Le système pénitentiaire en RT : désuet et communiste (II)

0:00
/
0:00

Suite, aujourd'hui, de l'entretien avec Miroslav Krutina, avocat, membre du Comité Helsinki qui va bientôt publier son Rapport interne sur l'état des prisons en RT. Surpopulation, insalubrité, éloignement des prisonniers de leurs familles, la liste des reproches faits par ce comité de défense des droits de l'Homme est longue.

Récemment, suite à sa visite dans différentes prisons européennes et autres institutions de détention, les propos du commissaire européen aux droits de l'Homme, Alvaro Gil-Roblès, ont fait l'effet d'une bombe en France notamment, où il avait pointé du doigt l'état désastreux de l'univers carcéral. J'ai demandé à Miroslav Krutina s'il était également venu en RT :

« Oui, il était là, il a même parlé avec notre représentant. Nous lui avons confié nos conclusions sur le pays. Nous estimons qu'un des problèmes essentiels ici se trouve contre toute attente hors du système pénitentiaire, c'est-à-dire dans le système judiciaire : les tribunaux n'ont en effet pas vraiment le choix lorsqu'il s'agit d'infliger une peine à un coupable. C'est ainsi que même ceux qui sont coupables de délits minuers se retrouvent derrière les barreaux. Il n'existe pas d'autres manière de travailler avec eux efficacement. Nous sommes persuadés que la justice elle-même doit être profondément réformée et surtout élargir le champ des peines alternatives, qu'on y ait recours plus souvent, ce qui d'ailleurs implique un nombre plus important d'agents chargés de s'occuper de ces systèmes de liberté sous surveillance. »

Miroslav Krutina rappelle que même si la volonté d'avoir recours à ces solutions alternatives peut exister, le manque de moyens et le chapelet de limites devant lesquelles se retrouvent les directeurs de prison sont un frein. Seuls certains types de prisonniers peuvent bénéficier parfois d'une approche autre : ceux en attente d'une libération prochaine ou ceux qui sont enfermés dans des sections spéciales, par exemple.

Une partie du travail d'observation et de contrôle du Comité Helsinki se base également sur les courriers qu'envoient les prisonniers. Les plaintes sont nombreuses et diverses, c'est pourquoi un travail de sélection est également nécessaire. Miroslav Krutina :

« Les prisonniers se plaignent le plus souvent de l'injustice de leur condamnation, mais le Comité Helsinki a pris le parti de ne pas s'occuper de cela en profondeur : nous ne leur fournissons qu'un service de consultation. Mais ils s'adressent à nous pour d'autres raisons : le non-respect du droit à une vie de famille, avec un éloignement trop important pour que les familles puissent leur rendre visite, ou des services médicaux inappropriés, la surpopulation. En gros, nous considérons environ 30% des plaintes reçues comme justifiées, et nous parvenons à les aider. Dans les 70% restant, il s'agit soit de cas dont le Comité ne s'occupe pas, car ils ne rentrent pas dans ses compétences, ou alors il ne fournit qu'un service de conseil, ou alors des cas où le prisonnier fabule et cherche à obtenir des avantages. »

L'année prochaine, le Comité souhaite aller glaner des idées hors des frontières du pays et trouver matière à inspiration notamment aux Pays-Bas, en Grande-Bretagne ou au Canada, en Autriche ou encore en Allemagne, sans exclure la France d'ailleurs, qui, d'après Miroslav Krutina a un « régime plus strict ». De même, un des projets consiste à envisager la mise en place de programmes pour les gens qui ont reçu une peine conditionnelle ou ont été libérés sous condition après avoir effectué la moitié de leur peine. Des programmes de réinsertion qui viseraient à reconstituer les conditions d'une vie citoyenne et exempte de crime.

Notons que le rapport final du commissaire européen aux droits de l'Homme devrait être rendu public cette semaine.