Aung San Suu Kyi : « Václav Havel serait toujours à nos côtés »

Aung San Suu Kyi, photo: CTK

Après s’être rendue successivement en Suisse, en Norvège, en Grande-Bretagne et en Irlande, Aung San Suu Kyi, chef de fil de l’opposition birmane et prix Nobel de la paix effectue cette semaine une visite en France, où elle a été invitée par le président François Hollande. Même s’il n’inclut pas Prague, ce périple européen de la célèbre combattante pour la liberté est très suivi en République tchèque qui continue à encourager la démocratisation de la Birmanie, comme le faisait, de son vivant, son ancien président Václav Havel.

Aung San Suu Kyi,  photo: CTK
« Aung San Suu Kyi vit, depuis de longues années, en résidence surveillée et nous en savons beaucoup sur la brutalité de cette junte militaire birmane dont elle est victime », déclarait, en octobre 2007, Václav Havel, lui-même ancien dissident, emprisonné à plusieurs reprises par le régime totalitaire. Bouleversé par le destin de la « Dame de Rangoon », le président tchécoslovaque d’alors exprime son soutien inconditionnel à Aung San Suu Kyi en la proposant, en 1991, au prix Nobel de la paix, auquel il est lui-même candidat. En juin 2012, six mois après le décès de Václav Havel, Aung San Suu Kyi a enfin pu se rendre à Oslo pour recevoir la récompense qui lui avait été attribuée pour ses actions non-violentes en faveur de la démocratie.

Avant d’entreprendre ce voyage en Europe, son premier depuis 1988 et que les médias internationaux qualifient « d’historique, de triomphal et de symbolique », la nouvelle députée du Parlement birman a eu une pensée pour Václav Havel :

« Nous n’oublions pas que Václav Havel nous soutenait et nous savons que s’il était vivant, il serait toujours à nos côtés », a-t-elle déclaré fin mai.

Sabe Soe
Sabe Soe est arrivée à Prague en tant que jeune boursière birmane en 1987, un an avant la violente répression du soulèvement populaire dans son pays qui a fait plusieurs milliers de morts. Aujourd’hui, Sabe Soe dirige le Centre birman de Prague. Elle explique, au micro de Radio Prague, ce que la tournée européenne d’Aung San Suu Kyi représente pour elle-même et, plus généralement, pour la Birmanie :

« Personnellement, je suis heureuse qu’Aung San Suu Kyi ait pu retrouver sa famille. Car ce voyage a non seulement un aspect politique, mais il est aussi très important pour sa vie privée. C’est également une occasion de remercier les pays démocratiques qui ont encouragé, pendant des années, la Ligue nationale pour la démocratie dans ses activités. Ce voyage, pendant lequel Aung San Suu Kyi a pu recevoir le prix Nobel, signifie que la Birmanie n’est pas tombée dans l’oubli. »

Si Aung San Suu Kyi se déclare « optimiste prudente » au sujet des changements impulsés par le gouvernement civil, Sabe Soe partage cette opinion :

Aung San Suu Kyi,  photo: CTK
« Quand on observe la situation en Birmanie de l’extérieur, on peut avoir l’impression que le pays vit une profonde transformation. Mais il ne faut pas oublier que le nord de la Birmanie est le théâtre de conflits armés d’origine ethnique. Ces affrontements mettent en cause le processus de démocratisation du pays. Je pense que le nouveau gouvernement birman devrait en premier lieu instaurer la paix. La libéralisation de plusieurs personnalités importantes de l’opposition ne doit pas éclipser le fait que plus de 800 prisonniers politiques restent incarcérés. Enfin, les violences ethniques et la mauvaise situation économique du pays contraignent de nombreux ressortissants birmans à quitter le pays. C’est aussi un défi à relever pour le nouveau gouvernement qui devrait assurer le rapatriement sûr et digne de ses réfugiés. »

Le Centre birman de Prague, qui existe depuis six ans, vient de lancer un programme d’aide financière destiné aux organisations de réfugiés birmans en Inde. Plus de détails sur son site www.burma-center.org