Prague déboulonne la statue d’un maréchal soviétique controversé

La mairie du sixième arrondissement de Prague a fait enlever vendredi matin de son piédestal la statue du maréchal soviétique Ivan Koniev, photo: Ondřej Kolář/PR/Facebook

La mairie du sixième arrondissement de la capitale tchèque a fait enlever vendredi matin de son piédestal la statue du maréchal soviétique Ivan Koniev, qui doit être remplacée par un mémorial de la libération de Prague en 1945.

La mairie du sixième arrondissement de Prague a fait enlever vendredi matin de son piédestal la statue du maréchal soviétique Ivan Koniev,  photo: Ondřej Kolář/PR/Facebook

Faut-il distinguer l’homme de son œuvre ? L’avantage avec les militaires est que cette question très contemporaine ne se pose pas – ou alors pas dans les mêmes termes que pour les artistes. C’est « l’œuvre d'après-guerre » du Maréchal Koniev qui pose problème à Prague.

Sa statue de bronze, inaugurée en 1980, va donc être entreposée dans un dépôt avant de faire partie de la collection d’un futur musée pour la mémoire du XXè siècle dans la capitale tchèque, selon le porte-parole de la mairie de Prague 6.

La décision de faire disparaître la statue de la voie publique avait été prise par le conseil municipal de l’arrondissement en septembre dernier et suscité la polémique ainsi que des vives réactions à Moscou.

Alors que Koniev est considéré comme un héros en Russie, de nombreux Tchèques le voient comme un personnage symbolisant l'oppression de l'ère soviétique. Il a dirigé les troupes de l'Armée rouge qui libérèrent une partie de l’Europe centrale, dont Auschwitz et Prague en 1945. Il a ensuite d’autres faits d’armes moins glorieux à son actif avant sa mort en 1973, comme le rappelait sur notre antenne Eduard Stehlík, spécialiste d’histoire militaire:

« Après la guerre, il y a bien sûr le problème de la répression très sanglante de l’insurrection hongroise contre le régime communiste. Son nom est aussi associé à la construction du mur de Berlin. En 1968, il est venu en Tchécoslovaquie avant l’occupation. Profitant de l’autorité incontestable dont il disposait ici en tant que libérateur, il a mené une opération de renseignements pour les unités soviétiques avant qu’ils n’occupent le pays. Je comprends donc que toute une série de personnes ne voient par le maréchal Koniev comme une personnalité blanche comme neige. »

Vojtěch Filip,  photo: Michaela Danelová,  ČRo
Sur la scène politique nationale, l’initiative du maire du sixième arrondissement Ondřej Kolář (TOP09) ne fait pas l’unanimité. Le porte-parole du président de la République Miloš Zeman a dénoncé le fait de déboulonner cette statue pendant l’état d’urgence, tout comme le président du Parti communiste.

« Minable initiative des élus de Prague 6, qui éliminent la statue du Maréchal Koniev au moment où les gens ne peuvent se réunir pour exprimer leur avis. C’est certainement pour eux une victoire digne contre le fascisme allemand et un hommage aux victimes du soulèvement de Prague et de la Deuxième guerre mondiale. Honteux. », a écrit Vojtěch Filip sur Twitter.

"La démolition du monument du maréchal Koniev ne restera pas sans réaction adéquate de la partie russe", peut-on lire sur le communiqué publié par l'ambassade de Russie à Prague.

Le déplacement de cette statue intervient quelques semaines après l’inauguration dans le même arrondissement de Prague - et devant l’ambassade russe - de la Place Boris Nemtsov, nommée ainsi en hommage à l’opposant russe assassiné en 2015.