L’émergence de nouvelles maladies, un risque pour l’Europe aussi

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Après la Turquie l’année dernière, c’est Brno en Moravie qui accueille jusqu’à vendredi la 3e réunion annuelle du Projet EDEN. Ce projet de la Commission européenne a été lancé en 2004 et s’achèvera en 2010. EDEN concerne les maladies émergentes en Europe. Fruit de la collaboration entre le Cirad, l’Institut de recherche pour le développement et l’Institut Pasteur de Paris, la conférence de Brno est aussi placée sous le signe d’un partenariat avec l’Institut de biologie vertébrée de l’Académie des Sciences de RT. Entretien avec Renaud Lancelot, coordinateur du projet et chercheur au Cirad, qui explique ce qu’est une maladie émergente.

Renaud Lancelot
« C’est d’abord des maladies qui sont transmises par des vecteurs, donc des insectes ou des rongeurs par exemple. Ce sont aussi des maladies en recrudescence à l’heure actuelle, ou qui menacent l’UE. »

Vous êtes donc à Brno pour une conférence qui a pour thème le lien entre ces maladies émergentes et les changements climatiques, c’est bien cela ?

« Tout à fait. Le projet EDEN vise à expliquer les liens qu’il y a entre les changements environnementaux et l’augmentation de la fréquence de certaines maladies par des vecteurs. Parmi les maladies qui concernent les gens de la République tchèque, on peut citer la fièvre « West Nile » ou les encéphalites transmises par les tiques. »

Pourquoi la fièvre « West Nile » ? J’entends derrière ce nom l’Ouest du Nil. Le Nil est loin.

« Le Nil est loin certes, mais cette maladie est transmise à longue distance par les oiseaux, les oiseaux migrateurs en particulier. Dans les endroits où les oiseaux migrateurs arrivent, elle est transmise notamment par des moustiques. »

Si je comprends bien, des maladies émergentes, ce sont des maladies qui apparaissent aujourd’hui et qui n’étaient, soit pas connues du tout, soit pas connues dans certains endroits du monde ?

« Tout à fait. On peut citer l’exemple de l’encéphalite transmise par les tiques qui est très révélateur. Ces maladies sont bien connues en Europe de l’Est notamment. Elles sont en recrudescence dans certains endroits, et en diminution dans d’autres. Un des objectifs du projet EDEN c’est de comprendre pourquoi dans certains endroits on observe une recrudescence, et ailleurs, une diminution de la fréquence de la maladie. De toute évidence, ce sont des facteurs environnementaux qui sont liés à cette différence de fréquence des maladies. »

Pour cette maladie, la fièvre « West Nile », y a-t-il un remède, un traitement ?

« Il n’y a pas de vaccin, pas de traitement. C’est une maladie qui est due à un virus. Comme beaucoup de maladies virales, on n’a pas de vaccin, pas de traitement. La seule manière de s’en protéger c’est d’éviter de tomber malade. Par exemple, il y a eu une grande épidémie de cette fièvre qui a touché les Etats-Unis il y a quelques années et la prévention passe par la protection contre les piqûres de moustiques, que ce soit la lutte contre les gîtes des moustiques dans les maisons ou les jardins alentour, ou bien le fait de porter des vêtements longs, de s’enduire avec des produits qui éloignent les moustiques etc. »

Quels sont les symptômes de cette maladie, puisque vous disiez que ça peut toucher la Tchéquie ?

« Il y a quelques cas connus en RT mais ce sont des cas extrêmement rares et sont bien moins fréquents que les encéphalites à tiques dont je parlais. En ce qui concerne la fièvre « West Nile », les symptômes sont la plupart du temps inapparents. Les gens ne se rendent même pas compte qu’ils sont malades. Mais dans une toute petite proportion de cas ça peut provoquer ce qu’on appelle des fièvres hémorragiques et dans certains cas, elles peuvent être fatales. »

Qu’est-ce qui a été évoqué notamment pendant ces quelques jours de conférence ?

« On commence à avoir une idée assez claire des conditions environnementales qui sont liées au risque d’occurrence de ces maladies. L’objectif est de faire une synthèse au niveau européen, faire un inventaire des zones à risque et d’autre part de mettre à disposition des organismes de la protection de la santé publique des outils permettant de cartographier et de prévoir les risques d’émergence de ces maladies. »