En Tchéquie aussi, le référendum d’initiative citoyenne fait débat

Photo illustrative: rawpixel / Pixabay, CC0

L’une des revendications majeures du mouvement des Gilets Jaunes en France est l’instauration d’un référendum d’initiative citoyenne (RIC). Portée par différents partis politiques aux dernières législatives, l’idée de créer un référendum dit « général » (« obecné referendum ») fait aussi son bonhomme de chemin en République tchèque, où trois propositions concurrentes sont à l’étude.

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Contrairement à la plupart des pays européens, la constitution tchèque ne prévoit aucun instrument de type référendum à l’échelle nationale. Cet outil existe seulement à l’échelle locale, dans les communes et les régions, où il est d’ailleurs relativement inopérant car le seuil minimum de votants pour assurer sa validité est rarement atteint. Pour le vote d’adhésion à l’Union européenne, une loi spécifique permettant l’organisation du référendum avait d’ailleurs dû être adoptée.

La situation pourrait bientôt évoluer. Le débat a d’abord été porté par le parti d’extrême-droite SPD qui, lors des élections législatives de 2017, a fait campagne sur l’instauration d’un référendum national à l’initiative des citoyens. L’an passé, les députés de cette formation ont d’ailleurs présenté leur proposition de loi constitutionnelle. Ils ont bientôt été rejoints par les parlementaires du parti social-démocrate et du parti communiste, lesquels ont à leur tour, chacun de leur côté, décidé de soumettre leur propre projet.

Kateřina Valachová,  photo: Filip Jandourek,  ČRo
Le comité en charge des questions constitutionnelles à la Chambre des députés vient d’étudier les trois variantes et a donné sa préférence à celle présentée par les sociaux-démocrates, dont la proposition, sous réserve de quelques corrections, est également soutenue par le mouvement ANO, son partenaire dans la coalition gouvernementale, et par le parti des Pirates. La députée sociale-démocrate Kateřina Valachová détaille :

« Les changements sur lesquels tombent pour l’instant d’accord les sociaux-démocrates, le mouvement ANO et les pirates concernent le nombre de signatures nécessaires pour initier un référendum, les questions qui pourront être soumises ou non au vote des citoyens et enfin le seuil de validité du référendum, c’est-à-dire le nombre de votants nécessaires pour que le résultat du vote soit contraignant. »

Dans l’état actuel du texte proposé, les signatures de 450 000 personnes seraient nécessaires pour organiser un référendum général. Celui-ci ne pourrait pas remettre en cause, au grand dam du parti SPD, le statut de la Tchéquie de membre de l’Union européenne et de l’OTAN et son résultat serait pris en compte dans le cas où au moins 25 % du corps électoral aurait pris part au scrutin, soit environ 2 millions d’électeurs.

Dominik Feri | Photo: Jana Přinosilová,  ČRo
Le projet est cependant loin d’être adopté. Pour commencer, il suscite en effet un rejet catégorique dans certains partis de droite, qui y voient une démarche « populiste », par exemple chez les conservateurs de TOP 09, dont le député Dominik Feri, qui argumente :

« Nous pensons que notre système est fondé sur la démocratie parlementaire représentative. L’introduction de cet élément aurait un effet disruptif dans ce système, surtout dans les formes présentées par le SPD et le parti communiste. »

De plus, trois cinquièmes des voix sont nécessaires à la Chambre des députés pour qu’un texte modifiant la constitution soit voté. Pour remplir cette condition, les députés sociaux-démocrates, ANO et pirates devront donc compter sur le soutien de leurs collègues communistes. Or ceux-ci tiennent à ce que les citoyens tchèques puissent utiliser l’outil du référendum pour décider de leur avenir avec l’Union européenne et l’OTAN.

Et le problème risque d’être insurmontable au Sénat, où le texte devra ensuite être étudié et où il risque de se heurter à une opposition plus forte encore. « Il y a seulement un événement dans la vie où l’on peut répondre oui ou non et c’est le mariage », a ainsi commenté Jaroslav Kubera, du parti de droite ODS, le président de la Chambre haute du Parlement.