuvre en prose m'a été décerné onze ans plus tard, pour le roman Chanson sur le regret. C'était le Prix du Club littéraire européen donc le prix littéraire le plus important en Tchécoslovaquie à cette époque-là. Je l'ai reçu au début de l'année 1947, mais déjà en février de la même année les communistes ont pris le pouvoir dans le pays. Ils m'ont dit: 'Tu peux garder l'argent que tu as reçu avec le prix, tu n'es pas obligé de le rendre, mais ton livre ne paraîtra pas. ' Et en effet, le livre ne pouvait pas paraître pendant de longues années. Je ne l'ai publié en hébreux qu'après mon départ en Israël. La version tchèque du livre n'est parue, je crois, qu'après 1990."

C'est sans doute le roman Les Bouffons du roi qui est le plus grand succès littéraire de Viktor Fischl. Le roman qui raconte l'histoire de quatre prisonniers juifs devenus saltimbanques pour amuser le chef d'un camp de concentration, éveille des questions sur le sens de la vie, l'existence de Dieu et l'ironie du sort. Quels sont les raisons du succès de cet ouvrage. Viktor Fischl: "La Shoa est un sujet d'une telle gravité que chaque homme contemporain doit y penser. Je crois que c'est la raison principale de l'intérêt que cette oeuvre a suscité. La deuxième raison de cet intérêt est sans doute le fait que c'est un livre bien écrit. Pour ceux qui ont vécu l'enfer des camps d'extermination, il est très difficile d'écrire un bon livre sur ce sujet. Il leur faut prendre du recul, et aussi une distance dans le temps, mais ils sont toujours en train de vivre cette période de leurs vies, et ils la vivront jusqu'à leur mort. C'est pourquoi j'ai écrit ce livre. On peut compter avec les doigts d'une seule main les personnes qui ont subi cela et ont écrit de bons livres sur ce sujet. Il y en a très très peu. Moi, je n'y ai pas été, mais j'avais la chance d'avoir un frère qui en est revenu. Il ne racontait à personne ce qu'il avait vécu là-bas. Mais, à moi, il en a dit assez pour me permettre d'écrire ce livre."