Découvrir la Tchéquie en ballon

Photo: Michal Kubát
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Pilote de montgolfière, mais aussi photographe et même plongeur, Michal Kubát est un aventurier qui a vu de multiples contrées de l’Europe avec les yeux d’un oiseau. Nous l’avons accompagné lors d’un vol au-dessus du château de Konopiště, en Bohême centrale. Montez donc dans le ballon avec nous.

Photo: Denisa Tomanová
Michal Kubát a été émerveillé par les montgolfières dès son plus jeune âge. Mais il a fallu qu’il respire un grand coup avant de se lancer dans l’aventure des aéronefs il y a maintenant près de dix ans de cela. Le rêve qui était le sien lorsqu’il était petit garçon, s’est alors réalisé.

Mais ChadBalon, le nom de l’entreprise qu’il a montée, c’est avant tout une histoire de famille. Aux côtés de Michal Kubát en tant que principal pilote, ses proches se sont, eux aussi, lancés dans l’aventure : sa femme Petra, et leurs deux filles, Kristýna, pilote comme son père, et Michaela, créatrice du site Internet.

Un brin de poésie, d’aventure et de romantisme

Photo: Denisa Tomanová
La famille aventurière propose différents survols des plus beaux endroits du pays, comme l’explique Michal Kubát :

« Nous proposons l’ensemble du territoire tchèque. Nous avons deux ballons : le plus petit est conçu pour deux personnes et un pilote, tandis que le plus grand peut accueillir huit personnes. C’est avec ce grand ballon que nous survolons les localités les plus jolies comme le Paradis tchèque, Konopiště ou Karlštejn. Avec le petit ballon, on peut survoler presque n’importe quelle localité en République tchèque. »

Après une petite demi-heure d’installation, nous voilà partis en laissant derrière nous deux autres montgolfières prêtes à prendre leur envol. Si les passagers sont enthousiasmés par la vue surprenante qui s’offre à eux à 360 degrés, le pilote, lui, reste constamment concentré sur le contrôle de son engin. Le silence de l’instant n’est interrompu que par le grouillement des deux chauffeurs. En route, nous cueillons un peu de tilleul des plus hautes cimes, admirons la ville de Benešov et observons de petits marcassins suivant leurs parents sangliers à travers bois. Mais avant d’en arriver là, quelles sont les différentes conditions à remplir pour pouvoir survoler un lieu historique ou naturel ?

Photo: Denisa Tomanová
« Chaque pilote d’un ballon à air chaud se meut dans un espace qui suit son propre ordre. Il doit bien évidemment avoir passé tous les diplômes nécessaires, respecté tous les règlements et l’interdiction de pénétrer dans certains espaces aériens. Il est donc possible de survoler n’importe quel endroit, mais il faut parfois demander des autorisations. Quand on survole Prague par exemple, on contacte le Contrôle de la circulation aérienne de Prague-Ruzyně. Bien évidemment, ce n’est pas qu’une question d’autorisation. Vu que le ballon n’a ni volant, ni gouvernail, il faut aussi qu’il y ait de bonnes conditions de vol, c’est-à-dire la vitesse et le sens du vent. Et si le soleil est de la partie, cela devient tout simplement magnifique. »

Si les réactions des gens sont diverses lors de leur premier vol, Michal Kubát a réservé une petite surprise à tous les voyageurs présents dans la nacelle à l’atterrissage :

Photo: Denisa Tomanová
« On sent que les gens sont un peu méfiants au début, car ils ne savent pas vraiment à quoi s’attendre. Une fois dans les airs, l’ambiance est relativement silencieuse les dix premières minutes. Mais les gens se décontractent au fur et à mesure et profitent ensuite du vol au maximum. Après l’atterrissage, les voyageurs se soumettent à la cérémonie du baptême. Ils sont alors promus au rang aristocratique, sur la base d’une loi prononcée par Louis XVI qui n’a jamais été abolie. Notre cérémonie s’achève avec une coupe de champagne et la remise des diplômes. »

Premier vol des frères Montgolfier, une légende qui remonte à Louis XVI

Après un atterrissage sans difficulté dans un champ, chaque voyageur a reçu son certificat de « baptisé » sur lequel figurent à la fois son vrai nom et le nom de baptême qui comprend trois mots : le prénom, le titre et le lieu situé le plus près de l’atterrissage dont l’espace aérien devient alors la propriété de chaque personne ayant atterri au même endroit. Nous avons donc été baptisés au nom du vent, du feu, de l’eau et de la terre, et promus au rang de baron, baronne ou comtesse de Skrýšov, du nom du petit village d’une soixantaine d’habitants où nous avons atterri. Michal Kubát explique quelle est l’origine de cette tradition du baptême:

Photo: Denisa Tomanová
« Les frères Montgolfier se sont lancés dans l’aventure des ballons à air chaud en France en 1783. Leur succès s’est par la suite répandu sur tous les continents. Il existe néanmoins plusieurs versions liées à cette cérémonie du baptême. On ne peut pas dire avec précision comment cela s’est déroulé. Chaque pilote possède sa propre version, qui émane de certaines données historiques. L’histoire que nous racontons, nous, est celle d’un aristocrate et son valet qui ont participé au premier vol d’essai. Même s’il avait initialement prévu que les deux premiers hommes dans le panier seraient deux aristocrates, cela n’a pas été le cas. Donc, lorsque le maître et son valet ont atterri sains et saufs, le roi Louis XVI a élevé le servant roturier au rang d’aristocrate. Il l’a instruit sur ses droits, sur ses obligations, et il lui a attribué un terrain, celui où il avait atterri. Suite à cela, Louis XVI a édicté une loi selon laquelle toute personne voyageant en ballon pour la première fois devait être promu au rang d’aristocrate. »

Pour devenir pilote de montgolfière, un esprit d’aventurier ne suffit pas. Il convient aussi de suivre une formation de pilotage qui comprend des disciplines comme la météorologie, l’aérostatique du ballon, sa construction, sa navigation ou encore la réglementation de la circulation aérienne.

Le château de Konopiště,  photo: Denisa Tomanová
Attiré depuis toujours par les vols d’expédition à longue distance, Michal Kubát a survolé, avec sa femme Petra, le mont Sněžka, point culminant de la République tchèque, et il a été le premier à survoler les Hautes et Basses Tatras, chaînes de montagnes slovaques. Son expérience lui a ensuite permis de réaliser son rêve : survoler les Alpes, où, affirme-t-il, il a réalisé la petitesse de l’homme.

Même si les différents outils d’aide aux pilotes sont de plus en plus élaborés, Michal Kubát ajoute qu’il faut toujours garder un esprit clair et ne jamais sous-estimer la météo. Certains vols sont néanmoins restés gravés plus que d’autres dans sa mémoire, dont un en particulier :

Photo: Denisa Tomanová
« Il m’est arrivé un petit incident en hiver lors du tournage d’un documentaire sur l’Albanie. On avait planifié de survoler Tirana durant trois jours. La météo n’était pas très avenante. Il faisait beau, mais le vent était faible. Le troisième jour, il y avait un peu plus de vent et on a décidé de se lancer. Puis, au milieu du vol, au-dessus de Tirana, un vent contraire s’est mis à souffler. On s’est alors demandé où on pourrait atterrir, car Tirana est une ville avec des fils électriques dans tous les sens. On a aperçu un petit espace vert qui se dessinait sous nos pieds. Nous avons atterri sans trop de problèmes, mais il nous semblait bizarre d’être entourés de murs de deux mètres de haut. J’ai d’abord pensé que ça pouvait être un bâtiment militaire abandonné. Puis on a entendu au talkie-walkie : ‘Michal, tu sais où tu as atterri ? Tu as atterri dans un asile ! ». Pour nos accompagnateurs en voiture, c’était bien évidemment compliqué de rentrer dans l’établissement. Ce n’est que lorsque les employés de l’établissement ont vu la montgolfière dessinée sur la voiture qu’ils ont compris qu’il pouvait effectivement y avoir quelqu’un à l’intérieur. C’est ainsi que nous avons pu sortir. »

La montgolfière, une invention française devenue sport international

Chaque année a lieu le championnat de République tchèque de montgolfières. Sa vingtième édition se déroulera du 31 août au 4 septembre prochains, dans les environs des communes de Modrá et de Velehrad, à une soixantaine de kilomètres au sud-est de Brno. Michal Kubát participe régulièrement à ce championnat :

Photo: Michal Kubát
« Les organisateurs essaient bien évidemment de situer le championnat à une période de l’année où les conditions sont propices au vol. Plusieurs disciplines figurent au programme. On vole le matin ou le soir. Nous ne pouvons pas voler pendant la journée en raison des courants thermiques, qui sont très dangereux pour les montgolfières. Les ballons doivent être de retour sur terre dans les deux heures qui suivent le lever du soleil et ne peuvent s’envoler que dans les deux heures qui précèdent le coucher du soleil. Une trentaine d’équipes du monde entier participent à ce championnat, et les visiteurs ont la possibilité de contempler le monde du haut d’un ballon. »

Seuls quatre Tchèques font partie des cent meilleurs pilotes dans le monde. C’est pourquoi Michal Kubát est honoré de pouvoir prendre part à la compétition aux côtés des meilleurs lors du championnat de République tchèque. Michal Kubát a aussi évoqué la coupe Gordon Bennett, une des plus anciennes compétitions aéronautiques. Elle a été lancée en 1906 avant d’être interrompue en 1938. Il a fallu attendre 1983 avant qu’elle ne soit relancée :

« C’est une des compétitions les plus prestigieuses de ballons non pas à air chaud mais à gaz. Les participants peuvent donc passer plusieurs jours à l’intérieur et parcourir entre 1 500 et 2 500 kilomètres. »

Et quel conseil le chef de l’aéronef donnerait-il à tous ceux qui ont le vertige et auraient peur de monter dans la nacelle ?

« Le ballon, c’est tout à fait autre chose. Par exemple, à Prague, on sent ce léger vacillement en haut de la tour de Petřín. La tour se balance d’un côté à l’autre de vingt à trente centimètres. A l’inverse, le panier est solidement fixé au ballon, donc la sensation y est complètement différente. Voler en ballon est très sûr : on n’a pas enregistré le moindre accident mortel ces quarante dernières années. Il y a eu quelques petits accidents, mais personne n’est décédé. C’est encore plus sûr qu’en Boeing 737. »

Photo: Denisa Tomanová
Lundi, l’annonce du décès de seize personnes au Texas, en raison d’un incendie du panier, a néanmoins montré qu’il n’est possible de rien prévoir. Inversement, le Russe Fedor Konyoukhov, a battu, en onze jours et six heures, le record du tour du monde en montgolfière. Bien loin des cinq semaines de Jules Verne…

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