La bataille de Kolin de 1757 et la guerre de Sept jours de 1919

La bataille de Kolin

Deux batailles moins connues de l'histoire tchèque seront évoquées dans ces chapitres de l'histoire : celle de Kolin, qui s'inscrit dans le cadre de la guerre de Sept Ans à la fin du XVIIIe siècle, et celle de Sept jours, qui se déroula en 1919.

La bataille de Kolin
Ces derniers jours, 249 années se sont écoulées depuis l'une des batailles les plus sanglantes et les plus décisives de la guerre de Sept Ans, la bataille de Kolin. Deux monuments aux environs de cette ville de Bohême orientale située à 50 km de Prague rappellent l'affrontement à l'issue duquel l'Autriche remporta la victoire sur les troupes prussiennes, cette victoire étant qualifiée de renaissance de la monarchie habsbourgeoise.

La guerre de Sept Ans
Un bref rappel du contexte historique, tout d'abord : la guerre de Sept Ans, qui se déroula dans les années 1756 - 1763, est considérée comme le premier affrontement paneuropéen. Menée sur une grande partie du continent européen et sur mer, elle opposa l'Autriche, la France, la Russie, la Saxe, la Suède et l'Espagne à la Grande-Bretagne, la Prusse et le Hanovre. A l'origine, il y avait la volonté de l'Autriche de reprendre la Silésie et la rivalité coloniale franco-britannique qui a conduit à ce que la France et l'Autriche, dont la Bohême faisait partie intégrante, se retrouvent dans le même camp. Le 18 juin 1757, la Bohême fut envahie par Frédéric II le Grand, roi de Prusse, mais qui dut céder devant le feld-maréchal autrichien Léopold Daun et évacuer la Bohême. Cette perte de la Prusse marqua un tournant décisif dans le déroulement de la guerre de Sept Ans. Car les armées prussiennes s'apprêtaient à prendre d'assaut Prague et, dans une certaine mesure, Vienne était également en péril. Le feld-maréchal autrichien Daun partit aider la capitale du royaume de Bohême. Les deux armées s'affrontèrent près de Kolin. Frédéric II fut battu par le maréchal autrichien Daun.

La bataille au cours de laquelle le sort de la monarchie habsbourgeoise se décida marqua une renaissance de celle-ci, dit Ladislav Jouza, historien du musée de Kolin :

Ladislav Jouza
« Le feld-maréchal Daun réussit à prendre une position avantageuse près de Kolin où il attendait l'offensive prussienne. La Prusse sortit victorieuse d'une série de batailles précédant celle de Kolin. Daun remporta pourtant la victoire, quoique sanglante, en raison de sa position et d'une supériorité de ses armées comptant 50 000 soldats. Très reconnaissante de cette victoire, l'impératrice Marie-Thérèse fonda l'Ordre Marie-Thérèse devenu la distinction militaire suprême. »

En dépit de la défaite, la Prusse sut redresser la situation et la bataille de Kolin ne mena finalement pas à sa défaite totale. La guerre de Sept Ans prit fin en 1763, par deux traités, et l'impératrice Marie-Thérèse abandonna définitivement la Silésie.

Comme je vous l'ai dit en introduction, nous évoquerons encore une guerre relativement ignorée de l'histoire tchèque, la guerre dite de Sept jours, dans laquelle, par un concours de circonstances, il s'agissait également de la Silésie. C'est notre stagiaire Clément Duclos qui s'y est intéressé :

Le jeune Etat tchécoslovaque dut faire face, dès les premiers jours de son existence, à des contestations territoriales de la part de la Hongrie, revendiquant la majeure partie de la Slovaquie méridionale, mais aussi de la Pologne, souhaitant rattacher la région de Tesin (actuellement en Silésie, près d'Ostrava) au jeune Etat polonais. Si les revendications hongroises ont donné lieu à d'âpres combats en Slovaquie, la région de Tesin fut l'objet d'une courte guerre - éclair - d'une semaine. C'est de ce mini conflit que je voudrais parler aujourd'hui.

Le contexte historique de l'année 1919 est difficile, marqué par le dépècement de l'empire d'Autriche-Hongrie, et par l'affirmation des nationalismes tchécoslovaques, mais aussi hongrois et polonais. La région de Tesin (Tesinsko) était d'une importance capitale du fait de la présence de mines d'acier silésien, et du chemin de fer entre la Tchéquie et la Slovaquie, vital également pour la protection de la Slovaquie contre la Hongrie.

Soucieux de garantir la reconnaissance du territoire tchécoslovaque, Edvard Benes porta le problème à la connaissance de la conférence de la paix de Paris et les frontières de la Tchécoslovaquie se trouvèrent confirmées. Mais la Pologne ne pouvait les accepter, souhaitant conserver une région tant stratégique qu'historique, majoritairement peuplée de Polonais. Pour le 25 janvier 1920 elle annonça des élections dans la région de Tesin. Le 21, la Tchécoslovaquie demanda à la Pologne le retrait de son armée de la région de Tesin, ce que la Pologne refusa. La voie diplomatique se trouvant écartée, la guerre demeurait alors la seule solution, d'autant que les Alliés (France, Angleterre) mettaient du temps à réagir.

Le lieutenant-colonel Josef Snejdarek
La plupart des soldats et légionnaires tchécoslovaques, fraîchement rentrés d'Italie après la Seconde Guerre Mondiale, furent envoyés en Slovaquie pour défendre les frontières sud contre les attaques hongroises. Pourtant ils étaient également très attendus au nord en raison de leur expérience du front. Le lieutenant-colonel Snejdarek, ancien légionnaire ayant servi en France, mena les opérations du côté tchécoslovaque. En plus de régiments venus d'Olomouc et de Frystat, Snejdarek pouvait compter sur l'appui d'un groupe de volontaires locaux, la Garde Nationale. Les troupes polonaises étaient elles sous le commandement de Franciszek Ksawery Latinik. Snejdarek envoya à Latinik un ultimatum lui enjoignant de retirer ses troupes sous deux heures, ultimatum rejeté par l'armée polonaise. Le 23, peu après midi, Snejdarek lança ses troupes et en trois jours il libéra Ostrava, Bohumin et Tesin, grâce à l'appui de légionnaires venus du nord-ouest de la Slovaquie faisant reculer les Polonais au-delà de la Vistule.

Le lieutenant-colonel Snejdarek prépara une offensive afin de repousser les Polonais jusqu'à Skoczow et d'assurer le contrôle tchécoslovaque sur la majeure partie de la région de Tesin. Il comptait par ailleurs sur la morosité de l'armée polonaise, démoralisée par les succès tchécoslovaques. Mais les Alliés firent pression sur le gouvernement tchécoslovaque, qui dut demander à Snejdarek de signer un armistice avec la Pologne, mettant fin à un conflit pourtant à l'avantage de la Tchécoslovaquie. Un accord fut signé le 3 février à Paris, particulièrement défavorable pour la Tchécoslovaquie puisqu'il laissait en dehors du territoire tchécoslovaque un tronçon du chemin de fer Bohumin - Jablunkov, d'importance capitale pour Prague. Mais la Tchécoslovaquie devait avant tout se concentrer sur un danger bien plus grave, à savoir l'agression irrédentiste hongroise en Slovaquie méridionale. A l'issue du conflit, la ville de Tesin fut partagée en deux entités, l'une polonaise (Cieszyn) et l'autre, tchèque (Cesky Tesin).

Les pertes occasionnées par ce « mini conflit » de sept jours furent modestes : 44 morts et 121 blessés. A Orlov, un monument rappelle l'acte de bravoure des soldats tchécoslovaques tombés pour la défense de leur pays.

Auteurs: Jaroslava Gissübelová , Clément Duclos
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