L'extrême droite fait sa pub à Lety u Pisku

Samedi, Narodni Strana, un parti d'extrême droite tchèque en quête de visibilité, avait décidé d'organiser un rassemblement à côté de l'emplacement de l'ancien camp de Lety u Pisku. Un camp où plus d'un millier de personnes, en grande majorité des Roms, ont été internées pendant la guerre, avant d'être déportées vers des camps d'extermination, et où 326 prisonniers ont trouvé la mort.

Un peu avant que se réunissent les militants d'extrême droite, des membres et représentants de la minorité rom sont venus se recueillir à quelques centaines de mètres de là, devant le monument dévoilé en 1995 par Vaclav Havel. Certains avaient amené avec eux les photos de membres de leur famille internés à Lety. Parmi eux, Karel Holomek, qui revenait de Strasbourg où il a présenté une exposition sur le camp de Lety aux députés européens :

« Ce camp de Lety u Pisku, comme celui de Hodonin u Kunstatu, fut sans aucun doute un camp de concentration à partir du 2 août 1942. Ce que j'ai dit au Parlement européen est que l'un des exemples de négation de l'holocauste des Roms a lieu en ce moment avec le rassemblement de néo-nazis organisé par le Parti national (Narodni strana) ce 21 janvier sur les lieux du camp de concentration de Lety. Ils nient que ce camp ait été un camp de concentration pour Roms et il ne fait pas de doute que leur attitude est inspirée des déclarations antérieures du député européen communiste Miloslav Ransdorf, d'autres députés européens du Parti civique démocrate (ODS), et malheureusement même des déclarations du chef de l'Etat Vaclav Klaus.»

Récemment, le président de la République a déclaré dans un entretien au quotidien Lidove noviny que le camp de Lety était à l'origine un camp de travail pour ceux qui refusaient de travailler et que ce « n'était pas vraiment un camp de concentration tel que chacun d'entre nous comprend inconsciemment l'expression 'camp de concentration'. »

Markus Pape,  photo: CTK
Le parti d'extrême droite mené par Petra Edelmannova avait l'intention d'inaugurer samedi sa 'pierre' posée non loin du camp sur laquelle figurait l'inscription « Aux victimes ». Une pierre qui a soulevé la polémique toute la semaine dernière et qui a fini par être enlevée jeudi par la municipalité. Cela n'a pas empêché une petite cinquantaine de militants de se rassembler pour écouter des discours dans lesquels le fait qu'il y ait eu génocide des Roms à Lety a été nié. Le journaliste Markus Pape, militant pour la cause rom, a choisi, contrairement aux autres activistes, de contourner la porcherie de Lety pour se rendre au rassemblement du Parti national. Il n'a pas fallu beaucoup de temps pour que le ton monte.

Pour avoir crié les mots « Stop nacismu », ou stop au nazisme en français, après avoir été violemment repoussés par des militants au crâne rasé, Markus Pape et l'un de ses amis ont été interpellés par les forces de l'ordre, présentes sur place pour prévenir tout affrontement. Présent également sur le lieu du rassemblement, le sénateur Jaromir Stetina est convaincu que certains des orateurs du jour ont violé la loi sur le négationnisme et s'est déclaré prêt à témoigner après l'incident.

La polémique autour du camp de Lety n'est pas prête de cesser. L'un des points centraux de cette polémique reste la porcherie industrielle bâtie sous le communisme à l'endroit où se trouvait le camp. Une porcherie que, jusqu'à aujourd'hui, les gouvernements successifs ont tenté sans succès de fermer ou déménager. Sur des pancartes des militants d'extrême droite on pouvait d'ailleurs lire "Laissons la porcherie là où elle est". Nous reviendrons sur cette polémique, ce mardi, dans la prochaine édition de la République tchèque au quotidien.