Les « nouveaux hommes » tchèques au foyer et aux fourneaux

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La famille traditionnelle change et la République tchèque ne fait pas exception. Mais parce que dans ce pays post-communiste, le partage des rôles dans la famille n’est parfois pas une évidence, une association tchèque qui prône l’égalité des chances a décidé de lancer une campagne de sensibilisation.

« L’homme nouveau sait qu’être père est aussi un métier, que le salaire n’a rien à voir avec le sexe, que sa femme n’est pas une servante, que les enfants ont besoin d’être changés et dorlotés. Pendant ce temps-là, sa femme peut étudier, faire du théâtre ou régler des problèmes administratifs... », tel est le type de message délivré par la campagne d’affichage installée à l’intérieur de plusieurs lignes de tramways pragois.

« Ce n’est finalement pas un thème très fréquent, en tout cas, ce n’est pas habituel d’en parler, mais ça commence. Nous estimons qu’il est important de soutenir la paternité, les pères actifs qui s’engagent dans la sphère familiale. Mais en même temps nous ne voulons pas faire de ces pères des héros. Ce ne sont pas des héros, ils ne font que ce que font les femmes tous les jours depuis toujours. »

Tomáš Pavlas est coordinateur du projet au sein de l’association initiatrice, il est lui-même un « homme nouveau ».

Un homme qui n’est pas là uniquement pour les bons côtés de la paternité : jouer avec les enfants, faire des randonnées le week-end quand il ne travaille pas. Dana Radová, directrice de l’association :

« La paternité a de nombreuses facettes et il ne faut pas en avoir honte ! Ici, il y a beaucoup d’hommes qui s’occupent des enfants, au même titre que les femmes. Sauf que quand on s’est adressé à certains pour figurer dans la campagne, ils n’osaient pas, pour eux être père est une évidence, mais par exemple ils n’osent pas en parler au bureau... »

Paradoxalement, la législation tchèque favorise une paternité active. Les six mois de congé maternité sont suivis de la possibilité d’un congé parental, où les parents peuvent théoriquement même alterner tous les mois. Une souplesse que n’ont même pas les pays scandinaves, relève Tomáš Pavlas. Mais rien dans la société tchèque n’incite, d’après les membres de l’association, à briser les stérérotypes : les médias entretiennent l’image traditionnelle de la famille. Pire : les politiques eux-mêmes. Dana Radová :

« Notre Premier ministre, Mirek Topolánek, a dit dans son discours à l’occasion du lancement de l’année de l’égalité des chances, en 2007, que les femmes avaient les mêmes chances que les hommes si et seulement si elles n’avaient pas d’enfants. Un point de vue pour le moins ‘intéressant’. »

Pourtant, la constitution de la Première république tchécoslovaque après 1918 contenait déjà le principe de l’égalité des chances, bien avant d’autres pays. Pour Tomáš Pavlas, les pays exemplaires en Europe aujourd’hui ne sont pas forcément ceux auxquels on s’attend :

« Ce n’est plus vrai que seule la Scandinavie est à la pointe. Il suffit de regarder en Allemagne mais aussi en Italie et en Espagne qui ont des formes intéressantes de soutien au congé parental des pères. A cet égard, l’Espagne est très en avance sur toutes ces questions d’égalité entre hommes et femmes. »

Et comme tiennent à le rappeler les membres de l’association, ces ‘nouveaux hommes’, ce sont simplement des ‘hommes biens et honnêtes’ qui sont conscients des problèmes de discrimination et s’y opposent. Si un des héritages du passé communiste est aussi le problème du manque cruel de crèches et de structures d’accueil des enfants, Tomáš Pavlas et Dana Radová regrettent qu’il faille tant d’associations luttant avec si peu de moyens pour imposer des évidences.