La question de l'ouverture du marché du travail lors du sommet de Bruxelles

Vladimir Spidla et Cyril Svoboda au sommet de Bruxelles

Si l'atmosphère générale était à l'optimisme et au consensus lors du sommet qui a réuni la semaine dernière à Bruxelles les chefs d'Etat et de gouvernement des 25, l'épineuse question de l'ouverture du marché du travail des quinze membres actuels n'est pas sans poser de problèmes, et ce notamment côté tchèque.

Le sommet de Bruxelles,  photo: CTK
Ouvrez votre marché du travail! Tel est, en gros, le message, qu'a voulu faire passer la délégation tchèque lors du sommet qui s'est tenu à Bruxelles jeudi et vendredi derniers. Selon le Premier ministre Vladimir Spidla, les restrictions imposées par les Quinze à la liberté de circulation de la main d'oeuvre dans l'Europe élargie va à l'encontre des objectifs fixés par la "stratégie de Lisbonne", sensée faire de l'économie européenne l'économie la plus dynamique et la plus compétitive du monde d'ici l'année 2010. Une stratégie qui rappelle par ailleurs au chef du gouvernement tchèque le fameux yéti, "parce qu'on en entend toujours parler, mais personne ne l'a jamais vue".

"Lors des discussions, j'ai insisté sur le fait que mettre des limites à la libre circulation des personnes allait nuire directement à la réalisation des objectifs de la stratégie de Lisbonne et à la croissance économique européenne. Je ne pense pas qu'il y ait le moindre risque d'une émigration massive, et aucune étude n'a montré jusqu'ici qu'il existait un tel risque" a indiqué le Premier ministre.

"J'ai également expliqué qu'un délai de sept ans était une période très longue, et que ce serait une perte énorme pour l'UE de ne pas profiter du bénéfice de la libre circulation de la main d'oeuvre dans tous les pays membres."

"La crainte d'une déferlante venue de l'Est est infondée. Cela ne correspond pas à la réalité. Nous ne craignons pas que les Belges émigrent en grand nombre vers Prague et envahissent notre marché du travail, alors que le niveau de vie y est élevé, que nous avons un beau pays, et brassons comme eux de très bonnes bières. Croire que les ressortissants des nouveaux pays émigreront en masse est une bêtise." a-t-il rajouté.

Vladimir Spidla et Cyril Svoboda au sommet de Bruxelles
Pour le ministre des Affaires étrangères, il s'agit avant tout d'une question de principe:

"C'est une question d'égalité, une question de symbole. C'est pourquoi nous ramènerons toujours le dossier sur la table des discussions, à tous les niveaux, et lors de toutes les prochaines réunions avec nos partenaires européens. Dès notre adhésion, nous agirons de manière à résoudre les problèmes liés à la libre circulation de la main d'oeuvre, dans la mesure où les restrictions poseraient de réels problèmes dans les faits. Car nous avons par exemple un contrat avec la RFA, qui nous impose des quotas, et pour l'heure, nous ne remplissons guère plus des deux tiers de ces quotas."

En ce qui concerne les autres pays, le chef de la diplomatie considère la barrière des langues comme un frein à l'émigration:

"En ce qui concerne les autres pays, je n'ai pas de crainte que nos ressortissants puissent 'menacer' les marchés du travail des Quinze. Je ne sais pas combien de Tchèques parlent assez bien le hollandais, le suédois ou le finnois, pour pouvoir aller travailler immédiatement dans les pays concernés, qui ont imposé un délai minimum de deux ans. En ce qui concerne l'anglais, qui est la langue la plus couramment parlée par nos concitoyens, les pays anglophones sont justement ceux qui ont mis le minimum de restrictions à la libéralisation du marché du travail, à savoir l'Irlande et la Grande Bretagne. Moins grande est la barrière de la langue, plus le marché du travail est ouvert."

Reste à savoir si les craintes d'immigration massive sont fondées : le précédent espagnol et portugais laisserait penser que non. La Commission vient de rendre publique une étude qui tend à démontrer que les mouvements de populations resteront limités - 220 000 personnes par an dans une UE qui comptera 450 millions de citoyens. Quoiqu'il en soit, le but pour les nouveaux adhérents est de faire en sorte que les Quinze réduisent le délai d'adaptation dont ils disposent pour ouvir leur marché du travail, à deux ans au maximum.