Le Printemps de Prague 1968 en tant que phénomène culturel au cœur d’une conférence internationale à Prague

«Две тысячи слов»

Il y a de cela 40 ans la Tchécoslovaquie vivait une période de dégel politique, le Printemps de Prague. Une réflexion sur le climat politique des années 1967-1969 dans la littérature, le film et les médias, et leur rôle joué dans le dégel politique interrompu par la force sont les thèmes d’une conférence internationale qui se tient du 20 au 22 mai à Prague.

Ivan Klíma
Une cinquantaine de personnalités de Pologne, de Russie, de Suède et de Slovaquie ont été invitées par l’Académie littéraire tchèque pour discuter des phénomènes culturels de 1968 – le film documentaire, la littérature, la chanson. La conférence apportera des témoignages authentiques sur le rôle de l’Union des écrivains, de la Gazette littéraire, du Film de l’armée… Le thème de la censure, de la manipulation, de la propagande et de la menace de liquidation professionnelle et personnelle est commun à l’ensemble des interventions, dont celle de l’écrivain Ivan Klíma. Au printemps 1968, il était rédacteur à Literární noviny (La Gazette littéraire) - un hebdomadaire paraissant alors dans un tirage impressionnant de 300 000 exemplaires. Il a pris part au Congrès des écrivains, considéré comme précurseur du Printemps de Prague, qui s’est déroulé en 1967 et qui a débouché sur une critique ouverte du PCT :

« La Gazette littéraire a été un hebdomadaire de société assez critique, en principe le seul hebdomadaire de l’opposition, à l’époque, car une opposition légale n’existait pas dans le pays. L’Union des écrivains accordait sa protection aux opinions de l’opposition, bien que dans le cadre du régime socialiste : en 1967, on n’allait pas au-delà de ce cadre, on l’a osé plus tard, en 1968. Ainsi, Václav Havel a publié, en début du printemps, un grand article sur la nécessité d’une pluralité politique dans le pays. »

Le Printemps de Prague a apporté l’abolition de la censure et la liberté de la parole, se souvient Ivan Klíma :

« Au mois de mars 1968, la censure a été abolie. Il était possible d’écrire librement et il ne dépendait que de nous mêmes jusqu’où nous étions prêts à aller, par rapport à la situation politique internationale : les Soviétiques ont organisé les manœuvres militaires dites planifiées en Tchécoslovaquie, or les soldats séjournaient sur notre territoire encore en juillet. J’ai décidé d’écrire un article donnant à entendre notre préparation pour nous défendre. La nouvelle direction du PCT, que le rédacteur en chef m’avait dit de consulter, m’a montré la carte de l’URSS, de l’ancienne RDA et d’autres voisins socialistes de la Tchécoslovaquie et m’a demandé : veux–tu vraiment combattre ? »

Au mois de mai 1968, la Gazette littéraire a été la première à publier les propos d’un général soviétique assurant de la préparation d’accorder une aide internationale pour sauver le socialisme en Tchécoslovaquie, tant que les fidèles communistes le demanderont. Le 21 août 1968, la Tchécoslovaquie a été occupée. Ivan Klíma est parti à l’université du Michigan aux Etats-Unis, mais il a refusé l’exil et est retourné à Prague. Le Printemps 1968 reste pour lui une formidable période de détente et de combat pour le renouveau de la démocratie.