A Prague, des tasses à l’effigie d’Hitler dans les magasins de souvenirs

Une tasse et un t-shirt avec Adolf Hitler, photo: Naše vojsko

Acheter une tasse avec Hitler ou Mussolini en effigie ? C’est possible dans au moins un magasin de souvenirs du centre-ville de Prague, situé à deux pas de la place Venceslas. Et ce n’est de loin pas le seul cas connu, puisque depuis l’an dernier, la maison d’édition Naše vojsko, spécialisée dans l’histoire militaire, vend également mugs et T-shirt avec un portrait du Führer.

Une tasse et un t-shirt avec Adolf Hitler,  photo: Naše vojsko
C’est un reportage du serveur Seznam Zprávy qui a récemment attiré l’attention sur le business de ces tasses décorées d’un portrait d’Adolf Hitler. Celles-ci s’alignent à côté d’autres dirigeants tels qu’Angela Merkel, Donald Trump ou Vladimir Poutine. Un business juteux si l’on en croit le reporter puisque lors de sa visite du magasin de souvenir I Love Prague, le vendeur lui explique que les mugs représentant Hitler partent comme des petits pains.

Vu de l’Allemagne voisine ou de France, où la législation en la matière est particulièrement stricte, ce commerce peut paraître complètement inconcevable et choquant. Mais en République tchèque, ce n’est pas un cas isolé. Il y a quelques années, bien avant que Mein Kampf soit tombé dans le domaine public, un éditeur avait été condamné puis acquitté pour la traduction en tchèque du livre fondateur de l’idéologie nationale-socialiste.

Une tasse avec Hermann Göring,  photo: Naše vojsko
Et l’an passé, la maison d’édition Naše vojsko, spécialisée dans l’histoire et l’histoire militaire, avait suscité la controverse avec la mise en vente de tasses et de T-shirts à l’effigie d’Hitler : des produits toujours en vente libre sur leur site, alors que la police tchèque a annoncé cette semaine que ce commerce n'était pas illégal. Un tour rapide sur les pages web offre le constat désolant de tasses vendues à 13 euros, où Hermann Göring, Saddam Hussein, Staline, Reinhard Heydrich et autres criminels de guerre côtoient Marilyn Monroe, le pape François, Madonna et quelques stars de la pop tchèque.

Directeur marketing pour Naše vojsko, Stanislav Svoboda s’était défendu l’an dernier au micro de la Radio publique tchèque, arguant que la maison d’édition répondait seulement à la demande de la clientèle :

« Nous n’avons pas le sentiment de faire la promotion du nazisme. Si c’était le cas, cela voudrait dire qu’on distribuerait ce type de produits gratuitement au coin de la rue. Mais là, les gens veulent acheter un produit qu’ils veulent avoir avec de l’argent qu’ils ont gagné. Ce qu’ils croient ou l’idéologie qu’ils soutiennent n’a rien à voir avec nous. Nous ne faisons que fournir un produit qui est demandé. »

Une explication assez simpliste, mais qui reflète bien sans doute, un état d’esprit dans la société d’aujourd’hui, selon Tomáš Kraus, secrétaire de la Fédération des communautés juives de République tchèque :

« Cela fait plus de 70 ans depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale et les gens ne se rendent plus compte de la terrible tragédie que cela a représenté. Il y a donc une fascination pour le mal qui, parfois, peut prendre une forme commerciale. Dans ce cas, les intérêts commerciaux prennent le pas sur les valeurs éthiques et morales. Malheureusement, ce sont des choses qui arrivent. »

Ainsi promouvoir l’idéologie néo-nazie est un crime en République tchèque. Faire le salut hitlérien et nier la Shoah également. Mais profiter de la vente de produits représentant Hitler est permis s’il est impossible de prouver que le vendeur avait l’intention de faire la promotion d’une idéologie haineuse. Ou quand le droit défie la morale et le bon goût, et que se confirme tristement l’adage qu’il n’existe pas de petits profits...