La Journée de la langue tchèque

„De Orthographia Bohemica“
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Salut à tous les tchécophiles de Radio Prague – Ahoj vám všem, milovníkům češtiny Radia Praha ! Ce mercredi 17 juin était une journée spéciale pour les amoureux de la langue tchèque. A Prague s’est tenue une conférence intitulée « La Journée de la langue tchèque » - « Den českého jazyka ». Exposés et débats portant sur neuf thèmes différents, comme par exemple l’intégration des mots étrangers au tchèque ou les mots que la langue tchèque a donnés au monde, l’évolution de la langue tchèque dans les traductions littéraires, la place du tchèque dans la profession d’écrivain ou encore les médias comme champ d’évolution linguistique, se sont succédés devant un nombreux public. Cette conférence était organisée par l’Institut de la langue tchèque de l’Académie des sciences de République tchèque, en coopération avec les Centres tchèques.

« C’est la préparation de l’année de la langue tchèque en 2017 et nous avons pensé que cela pourrait intéresser pas mal de monde. »

Directeur en charge de la stratégie et du développement des Centres tchèques, organisation fondée par le ministère tchèque des Affaires étrangères qui sert au développement culturel, éducatif, commercial et touristique de la République tchèque à l'étranger, Zdeněk Lyčka explique quel était l’objectif de cette première Journée de la langue tchèque. Parlé par un peu plus de 12 millions de personnes dans le monde, le tchèque peut être considéré comme une « petite langue ». C’est donc d’abord aux Tchèques eux-mêmes qu’il appartient de veiller à la protection de leur langue, comme l’explique Karel Oliva, directeur de l’Institut de la langue tchèque :

Karel Oliva,  photo: Alžběta Švarcová,  ČRo
« L’évolution s’accélère à tous les niveaux. Des mots étrangers sont empruntés et assimilés, mais, plus généralement, la structure morphologique et grammaticale du tchèque évolue aussi. Nous observons une tendance à la simplification de la langue. Vous savez, les Tchèques sont bien entendu plus ouverts au monde aujourd’hui qu’ils ne l’étaient dans un passé encore pas si éloigné et nous ne prétendons pas que tout ce qui est tchèque est mieux que ce qui se fait ailleurs. Mais nous sommes un petit pays et ne sommes pas très nombreux. Or, l’identité nationale est entretenue surtout à travers la langue. Je ne dirais pas que nous ressentons une menace, mais nous sommes conscients qu’il nous faut prendre soin de notre langue et veiller à son évolution pour entretenir notre identité culturelle. C’est une peur qu’ont la plupart des petits peuples, mais que les Français, les Allemands ou les anglophones ne connaissent pas. »

A la remarque selon laquelle les Français et les francophones connaissent ce sentiment et sont eux aussi préoccupés par la défense de leur langue, avec parfois une approche défensive critiquée dans le monde, Zdeněk Lyčka répond :

Zdeněk Lyčka,  photo: Archives de Radio Prague
« C’est différent. Le français est une grande langue, alors que le tchèque est une petite. La place du français dans le monde n’est plus ce qu’elle était et les Français ont peur que l’anglais devienne la langue parlée par tous. Je le comprends. Mais ce qui nous préoccupe plus nous, Tchèques, c’est l’évolution de notre petite langue, comment travailler avec elle. »

Et à en croire le directeur de l’Institut de la langue tchèque, il n’y a, pour l’instant, aucune raison de s’inquiéter outre mesure pour l’avenir de la langue de Karel Čapek, Bohumil Hrabal et Jaroslav Seifert :

« Pour les décennies à venir, non, je ne me fais pas de souci particulier. Si on se place dans un horizon plus lointain, d’un siècle ou deux, là, je suis incapable de vous répondre. Je ne peux pas prédire l’avenir. Le risque principal que je vois est celui qui a touché les langues amérindiennes, dont beaucoup ont disparu ou sont en voie de disparition. Lorsque nous serons tous morts, il n’y aura plus de langue tchèque non plus. Mais comme il n’y aura plus de gens de toute façon pour la parler, cela peut nous être égal pour l’instant… »

Mais le tchèque est aussi (un peu) parlé et étudié à l’étranger, et pas seulement par tous ceux qui ont émigré et ont quitté la Tchécoslovaquie aux heures les plus sombres de son histoire. A l’heure où certaines universités en France suppriment les cours de tchèque qu’elles proposaient il y a peu encore dans les départements de langues slaves, la promotion du tchèque hors des frontières de la République tchèque est aussi un enjeu, comme le confirme Zdeněk Lyčka :

« Dans le cadre de l’année de la langue tchèque en 2017, nous pouvons organiser par exemple des traductions d’œuvres littéraires d’auteurs tchèques à l’étranger, par exemple en France. Cette conférence aujourd’hui à Prague est plutôt destinée aux Tchèques. Mais nous n’oublions pas non plus les bohémistes et les Tchèques qui vivent à l’étranger. »