Les maires de Prague, Budapest, Bratislava et Varsovie ensemble « pour casser l’image du V4 »

Zdeněk Hřib, Gergely Karácsony, Matúš Vallo, Rafal Trzaskowski, photo: ČTK/AP/Szilard Koszticsak

Le Pacte des villes libres : c’est le nom de l’accord signé mardi par les maires des quatre capitales des pays du groupe de Visegrad, signé symboliquement à l’Université d’Europe centrale de Budapest. Avec ses homologues hongrois, polonais et slovaque, le maire de Prague espère ainsi renforcer la coopération dans plusieurs domaines comme l’environnement, le logement mais aussi les fonds européens.

Zdeněk Hřib,  Gergely Karácsony,  Matúš Vallo,  Rafal Trzaskowski,  photo: ČTK/AP/Szilard Koszticsak

Zdeněk Hřib (Pirates) insiste également sur le côté symbolique de ce partenariat avec les maires de Bratislava (Matúš Vallo), Budapest (Gergely Karácsony) et Varsovie (Rafal Trzaskowski) et indique qu’il s’agit de signaler « un partage des mêmes valeurs et l’existence de voix dans nos pays qui ne s’identifient pas à la politique populiste et nationaliste ». Pour en parler sur RPI, le politologue Jacques Rupnik, spécialiste de l’Europe centrale :

Quelle est la portée symbolique de ce « Pacte des villes libres » ?

« Je pense qu’il y a deux dimensions importantes. La première est de casser l’image du Groupe de Visegrad comme bastion du populisme nationaliste eurosceptique qui, depuis quelques années, s’est imposée au sein de l’UE et particulièrement dans les pays d’Europe occidentale. Le fait que les maires des quatre capitales affirment clairement leur attachement à la démocratie libérale et à la construction européenne est important pour casser cette image. »

« L’autre aspect est que cela rend explicite le clivage qui maintenant domine et traverse ces sociétés : le clivage entre grandes villes ouvertes, cosmopolites, relativement prospères, avec haut niveau d’éducation et d’intégration au courant européen et le reste de la société qui est plutôt réticent à cette politique des grandes villes et à la politique de l’ouverture. Cela symbolise ce clivage interne qu’on pourrait dire être un clivage ouverture/fermeture. »

Il faut quand même préciser que les rapports qu’entretiennent les maires de ces capitales avec leur gouvernement respectif ne sont pas les mêmes…

« Certainement. La polarisation de la scène politique est très forte. Un maire d’opposition à Varsovie, c’est un défi au parti gouvernemental PIS de Kaczynski. Alors qu’il n’y a pas ce même degré de conflictualité ou d’animosité au niveau de la ville de Bratislava ou, toutes proportions gardées, à Prague. »

« Donc oui, il y a des situations particulières où la polarisation extrême de la vie politique donne à ce Pacte une dimension interne beaucoup plus aigüe en Pologne et en Hongrie. »

Un accent a été mis sur le besoin d’une relation plus directe entre ces villes et Bruxelles, dans un contexte particulier à Prague avec les ennuis du Premier ministre Andrej Babiš et à Budapest où le Premier ministre Orban a été sommé de rembourser des subventions européennes…

Photo illustrative: Pixabay,  Pixabay License
« C’est la spécificité de l’Europe centrale, parce que les fonds européens vont de l’UE vers les pays économiquement plus faibles et ces fonds ne sont pas attribués aux gouvernements. Ils sont censés être attribués aux régions pour des projets concrets, notamment. Le Premier ministre tchèque réclame un contrôle sur ces fonds en demandant qu’ils soient distribués par les gouvernements. »

« Les partis d’opposition et le maire de Prague rétorquent que ces fonds doivent être attribués aux villes et aux régions pour des projets concrets et c’est le contrôle du bon usage de ces fonds qui est en cause tant à Budapest qu’à Prague en ce moment. »

« On sait aussi que c’est l’usage des fonds européens qui a été en partie à l’origine de la dernière crise en Slovaquie, où commence aujourd’hui le procès de l’assassinat du journaliste d’investigation Jan Kuciak. Il enquêtait notamment sur l’usage de ces fonds dans certaines régions. Cela lui a coûté la vie et cela a entraîné le sursaut que l’on a connu ensuite. Donc quand le maire de Bratislava parle de ce sujet, cela a une résonnance particulière. Les fonds européens ne sont pas attribués au gouvernement en place. On a une exigence de transparence et les capitales, d’une certaine façon, peuvent faire passer ce message. »

Radio Prague Int. reviendra sur le sujet ce vendredi avec le professeur Christian Lequesne.