La visite de Miloš Zeman en Afghanistan bien vue par la presse

Miloš Zeman en Afghanistan, photo: ČTK

Les médias tchèques suivent régulièrement et avec un œil assez critique toutes les démarches du président de la République, Miloš Zeman, un an après son investiture. Une fois n’est pas coutume, les éditorialistes ont salué son voyage en Afghanistan en fin de semaine dernière. La situation dramatique en Ukraine figurant quotidiennement au cœur de l’intérêt des journaux, nous avons également retenu un article examinant les perspectives des relations commerciales entre l’Ukraine et la Tchéquie. Faut-il craindre une attaque terroriste à Sotchi ? Des réponses à cette question d’actualité ont été publiées dans l’hebdomadaire Respekt qui se penche, aussi, sur les possibilités de modernisation de la politique familiale en République tchèque.

Miloš Zeman en Afghanistan,  photo: ČTK
« Miloš Zeman a réussi en Afghanistan, car il a su se maîtriser ». C’est ce que titrait un des articles commentant la récente visite de deux jours du président de la République en Afghanistan, au cours de laquelle il a rendu visite aux soldats tchèques déployés dans la région dans le cadre de l’opération de l’ISAF et rencontré son homologue afghan Hamid Karzai. Sur le site aktualne.cz, Martin Fendrych note que Miloš Zeman se sentait visiblement bien dans sa peau, le casque et le gilet pare-balles ne semblant nullement le gêner :

« A Kaboul et à Bagram, le président s’est comporté comme on l’attend d’un chef de l’Etat. Après avoir joué de nombreux mauvais tours sur la scène locale, on a pu constater avec satisfaction que le président tchèque sait aussi se comporter comme il faut, même au niveau international... Avec cette visite en Afghanistan, Miloš Zeman a fêté de façon symbolique le premier anniversaire de son élection. Il s’est rendu dans un endroit dangeureux, car la situation en Afghanistan a plutôt tendance à se détériorer qu’à s’améliorer. Il mérite un double respect. Non seulement parce qu’il est le premier président tchèque à avoir effectué cette visite, mais aussi parce que, cette fois, il n’a fait aucune déclaration déplacée. »

Ce constat n’est pas une évidence. Pour le souligner, Martin Fendrych rappelle que, dans le passé, Miloš Zeman a souvent eu recours à des jeux de mots forts maladroits. Cette visite à Kaboul et à Bagram peut donc être considérée comme une réussite. En outre, elle constitue en quelque sorte un appel lancé à la nouvelle coalition gouvernementale, nommée ce mercredi, par lequel Zeman entend dire que la politique étrangère et l’armée sont un terrain qui est aussi le sien...

Dans l’édition de mardi du quotidien Lidové noviny, Petr Kamberský déplore le fait que, malgré les échos positifs, la mission de Miloš Zeman ait été perçue d’un œil ironique ou sceptique par une partie des commentaires locaux. Il remarque :

« Le voyage en Afghanistan, qui dure dix heures, a de quoi épuiser un homme plus jeune que Zeman, dont l’état de santé n’est pas très bon. Lorsque le commandant en chef de l’état-major de l’Armée tchèque décide de montrer aux femmes et aux hommes en Afghanistan qu’il apprécie leur travail, il s’agit d’un acte digne d’un chef d’Etat, d’un geste sympathique, juste et finalement ordinaire. Nous devrions nous réjouir de ce que le président se comporte comme un vrai président. »

Les perspectives de la coopération économique avec l’Ukraine

L’évolution de la situation en Ukraine est attentivement suivie par les médias tchèques, à travers reportages, analyses et observations. Le quotidien économique Hospodářské noviny s’est penché sur l’état actuel de la coopération économique entre la Tchéquie et l’Ukraine et ses perspectives à la lumière des événements en cours, tout en caractérisant l’Ukraine comme « un tigre économique dormant ». Dans un article consacré à ce sujet, nous avons pu lire :

« L’Ukraine est un des pays prioritaires pour les exportateurs tchèques, et ce bien que les exportations tchèques vers ce pays ne représentant que 1% à peine de leur totalité. Mais cela pourrait considérablement changer si le pays, secoué par des émeutes, se tournait vers l’Union européenne. Les experts estiment qu’une telle orientation profiterait fortement à l’économie tchèque et serait une occasion unique pour son commerce. »

L’électronique, les automobiles, les carrosseries et les équipements électrotechniques sont les principaux articles aujourd’hui exportés par les entreprises tchèques vers l’Ukraine. Les matières premières, et en premier lieu le fer, sont en revanche importées en Tchéquie. S’agissant des perspectives de renforcement des relations commerciales entre les deux pays, Hospodářské noviny donne la parole à l’économiste Ivan Pilip :

« Pour des raisons historiques et culturelles, les entreprises tchèques pourraient devenir, en cas d’orientation pro-européenne de l’Ukraine, un médiateur entre l’Ukraine et les pays de l’Union. Le fait que l’Ukraine actuellement ne soit pas encore économiquement forte s’avère être un autre avantage pour ces entreprises ».

Le journal constate qu’aujourd’hui, ce sont une bureaucratie exacerbée et le manque d’informations nécessaires qui freinent l’amélioration de la coopération entre les deux pays.

Faut-il craindre une attaque terroriste à Sotchi ?

Photo: ČT
La dernière édition de l’hebdomadaire Respekt a interrogé quatre experts de différents domaines pour savoir si la menace d’une attaque terroriste durant les Jeux olympiques d’hiver à Sotchi constituait à leurs yeux une réelle menace. Tandis que pour Pavel Vondra, ancien reporter de la Télévision tchèque en Russie, une telle menace paraît plus probable que lors des précédents JO, Petr Graclík, secrétaire général du Comité olympique tchèque, considère que les autorités russes vont garantir la sécurité de ces Jeux. Il explique pourquoi :

« Je ne peux pas imaginer que les organisateurs de cet événement sportif sous-estiment le moindre détail sécuritaire important. Je suis certain que les mesures prises à Sotchi seront plus que parfaites. La sécurité des spectateurs, des athlètes et des journalistes est une priorité absolue pour les organisateurs. »

Selon Tomáš Karásek, expert en questions internationales, il est impossible de répondre sérieusement à cette question. Il ajoute cependant :

« Le risque d’une attaque terroriste à Sotchi est assez grand, car la politique russe dans le Caucase ne cesse de générer une résistance qui se traduit par la volonté d’attaquer des objectifs civils... Les Jeux olympiques peuvent représenter un moment symbolique intéressant comme on a pu le voir en 1972 à Munich. Compte tenu de la forte concentration de gens et de l’inévitable chaos, les Jeux peuvent constituer une bonne cible. Mais tout cela ne veut pas dire qu’une attaque ou une tentative d’attentat vont effectivement se produire ».

Pour une politique familiale moderne

Michaela Marksová-Tominová,  photo: ČTK
Michaela Marksová-Tominová est un des noms figurant dans le nouveau cabinet de Bohuslav Sobotka auquel la presse locale voue désormais une attention particulière. Nommée ministre du Travail et des Affaires sociales, Michaela Marksová-Tominová est connue pour s’être consacrée aux questions des droits des femmes et de la politique familiale. Sa vocation lui a valu d’être étiquetée comme extrémiste ou féministe radicale par une partie des médias et du public. Sur le site respekt.cz, Silvie Lauder a réagi à ces préjugés et pris la défense de la nouvelle ministre en écrivant :

« En Tchéquie, nous avons l’habitude d’ignorer l’orientation qui est généralement suivie en Europe. Outre cette ignorance, nous avons tendance à ridiculiser les précurseurs d’une politique moderne. C’est ce qui arrive actuellement avec Michaela Marksová-Tominová. Pourtant, cette dernière ne représente pas une tendance extrême, mais un ‘mainstream’ politique européen modèle. Une telle approche, mise sur pied dans nombre de pays européens, s’appuie sur la conviction que l’Etat est censé garantir aux gens les meilleurs services possibles pour qu’ils puissent avoir des enfants, tout en mettant en valeur leur formation et leur carrière professionnelle. »

L’auteur de l’article souligne qu’une telle approche est avantageuse pour les deux parties, pour l’Etat comme pour la population. Et de noter que figurent au sein du cabinet Sobotka deux autres ministres, Marcel Chládek et Jiří Dienstbier, chargés respectivement de l’éducation et des droits de l’homme, qui partagent la même philosophie. « On ne peut s’attendre à des miracles, mais il y a un certain espoir que ce gouvernement commence à réaliser une politique familiale moderne », conclut-elle.