Ivan Hašek : « J’adorais regarder les matchs de hockey contre les Russes »

Ivan Hasek, photo: Tomas Adamec

Dernière partie de l’entretien avec Ivan Hašek, l’actuel président de la Fédération tchèque de football, dans le cadre du 20e anniversaire de la fin du régime communiste en Tchécoslovaquie. Dans les parties précédentes, l’ancien joueur et entraîneur de Strasbourg, capitaine de l’équipe nationale tchécoslovaque en 1989, nous avait raconté l’ambiance qui régnait dans le pays au moment de la révolution. Ivan Hašek avait également évoqué les conséquences que les changements politiques ont eues sur sa carrière. Une politique qui était déjà présente lorsqu’il portait le maillot de l’équipe nationale :

Ivan Hašek | Photo: Tomáš Adamec,  ČRo
« Il y a eu aussi quelques matchs de foot à l’époque contre les Russes qui étaient très, très chauds. Tout le pays était derrière nous et voulait que l’on gagne. Après ce qui s’est passé en 68, il y avait toujours quelque chose dans l’air lors de tous les matchs contre les Russes, peu importe si c’était du foot, du hockey ou un autre sport. La politique faisait partie du contexte de ces rencontres. Maintenant, c’est vrai qu’en hockey la rivalité entre Tchécoslovaques et Russes était encore plus importante, mais cela est dû au fait que c’étaient deux des meilleurs pays au monde. Tous les matchs étaient très chauds. Moi aussi j’adorais les regarder à la télé. Et on était tous très fiers en cas de victoire. »

-Au-delà du sport, votre carrière de joueur mais aussi d’entraîneur vous a permis de voyager, de vivre dans différents pays. Il n’y a pas eu seulement la France, mais aussi le Japon, où vous avez joué et entraîné, et les Emirats arabes unis, où vous entraîniez encore la saison dernière. Vous êtes désormais revenu au pays suite à votre élection au poste de président de la fédération. Avec ce recul, quel est le regard que vous portez sur l’évolution du pays ces vingt dernières années ? Est-ce une satisfaction par rapport aux attentes que vous pouviez avoir en 1989 ou alors plutôt un sentiment de déception ?

« Tout a évolué, et pas seulement en Tchéquie. Beaucoup de choses ont aussi changé en Europe. Mais je peux dire que je suis content de vivre en Tchéquie et que je suis fier d’être Tchèque. Même j’ai passé des années fantastiques en France, même si nous étions très heureux au Japon et même si la dernière année à Dubaï s’est vraiment bien passée, je suis ici chez moi, à la maison. Je suis content de pouvoir être avec toute ma famille, et c’est ici que je reviendrai toujours pour vivre. »

-La Coupe du monde en Italie en 1990 a été la dernière compétition, le dernier grand tournoi pour la Tchécoslovaquie, puisque, ensuite, vous ne vous êtes qualifiés ni pour l’Euro 92 ni pour le Mondial 94. Cette fois, pour la prochaine Coupe du monde en 2010, la Slovaquie s’est qualifiée aux dépens, entre autres, de la République tchèque. Au niveau du football, ne regrettez-vous donc pas que Tchèques et Slovaques n’évoluent plus ensemble ?

Coupe du monde,  Italie,  1990,  photo: CTK
« Bien sûr, sportivement, nous serions beaucoup plus forts si nous jouions ensemble. C’est évident. Mieux vaut être unis que séparés. Mais la politique, c’est autre chose… Les gens voulaient se séparer et les choses se sont passées comme elles devaient se passer. Aujourd’hui, il me faut donc féliciter la Slovaquie qui a mérité sa qualification pour la Coupe du monde. Elle a fait un beau parcours. Nous concernant, j’espère que l’on se qualifiera pour le prochain championnat d’Europe et que les Slovaques participeront avec nous à la phase finale. »

-N’êtes-vous pas un peu nostalgique de ces grands matchs entre le Slovan Bratislava et le Sparta Prague ou des longs déplacements à Košice ?

« Oui, c’est vrai que c’étaient des matchs intéressants, très chauds. Le niveau de la première division tchécoslovaque était plus élevé qu’il ne l’est aujourd’hui dans les deux pays. Il y avait quinze millions d’habitants. Et puis en Slovaquie, il n’y avait pas que le Slovan et Košice. Il y avait aussi des clubs comme Prešov ou Banská Bystrica, autant d’endroits en Slovaquie où il était très difficile pour nous, le Sparta, de gagner. Et puis les déplacements se faisaient en bus… C’était intéressant, mais je ne regrette pas pour autant. Maintenant, il y a deux championnats, un en Tchéquie et un autre en Slovaquie. Mais on ne sait jamais ce qui peut arriver dans cinq ou dix ans… »

-En tant que footballeur, êtes-vous heureux d’avoir passé une grande partie de votre carrière avant 1989, lorsque le championnat était encore tchécoslovaque, que les meilleurs joueurs restaient au pays et que le Sparta avait de ce fait une équipe compétitive en coupes d’Europe ?

« Vous savez, je pense que beaucoup de gens ont oublié comment nous vivions avant 1989. C’est du moins mon sentiment. Je ressens chez certains une forme de nostalgie, les gens disent que c’était mieux avant. Mais je peux vous dire que, personnellement, je suis très, très content que ce régime n’existe plus et que l’on puisse vivre en démocratie comme les autres pays en Europe. Au-delà du foot, c’est ce qui est le plus important. »