Les arbitrages pourraient coûter 60 milliards de couronnes

Il sera question, dans cette émission, principalement du coût de sentences arbitrales défavorables à l'Etat tchèque, qui vient de perdre un arbitrage où il s'opposait à une société américaine de télévision. Mais il sera aussi question de l'état des forêts en Tchéquie.

La République tchèque se trouve actuellement face à quatre procès d'arbitrage entamés en raison d'une protection insuffisante ou de dommages causés à des investissements de différentes sociétés étrangères. Ce chiffre peut très rapidement augmenter, éventuellement même doubler. Selon les différentes informations, cinq autres sociétés étudient la possibilité de déposer une demande en arbitrage contre la République tchèque. Si Prague perdait les quatre arbitrages en cours, le pays payerait au total 63 milliards de couronnes, soit l'équivalent de 2,1 milliards d'euros, et la dette publique par rapport au PNB augmenterait de 2,6 points. Une famille tchèque moyenne, avec deux enfants, perdrait ainsi 25.000 couronnes.

Les arbitrages sont devenus un phénomène nouveau en République tchèque. Certains soutiennent que leur nombre va augmenter et se prévalent, dans leurs prévisions, de l'incompatibilité, assez fréquente, entre les lois tchèques et la législation internationale. Le facteur déclencheur de toutes ces intentions de procès se trouve être l'arbitrage international que Prague a perdu contre la société américaine CME à cause de la télévision Nova. L'Etat tchèque doit payer à CME, en vertu de cet arbitrage, 10,4 milliards de couronnes, plus les intérêts. En attendant, le gouvernement tchèque demande la révision de cet arbitrage pour des raisons de forme, ce qui reste mince.

Aussitôt, le directeur de la télé Nova, Vladimir Zelezny, ayant d'infinies démêlées avec la police et la justice, est plus que jamais objet d'interrogations. Le Tchèque moyen a commencé à s'intéresser aux problèmes d'arbitrage, inquiétudes auxquelles les journalistes s'empressent de répondre.

Le lecteur apprend, ou se fait rappeler, que l'obligation de protection des investissements est contenue non seulement dans la législation interne, mais encore dans les conventions internationales et les accords bilatéraux, que les arbitrages ne doivent pas forcément concerner la protection insuffisante de la propriété par l'Etat. Il peut s'agir d'un différend entre deux sociétés commerciales, mais qui peut se retourner contre l'Etat. Le procès d'arbitrage de l'IP (actuelle appellation de l'ancien IPB) contre la Ceskoslovenska Obchodni banka (CSOB) est rappelé à cette occasion. La situation comptable de l'IPB a été transférée, sous la bienveillance du gouvernement, en un week-end, à la CSOB, sauf les risques. La banque IP considère ce contrat nul et demande des dommages s'élevant à environ 40 milliards de couronnes.

Le procès est actuellement à la Chambre de commerce internationale de Paris (ICC). Il aura lieu à Vienne et, étant donné que les trois arbitres sont des Tchèques, c'est la langue tchèque qui sera la langue du procès. « Les arbitres sont nommés, et actuellement on prépare le canevas qui prévoit les questions auxquelles le procès doit répondre », a dit à Pravo le vice-président du conseil d'administration de l'IP banque, Tomas Kopriva. Procès privé ou procès à l'Etat tchèque en perspective ? La question se pose de savoir si l'IPB, en étant condamnée, ne se retournerait pas contre le gouvernement qui a supervisé l'opération, et donc, si la poche du contribuable ne serait pas encore mise à contribution.

Mais pourquoi l'arbitrage ? Pourquoi pas les tribunaux ? se demande le profane tchèque. La presse met en avant la rapidité de la procédure d'arbitrage et donc l'avantage par rapport au tribunaux. Autant de choses à savoir et d'autres pour qui voudrait suivre les arbitrages en perspective : on parle d'Invesmart qui a investi dans l'Union groupe et l'Union banka, de l'agence de voyages Fischer, qui demanderait des dommages pour scandales non fondés, de Frontier Petroleum Services au titre d'investissements dans l'Entreprise d'aviation Kunovice, de Housing & Construction pour l'annulation du marché de la construction de l'autoroute D47 d'Ostrava, qui lui était ou ne lui était pas adjugée, de Mediaprint pour l'annulation d'un contrat par des éditeurs de la presse. Autant de dossiers dont nous ne connaissons pas tout à fait le fond.

L'état des forêts en Tchéquie

Avant de terminer ce programme, un mot sur l'état des forêts en République tchèque. On n'en parle jamais assez et Dieu sait combien c'est important. Beaucoup a été fait depuis la chute du communisme. Par exemple, le phosphore dans les émanations des usines est de 90% inférieur à ce qu'il était il y a 12 ans. Mais le terreau des forêts est toujours trop acide. Les forêts ne guérissent pas et l'Etat cherche un nouveau remède. Dans 30 ans, l'état des forêts n'atteindra pas la qualité qui était la leur avant la Seconde guerre mondiale. L'Etat des forêts s'améliore plus lentement que ne l'estimaient les spécialistes au début des années 90.

Les rapports et expertises actuelles, notamment du Ministère de l'Environnement, démontrent qu'en raison des dommages causés au cours des décennies passées, les forêts tchèques sont toujours parmi les plus endommagées en Europe. On cite les sommets des monts Métallifères, Jizerské et Orlické, les Monts des Géants (Krkonose) et une partie des monts Jesenik. Leurs terres sont toujours contaminées par des produits chimiques venant des pluies acides. Le géochimiste Jakub Hruska, de l'Institut géologique tchèque, dit que c'est justement la terre qui empêche, surtout dans les montagnes, l'assainissement de la forêt. Depuis des décennies, la terre est trop acide et contient le minimum de minéraux dont les arbres ont besoin. En revanche, elle contient beaucoup de matières qui nuisent surtout à l'épicéa, l'arbre le plus répandu dans les montagnes.

Sur demande du gouvernement, les Ministères de l'Environnement et de l'Agriculture étudient depuis deux ans comment aider les forêts d'une manière plus efficace. Ils doivent présenter au cabinet un recueil des mesures qui aideraient au renouvellement de la terre plus rapidement. Parmi les projets, il y a, par exemple, une légère calcification ou épandage des engrais. Les spécialistes conseillent également de planter les arbres feuillus qui sont plus résistants que les conifères. Pourquoi l'administration n'a commencé à s'occuper des forêts que ces dernières années ? « Ils s'attendaient à ce que la chute rapide des émissions de phosphore améliore l'état des forêts, mais cela s'est avéré faux », explique Tomas Stanek du Ministère de l'environnement.

Auteur: Omar Mounir
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