Le canal de navigation Schwarzenberg

Il y a plus de deux cents ans, la bande bleue d'un canal de navigation a coupé la forêt vierge du massif de Sumava en Bohême du sud. Il a reçu le nom de Schwarzenberg, d'après le comte Schwarzenberg, propriétaire du domaine. A nos jour, le canal Schwarzenberg est l'un des monuments techniques les plus intéressants de Bohême du sud, qui attire chaque années des milliers de visiteurs tchèques et étrangers. Voici donc l'histoire et le présent de ce système ingénieux de vannes et de pertuis qui transportait l'eau du bassin de la Vltava à celui du Danube.

Cette oeuvre hydraulique géante, longue d'environ 50 kilomètres, servait à ses fins pendant des dizaines d'années. Nous la devons à l'ingénieur forestier Josef Rosenauer. En 1774, ce dernier a présenté ses plans de construction à son employeur, le comte Jan Schwarzenberg. Mais laissons parler déjà l'ingénieur Hynek Hladik, directeur de navigation du canal.

« Construit, il y a plus de 200 ans, le canal devait transporter le bois de chauffage et de construction des pentes nord de la forêt de Sumava, difficilement abordables, à travers la ligne principale de partage des eaux, à la rivière Grosse Mühl et au Danube. Le terminus était dans la capitale de la monarchie, Vienne. A l'époque, Vienne souffrait du manque de bois de chauffage, dont les prix ne cessaient d'augmenter. C'est pourquoi les propriétaires des forêts inexploitées de Sumava cherchaient à profiter de cette situation. Tout d'abord il fallait convaincre le comte Schwarzenberg que la construction d'un tel canal était vraiment réelle et possible. Pour y arriver, l'ingénieur Rosenauer devait même contraindre l'eau à monter la pente, dans le tronçon appelé Jezova (Igelbach), long de 994 brasses.

La construction du canal a été entamée en 1789. Dans la première étape on a construit le dit ancien canal menant de l'embouchure de la rivière Grosse Mühl à travers le Mont rose au ruisseau Jeleni (du Cerf). Puis les travaux ont été suspendus pendant environ trente ans. La construction du canal a été terminée dans les années 1821-1823, après la mort de l'ingénieur Rosenauer. Sa longueur finale était de 51,9 kilomètres et il comprenait aussi un tunnel de navigation long de 419 mètres, percé dans les Monts Jeleni.

Environ 1200 hommes engagés pour la construction du canal travaillaient dans des conditions inimaginables des forêts vierges de la Sumava. Lorsque le canal a été mis en service, il offrait l'emploi à une trentaine de personnes qui mettaient le bois dans le canal, environ 300 personnes surveillaient la navigation du bois et 350 hommes étaient chargés de sortir le bois du canal. »

« Au cours de cent ans que durait l'âge d'or du canal de navigation Schwarzenberg, ce dernier transportait environ 8 millions de mètres cubes de bois de chauffage. C'est une très grande quantité. Pour votre imagination, ce bois remplisserait toute la place principale de Ceske Budejovice jusqu'à hauteur de 500 mètres. Le service du canal jusqu'à Vienne a été terminé en 1892. Pour transporter le bois, on a commencé à utiliser les chemins de fer, moins chers et plus rapides. La dernière navigation à Haslach en Autriche a eu lieu en 1916. En Tchéquie, la navigation du bois du canal à la rivière de la Vltava durait jusqu'en 1961. »

Dans les années soixante-dix, compte tenu de nouvelles technologies agricoles et du fait que le canal traversait la zone frontalière, il était assez endommagé et cela non seulement sur le côté tchèque mais aussi autrichien.

« Au début des années quatre-vingt-dix, les Forêts de la République tchèque et l'Administration du parc nationale ont entrepris une reconstruction d'envergure du canal qui, pratiquement, n'existait plus. Grâce à cette initiative, on a reconstruit tout le tunnel et le tronçon entre le Mont Jezova et les Monts Jeleni mesurant plus de 13 kilomètres. Paradoxalement, le tronçon autrichien du canal est beaucoup plus abîmé que le canal tchèque. En plus, sa reconstruction n'avance pas en Autriche, car la grande partie du territoire traversé par le canal est dans la propriété du couvent de Schlegel qui n'y voit aucune utilité. »

Dans la période de sa plus grande gloire, le canal employait beaucoup de jeunes hommes et femmes tchèques qui y travaillaient de 5h du matin à 19 h du soir. Parfois, au lieu d'aller dormir, ils passaient la nuit autour d'un feu de camp en jouant du violon ou de la cornemuse, instrument de musique typique pour cette région de Bohême du sud, et en chantant des chansons folkloriques.

Au début des années quatre-vingt-dix, le groupe de chants et de danses folkloriques, Libin-S de Prachatice, est venu avec l'idée de renouer avec cette tradition. Ainsi, des rencontres de groupes folkloriques de Bohême du sud, de la Haute-Autriche et de la Bavière se donnent rendez-vous chaque année en été sur la rive du Canal de navigation Schwarzenberg. A l'occasion de cette fête, les visiteurs peuvent retourner à la fin du 18e siècle et suivre la démonstration de la navigation du bois.

Voici encore une information pour les amateurs du vélo. Une piste cyclable allonge pratiquement tout le canal. A la fin des années quatre-vingts, deux postes frontière ont été ouverts dans cette région pour que les cyclistes puissent traverser tout le canal.

Auteur: Astrid Hofmanová
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