L’affaire du « nid de cigognes » : Andrej Babiš face aux critiques de l’opposition

Le nid de cigognes, photo: ČT24

Le vice-Premier ministre et ministre des Finances, Andrej Babiš, doit faire face ces derniers temps à de nombreuses critiques dans l’affaire relative à sa ferme appelée « Le nid de cigognes ». Soupçonnée d’avoir bénéficié de manière indue de subventions européennes, cette dernière fait l’objet d’une enquête de la police tchèque et de l’Office européen de lutte antifraude (OLAF). Si certains représentants de la scène politique tchèque considèrent l’affaire comme exagérée par les médias, d’autres la jugent grave et estiment que le ministre devrait s’exprimer sur la question. C’est aussi la raison pour laquelle les partis civique démocrate (ODS) et TOP 09 demandent une réunion extraordinaire du Parlement.

Le nid de cigognes,  photo: ČT24
C’est une affaire peu claire : en 2009, donc cinq ans avant de devenir officiellement propriété du groupe Agrofert du ministre des Finances, Andrej Babiš, la ferme ultra-moderne, « Le nid de cigogne », a pu bénéficier de subventions européennes pour un montant de 50 millions de couronnes (près de 1,85 millions d’euros), des subventions destinées à soutenir les PME et le tourisme. Or, selon les médias tchèques, cette ferme aurait déjà appartenu à ce même géant Agrofert jusqu’en 2008 avant d’être transférée à des détenteurs d’actions anonymes permettant ainsi de dissimuler le nom des propriétaires des titres financiers, une pratique interdite en République tchèque il y a seulement deux ans. Cela a conduit la police tchèque et même l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) à ouvrir une enquête afin de découvrir s’il ne s’agissait pas là d’une conduite frauduleuse avec pour but d’obtenir des subventions auxquelles la ferme n’aurait pas eu le droit autrement. Rédactrice en chef du serveur Neovlivni.cz, le premier à avoir annoncé les investigations en cours, Sabina Slonková précise la principale question qui se pose dans l’affaire :

Sabina Slonková,  photo: Prokop Havel,  ČRo
« Je crois que la question clé est d’éclaircir à qui appartenait la ferme ‘Le nid de cigognes’ au moment où elle a demandé des subventions parce que l’essentiel des accusations repose sur le soupçon qu’Andrej Babiš a transféré la société aux détenteurs des actions anonymes parce que si elle avait été la propriété de son holding, elle n’aurait pas pu toucher les subventions concernées. Cela signifierait qu’Andrej Babiš était le propriétaire de la société ‘Le nid de cigognes’ au moment même où celle-ci a bénéficié de ces subventions. Et ce soupçon doit être sans aucun doute élucidé par l’OLAF et par la police tchèque. »

De plus, le serveur Neovlivni.cz, a informé qu’en 2009, la ferme s’est vu infliger une amende de plusieurs millions de couronnes pour ces versements indus. En 2012, cette dernière lui a néanmoins été en grande partie pardonnée.

Andrej Babiš,  photo: ČTK
Personnalité pour le moins controversée car à cheval sur la politique et le secteur privé, M. Andrej Babiš, pour sa part, donne des explications assez insatisfaisantes, en indiquant ne pas avoir eu vent de l’existence d’une telle amende et en refusant de révéler le nom du propriétaire de l’époque. C’est notamment ce manque de clarté qui est la cause principale de nombreuses critiques de la part de l’opposition, des partis civique démocrate et TOP 09, qui désignent l’affaire comme la plus grave depuis la formation de l’actuel gouvernement et qui demandent une réunion extraordinaire du Parlement sur la question. Plus réticent au début, le parti social-démocrate (ČSSD) a finalement aussi souligné l’importance de cette affaire et a décidé d’inviter le ministre des Finances à s’exprimer d’ici mardi ou mercredi. Dans le cas contraire, le ČSSD soutiendrait la demande de l’opposition d’une réunion extraordinaire. Le président du Sénat, Milan Štěch poursuit :

Milan Štěch,  photo: Marián Vojtek,  ČRo
« Cette affaire est grave parce que le vice-Premier ministre, ministre et député présente des affirmations très contradictoires. D’abord, il a indiqué que ‘Le nid de cigognes’ ayant reçu des subventions, n’a rien à voir avec le groupe Agrofert et donc avec lui-même. Mais il existe des documents témoignant de ses déclarations où il affirme que ‘Le nid de cigognes’ est son meilleur projet et qu’à l’heure actuelle la société lui appartient, ce qu’il a avoué seulement un jour après avoir déclaré le contraire. Avec ces informations contradictoires, il ne cesse de s’empêtrer dans ce problème. »

Si le président Miloš Zeman juge que l’affaire est en réalité beaucoup moins importante qu’elle n’en a l’air et qu’elle est exagérée par les médias, Andrej Babiš considère qu’il s’agit « d’une vengeance de la part de ses anciens collègues et nourrie par l’opposition ».

La réunion du Parlement devrait avoir lieu le 23 mars prochain.