La montée de l’extrême-droite inquiète en République tchèque

Les néo-nazis à Ústí nad Labem, photo: CTK

Manifestations de l’extrême-droite ce week-end, cocktail Molotov contre la maison d’une famille rom dans laquelle une fillette a été gravement brûlée. Si tous ces événements n’ont pas nécessairement de lien direct entre eux, ils témoignent d’une atmosphère de tension dans le pays. Au point de faire réagir les politiques, d’ordinaire bien moins réactifs. Un peu tard, toutefois, pour le monde associatif.

Les néo-nazis à Ústí nad Labem,  photo: CTK
Les forces de l’ordre étaient mobilisées en nombre, samedi, à Ústí nad Labem, en Bohême du Nord. C’est dans une ville vidée de ses habitants, aux boutiques fermées et barricadées, quadrillée par la police, qu’ont manifesté près de 300 néo-nazis, tchèques, slovaques, allemands ou hongrois, sous couvert de commémorer le bombardement de la ville en 1945. Un défilé d’abord interdit par la mairie, puis autorisé par un tribunal administratif. Pour protester contre la manifestation se sont également rassemblés près de 200 anarchistes mais aussi des habitants de la ville. Et c’est paradoxalement contre eux que sont intervenues les forces de l’ordre. Une intervention justifiée par une porte-parole de la police Jarmila Hrubešová :

« Ils menacaient de mettre en péril le déroulement sans heurts de la manifestation. Ce défilé était autorisé, en accord avec la législation. Notre devoir était de faire en sorte que le trajet soit libre. »

L’incendie à Vítkov,  photo: CTK
Plus tôt dans la journée de samedi, le parti tchèque d’extrême-droite, Parti ouvrier avait défilé dans un quartier non loin de la ville de Teplice où ses militants avaient été arrêtés par un groupe de Roms venus s’opposer à leur marche. Autre événement du week-end, je vous le disais au début, l’incendie criminel déclenché par un inconnu dans une maison où logeait une famille rom, à Vítkov, dans la région de Moravie-Silésie. Une fillette, grièvement brûlée, est à l’heure actuelle entre la vie et la mort, et cet incendie qui a suscité l’émotion, a été condamné par la classe politique. Michal Kocáb, ministre sortant, chargé des droits de l’homme :

« Peut-être que nous nous sommes endormis et que le gouvernement devrait plus intervenir. Ce sera la tâche des prochains cabinets. C’est vrai que la situation s’est légèrement aggravée. Il faut absolument commencer à faire quelque chose. »

Michael Kocáb,  photo: CTK
Une enquête a été ouverte, et à l’heure actuelle on ne sait pas s’il s’agissait d’une attaque raciste. Mais c’est justement le réveil tardif des autorités que condamnent associatifs et spécialistes des mouvements d’extrême-droite. Dernier événement en date, les émeutes à Litvinov en novembre dernier, mais comme le souligne le sociologue Ivan Gabal, dans le quotidien Hospodářské noviny, « on observe une montée de l’extrémisme depuis un an et demi », sans que les hommes politiques ne se décident à s’attaquer au problème.

Si le Premier ministre Mirek Topolánek l’a mis à l’agenda du gouvernement ce lundi, il faut rappeler qu’il s’agit d’un gouvernement démissionnaire, plus apte à expédier les affaires courantes. En attendant, des associations roms ont émis l’idée de former des « patrouilles » roms, et même appelé les Roms qui en ont les moyens à partir au Canada. Dans ce contexte, rappelons que les demandes d’asile de ressortissants tchèques d’origine rom n’ont fait qu’augmenter des derniers mois, provoquant la crispation d’Ottawa.