Législatives : après leur courte victoire, les sociaux-démocrates se déchirent

Michal Haškek et Bohuslav Sobotka, photo: CTK

Les élections législatives anticipées qui se sont tenues vendredi et samedi devaient mettre fin à la crise politique qui agite la République tchèque depuis plusieurs mois. Il n’en a rien été. Les négociations relatives à une possible coalition gouvernementale s’annoncent difficiles. Avant même qu’elles ne soient entamées, les divisions internes rongent le parti social-démocrate (ČSSD), vainqueur de l’élection.

Andrej Babiš,  photo: CTK
La nouvelle carte politique est marquée par quatre éléments : le déclin considérable des partis de l’ancienne coalition de droite, surtout du parti civique-démocrate (ODS), l’avènement de deux nouvelles formations dont celle de l’Action des citoyens mécontents (ANO) d’Andrej Babiš, le retour timide à la Chambre des députés des chrétiens-démocrates après trois années d'absence, et enfin la victoire décevante de la social-démocratie (20,45%).

En réaction à des résultats qui n’offrent pas aux sociaux-démocrates l’assise confortable à la Chambre des députés qu’ils espéraient, le comité central de direction de ce parti a lancé dimanche un appel au président de la formation, Bohuslav Sobotka, afin qu’il démissionne. Le chef de la fronde n’est autre que le vice-président du parti, Michal Hašek, proche du chef de l’Etat Miloš Zeman. On l’écoute :

« Le comité de direction, qui est l’organe le plus important de la social-démocratie devant le comité centrale d’exécution, a appelé, à vingt voix contre treize, Bohuslav Sobotka à démissionner de ses fonctions de chef de la social-démocratie et à assumer la responsabilité politique des pires résultats électoraux de l’ère moderne obtenus par la formation ČSSD. »

Suite à cet appel, lundi, plus d’un millier de personnes se sont retrouvées au Château de Prague pour soutenir le président du mouvement et pour dénoncer « une tentative de putsch » de Michal Hašek et de son équipe…

Pour les leaders sociaux-démocrates Jiří Dienstbier, Lubomír Zaorálek ou encore Jaroslav Zavadil, tous présents à la manifestation de ce lundi, Bohuslav Sobotka reste légitime et est garant de l’autonomie du parti vis-à-vis du chef de l’Etat Miloš Zeman. Cette aile du parti et celle au contraire désireuse d’un rapprochement avec le président de la République s’étaient affrontées déjà en août dernier sur la question de savoir qui serait Premier ministre dans le cas où la social-démocratie remporterait les élections. Bohuslav Sobotka avait gagné la partie à la faveur d’un vote secret du comité centrale d’exécution.

Michal Hašek et Bohuslav Sobotka,  photo: CTK
Présent lundi au Château de Prague pour honorer l’héritage de la Première République tchécoslovaque, Bohuslav Sobotka analysait la situation présente en ces termes :

« Il s’agit apparemment d’un effort pour s’emparer du parti ČSSD suite aux élections, pour s’emparer du parti ČSSD au moment même où il vient de recevoir un mandat clair, un appui évident. Je ne sais pas encore exactement mais il ne fait aucun doute que ce n’est pas démocratique et que ce n’est pas respectueux des électeurs. »

En plus d’un appel à la démission de Bohuslav Sobotka, ce dernier a également été exclu de l’équipe dont la tâche sera de conduire les négociations en vue de former une coalition gouvernementale. Andrej Babiš, président du mouvement ANO, sensation de ces élections avec sa deuxième place et ses 18,65%, évoquait lundi la confusion qui semblait régner à gauche :

« Monsieur Hašek et Monsieur Sobotka m’ont tous deux contacté. Je ne peux pas organiser de rencontre avec eux tant que nos députés et notre comité de parti ne se sont pas exprimés sur le sujet. Pour nous, la situation au sein du parti ČSSD est confuse. »

Dernier retournement de situation en date, le mouvement ANO a finalement annoncé ce mardi par le biais de sa vice-présidente, Věra Jourová, qu’il négocierait avec Bohuslav Sobotka. Les chrétiens-démocrates feront de même. Cette ingérence de la nouvelle formation de l’homme d’affaires Andrej Babiš ne devrait cependant pas résoudre la crise interne de la social-démocratie.