Un souvenir laissé à Prague par l'écrivain Ahmadou Kourouma

L'écrivain ivoirien de renommée internationale, Ahmadou Kourouma, n'est plus. L'écrivain considéré comme éveilleur du peuple ivoirien et conscience de tout le continent africain, est mort le 11 décembre à Lyon, à l'âge de 76 ans. Et pourtant, encore au printemps de cette année, lorsque ce romancier original est venu à Prague pour la foire Le monde du livre, il semblait être en pleine forme, il resplendissait d'énergie et d'humour. Il était content de la longue file de ses lecteurs qui lui demandaient son autographe. Il a présenté à Prague la traduction tchèque de son livre "Allah n'est pas obligé" qui venait d'être publié par la maison d'édition Mlada fronta. A cette occasion Vaclav Richter lui a posé quelques questions.

Votre dernier roman s'appelle "Allah n'est pas obligé". C'est un livre qui évoque les guerres tribales en Afrique. Dans quelle mesure un livre comme le vôtre peut atténuer les tensions où les adversités entre les tribus en Afrique?

"Oui, on peut atténuer ces tensions en évoquant, en écrivant, en disant les choses qui se passent. Les gens vivent cela. Mais quand on le présente dans un livre, cela permet aux gens de réfléchir, de voir leur bêtise. Parce que quand c'est écrit, on voit ce qui est d'exagéré et de sot dans ces conflits."

Quels sont aujourd'hui les maux africains les plus graves?

"Ce sont les pays qui ont vécu la Guerre froide. Après la Guerre froide, c'était le Mur de Berlin qui est tombé. On jugeait qu'il fallait organiser des conférences nationales dans tous les pays africains. Il y a des pays où ces conférences n'ont pas eu lieu. Les gens sont en train de se rechercher pour obtenir la démocratie, et c'est donc la recherche de la démocratie qui est notre souci le plus important."

A quoi attribuez-vous le succès de vos livres?

(Rire) "Vous me posez une question difficile. Je crois qu'il est impossible de le savoir. Si l'on savait ce qui fait le succès on l'aurait appliqué. Mais ce qui est certain c'est que je vois des problèmes réels, je vois les problèmes de chez moi. Je les présente sans fard, je les présente dans la langue de chez nous, je crois que c'est peut-être cela. Mais il m'est impossible de savoir ce qui fait le succès."

Pourquoi les Européens devraient-ils connaître la littérature africaine?

Les Européens devraient connaître la littérature africaine, parce qu'ils devraient connaître l'Afrique. C'est un continent que les Européens ont colonisé. Ils ont provoqué les désordres de là-bas et ils voient maintenant les conséquences de ce qu'ils ont fait.

Que peut donner ou doit donner la civilisation occidentale à l'Afrique?

"La civilisation occidentale devrait donner à l'Afrique d'abord les connaissances techniques et elle devrait s'ouvrir et permettre aux Africains de connaître l'Occident aussi."