Lors des deux derniers week-ends, plus de deux millions de Tchèques étaient appelés aux urnes pour élire 27 nouveaux sénateurs et ainsi renouveler un tiers des sièges de la Chambre haute du Parlement. A l’issue du second tour, qui s’est achevé samedi, le Sénat sera dominé par l’opposition de droite, incarnée notamment par le Parti civique démocrate (ODS). Son succès pourrait entraver l’action du gouvernement pour les deux prochaines années.
Petr Fiala, photo: ČTK/Michal Kamaryt
Un résultat « lamentable » pour son mouvement ANO, selon le Premier
ministre Andrej Babiš, une nouvelle débâcle pour le parti
social-démocrate (ČSSD), la principale formation de gauche dans le pays,
et, enfin, une réussite importante de l’ODS : tel est le bilan de ces
élections sénatoriales partielles.
Parti traditionnel du paysage politique tchèque, dont la réputation reste toutefois ternie par les scandales de corruption qui ont abouti à la chute de son dernier gouvernement en 2012, l’ODS a enregistré sa première victoire électorale depuis neuf ans : le parti conservateur s’est imposé dans dix des onze circonscriptions où ses candidats étaient encore en lice après le premier tour. Avec 16 sénateurs, les démocrates civiques deviennent une des principales forces politiques au Sénat, confirmant ainsi leur rôle de potentiel principal concurrent du mouvement ANO dans la perspective des prochaines élections législatives en 2021. Chef de l’ODS, Petr Fiala n’a pas dissimulé son optimisme :
« C’est une bonne nouvelle pour la République tchèque, car les partis qui forment la coalition gouvernementale, soutenue par les communistes, ne seront pas majoritaires au Sénat. Evidemment, ces élections représentent un excellent résultat pour l’ODS. (…) Les électeurs nous ont transmis un message clair : l’ODS est pour eux une alternative aux populistes et aux extrémistes. Notre parti est désormais un concurrent fort du mouvement ANO au pouvoir, qui se profile comme un mouvement de gauche. »
Jan Hamáček, photo: Jiří Němec
Toutefois, selon le journal économique Hospodářské noviny, la victoire
de la droite lors de ces sénatoriales risque, aussi surprenant que cela
puisse paraître, de renforcer la position du parti communiste (KSČM) à
la Chambre des députés, alors que celui-ci, pour la première fois depuis
1996, ne sera représenté par aucun de ses membres au Sénat. La coalition
gouvernementale, qui ne compte désormais plus que 20 sénateurs, risque
d’être confrontée au rejet de certains projets de lois par le Sénat.
Pour faire adopter ceux-ci en dépit du refus de la Chambre haute, la
Chambre basse devra compter sur le soutien des députés communistes.
Président du ČSSD, qui forme la coalition gouvernementale avec le mouvement ANO, Jan Hamáček s’attend, lui aussi, à ce genre d’obstacles :
« Je m’attends à ce que certaines lois sociales soient contestées par l’opposition de droite au Sénat. Je pense en particulier à la suppression des trois jours de carence ou à la modification du système des pensions alimentaires. Cela nous inquiète, car il s’agit de priorités pour la social-démocratie. Pour faire passer ces lois, nous serons obligés de trouver un soutien à la Chambre des députés. »
L’adoption des lois sociales est d’autant plus importante pour le ČSSD que c’est une grande partie de son avenir qui est en jeu. Après n’avoir recueilli qu’un peu plus de 7 % des suffrages aux élections législatives en 2017, son plus mauvais résultat depuis sa fondation en 1921, le parti social-démocrate poursuit sa chute libre, en perdant 12 sièges au Sénat. Critiquée à l’intérieur même de ses rangs, la présence du ČSSD au gouvernement, au côté du mouvement ANO, reste, pour le président Jan Hamáček, l’unique chance de survie pour son parti.
A noter enfin que l’opposition n’est pas incarnée au Sénat uniquement par l’ODS. Celui-ci est au coude-à-coude avec le Parti chrétien-démocrate (KDU-ČSL) et le Mouvement des maires et indépendants, mieux connu sous l’acronyme STAN. Chacun de ces partis occupera au minimum 16 sièges à la Chambre haute du Parlement.
Photo: ČTK/Michal Krumphanzl
Nous l’avions déjà constaté dans nos émissions : certaines
candidatures sénatoriales ont fait l’objet d’une attention
particulière. Il s’agit là des anciens rivaux de Miloš Zeman lors de
l’élection présidentielle en janvier dernier, à savoir du scientifique
Jiří Drahoš, élu dès le premier tour, du diplomate Pavel
Fischer et du médecin Marek Hilšer. Ils ont tous été plébiscités par
les électeurs.
Par ailleurs, ces derniers ont été très peu nombreux à se déplacer aux urnes lors du second tour de ces élections sénatoriales : la participation a été de 16,5%. Pour le Premier ministre Andrej Babiš (ANO), qui lui non plus n'a pas participé au second tour en raison d’un déplacement à l’étranger, il s’agit là d’un signe que le système électoral devrait être réformé de façon à ce que les sénatoriales ne se déroulent plus qu'en un seul tour.
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