Rétrospective François Truffaut à Prague

François Truffaut, photo: Jac. de Nijs / Anefo / Nationaal Archief, CC BY-SA 3.0 Netherlands

Il y a trente ans, le 21 octobre 1984, mourrait François Truffaut à l’âge de 52 ans, réalisateur français majeur, emblématique de la Nouvelle Vague. A l’occasion de ce triste anniversaire, le public tchèque peut découvrir une rétrospective de son œuvre organisée conjointement par l’Institut français de Prague, les Archives nationales tchèques du film et le cinéma Ponrepo. Jusqu’au 20 octobre, les spectateurs ont l’opportunité de voir ou de revoir les œuvres du cinéaste, les plus appréciés et connus telles que Jules et Jim mais aussi d’autres plus confidentielles comme Les Deux Anglaises et le Continent. Au micro de Radio Prague, Sylvie Leray, programmatrice du Kino 35, le cinéma de l’Institut français, a présenté cet événement cinématographique.

François Truffaut,  photo: Jac. de Nijs / Anefo / Nationaal Archief,  CC BY-SA 3.0 Netherlands
Les Parisiens ne sont pas les seuls à pouvoir revisiter le cinéma de François Truffaut, à travers la rétrospective intégrale et l’exposition que lui consacre la Cinémathèque français. Les Pragois également ont l’occasion de se plonger dans une vaste cinématographie largement récompensée à travers le monde, de découvrir le destin d’Antoine Doinel, le double du réalisateur à l’écran, et de se délecter du jeu des prestigieux acteurs et actrices qu’il a filmés, Catherine Deneuve, Jean-Louis Trintignant, Jeanne Moreau, Fanny Ardant, Gérard Depardieu ou encore Isabelle Adjani. Et pour cela, ils peuvent remercier Sylvie Leray, qui revient sur la genèse du projet :

« On se rencontre assez régulièrement avec les programmateurs du cinéma Ponrepo et les gens des archives nationales tchèques, comme avec d’autres gens qui travaillent dans le cinéma. En discutant, tout simplement, on a commencé à parler de cette numérisation et restauration de certains films qu’opéreraient dans l’année les ayant-droits français de François Truffaut. »

Et la machine est lancée vers cette rétrospective, un événement parmi les plus coûteux à organiser précise Sylvie Leray…

« Après deux ou trois rencontres, l’idée a germé puisqu’on s’est aperçu que certains films étaient disponibles aux archives tchèques. L’Institut français à Paris a finalement renouvelé les droits sur quatre films, ce qui nous a permis de commander quatre films supplémentaires à coût réduit et donc de réduire le nombre de films commandés au distributeur français. »

'Jules et Jim'
Parmi la vingtaine de films réalisés par François Truffaut entre la fin des années 1950, quand il délaisse son activité de critique des Cahiers du Cinéma pour devenir auteur de cinéma, jusqu’à sa mort en 1984, il a fallu faire le choix d’une programmation cohérente. Sylvie Leray :

« Nous avons essayé de prendre évidemment les grands films connus du grand public. Je pense, et les premières réservations le montrent, qu’il y a toujours un intérêt pour les revoir ou pour les découvrir pour des jeunes. Des films comme Vivement dimanche ! ou Jules et Jim. »

Pour Vivement dimanche !, film qui conte la romance d’une secrétaire jouée par Fanny Ardant pour son patron Jean-Louis Trintignant sur fond d’enquête policière, comme pour Jules et Jim, l’histoire d’un amour à trois, un choix d’ordre technique s’est également imposé…

« Le public peut même aller dans les deux cinémas, ils ne verront pas la même copie. Par exemple pour Vivement dimanche ! s’ils vont voir à Ponrepo, ils verront la copie tchèque et à l’Institut français, nous avons tout de même fait venir une copie de Paris. Jules et Jim est numérisé à l’Institut français mais c’est une copie 35 mm, donc un format classique, qui sera diffusée à Ponrepo. Donc, nous avons essayé de jouer avec les différents supports disponibles de nos jours. »

Notamment connus pour ses longs-métrages associés à la Nouvelle Vague que sont Les Quatre Cents Coups ou Jules et Jim, François Truffaut a également signé des films moins connus du public, dont certains sont projetés, parfois pour la première fois en République tchèque, au Kino 35 ou au cinéma Ponrepo.

« Ensuite, nous avons complété par des films auprès du distributeur. On a choisi de commander des films un peu moins connus ou plus confidentiels comme Les Deux Anglaises et le Continent ou Baisers volés. Des films qu’à mon sens, le grand public connaît moins. »

Là encore, les spectateurs peuvent profiter d’expériences cinématographiques différentes…

« Là on a choisi un autre format qui n’est ni le numérique ni le format classique, un format qu’utilisait beaucoup la télévision, des copies Beta numériques. Comme cela, le public peut aussi naviguer. Ce genre d’événement est l’occasion de retrouver des formats classiques, de découvrir des films anciens mais sur copies numérisées. Le public aura le choix et peut aller voir plusieurs fois le même film ; cela ne sera pas tout à fait le même film. »

'Les Deux Anglaises et le Continent'
Sylvie Leray dispose d’une équipe en charge du sous-titrage, une charge de travail qui contribue à la complexité de l’organisation d’une rétrospective.

« Les quatre films qu’on a commandés au distributeur sont complètement inédits sur le territoire tchèque et ont fait l’objet d’un long travail de sous-titrage. Tous ces paramètres, le choix d’une copie, l’attente d’une numérisation et puis ensuite le sous-titrage, expliquent pourquoi un projet peut prendre jusqu’à un an de préparation. »

Un travail qui n’est pas vain, puisque tous pourront tirer profit de cette rétrospective, le public et les professionnels bien sûr mais également Sylvie Leray elle-même qui confesse un faible pour un film de François Truffaut en particulier :

« Je vois à travers les premières réservations que même le grand public à mon sens a envie de retrouver à la fois cette esthétique et certains comédiens. Je pense à Jean-Louis Trintignant, Fanny Ardant évidemment, Jeanne Moreau et bien d’autres. Je pense qu’à la fois le grand public et les professionnels peuvent y trouver quelques choses. On est dans un pays où il y a beaucoup de jeunes, grâce à l’école de la FAMU, qui se lancent dans les métiers du cinéma. Cela a un intérêt profond de revoir des films qui vont un peu moins vite qu’aujourd’hui. »

Et vous, que trouvez-vous dans les films de François Truffaut ?

'Vivement dimanche !'
« C’est toujours compliqué de demander à un programmateur pourquoi il a fait tel choix. Je pourrais dire deux choses. J’aime beaucoup certains films un petit peu lent par rapport à ce à quoi notre œil est habitué aujourd’hui. Personnellement, je suis très attachée à certaines musiques. Mais aussi je parlerais de deux choses. J’ai eu la chance de voir certains films, et notamment Vivement dimanche !, aux côtés de Jean-Louis Trintignant lorsqu’on l’avait invité il y a quelques années. Donc évidemment de façon personnelle, je suis toujours contente de revoir ce film et en plus je trouve que c’est un film qui est assez joyeux. Ce qui est peut-être un peu plus rare aujourd’hui. Il y a une certaine légèreté à la fois dans l’esthétique et dans le jeu qui me plaît beaucoup dans ce film. Et puis, pour ceux qui aiment Fanny Ardant, elle est filmée avec tant d’amour dans ce film que cela transparaît. Donc, j’ai un petit pincement de cœur pour Vivement dimanche !. »

La rétrospective de l’œuvre de François Truffaut est à découvrir au cinéma Ponrepo et au Kino 35 de l’Institut français de Prague jusqu’au 20 octobre.