Un manuscrit médiéval de Kutná Hora acheté aux enchères à Londres

David Rath, photo: Milena Štráfeldová

La région de Bohême centrale a fait, mardi, l’acquisition d’une miniature médiévale représentant le travail dans les mines d’argent de Kutná Hora.

C’est une bande-dessinée avant l’heure. Sur le parchemin extrait d’un incunable du XVe siècle sont reproduits avec minutie tous les travaux liés à l’extraction de l’argent dans les mines de Kutná Hora, ville de Bohême centrale située à soixante-dix kilomètres à l’est de Prague. Des petites scènes touchantes du quotidien minier, qui révèlent jusqu’à des détails du métier comme l’absence de poches dans les costumes des miniers pour éviter le vol ou la Cour des Italiens qui existe encore aujourd’hui. Au Moyen Age, Kutná Hora est une ville

David Rath,  photo: Milena Štráfeldová
riche, une ville sans laquelle le cœur du royaume, Prague, ne pourrait pas vivre. Le directeur de la galerie de Kutná Hora, Jan Třeštík, se félicite donc de l’acquisition de cette rareté :

« Je suis content que nous ayons pu l’acheter, c’est un investissement. C’est plus qu’un geste, plus qu’un événement où un objet rare et précieux revient en République tchèque, plus qu’un événement pour la galerie ou pour la région : c’est quelque chose qui a une valeur nationale, donc je suis vraiment content. »

Le très médiatique président du conseil régional, David Rath, souvent aussi objet de controverse, est allé en personne à Sotheby’s à Londres participer à la vente aux enchères. Résultat, le parchemin va coûter à la région de Bohême centrale la bagatelle de 670 000 euros. Un prix fort à payer en temps de crise qui a suscité des critiques, tout comme le fait que la vente et la présence de David Rath à Londres aient été ébruitées dès mardi. On écoute l’historien de l’art Jiří Fajt :

« Normalement ce type de vente se déroule dans des conditions secrètes. Les sociétés de ventes aux enchères sont des organisations professionnelles de profit dont le but n’est pas seulement de vendre des œuvres, mais de les vendre le plus cher possible. Toute médiatisation autour d’une œuvre, et surtout quand sont impliquées des insitutions publiques, peut faire augmenter très vite un prix qui sans cette médiatisation aurait pu être bien plus bas. »

Mais pour David Rath, l’achat est un bon investissement, la miniature une occasion à ne pas laisser passer :

« Ce sont des choses qui ne sont pas en vente tous les jours. C’est une rareté mondiale. La vente aux enchères s’est déroulée à Londres et a suscité un intérêt énorme du monde entier. C’est le genre de choses qu’il faut acheter quand elles sont disponibles. »

Jan Třeštík et David Rath,  photo: Milena Štráfeldová
L’original ne pourra malheureusement être vu que par quelques happy few : si la galerie entend l’exposer, ce ne pourra être que sous certaines conditions. On écoute l’historien de l’art Jiří Fajt :

« Il s’agit de peinture sur parchemin. C’est un matériau extrêmement sensible. Il est impossible de l’exposer sur la longue durée, en tout cas pas plus que trois mois. Ensuite, il doit être conservé dans la pénombre et dans un environnement climatique contrôlé. »

Des détails d’exposition que Jan Třeštík, le directeur de la galerie de Kutná Hora, entend régler dès que le manuscrit sera de retour en République tchèque. En tout cas, il espère au moins pouvoir la présenter au public avant Noël.

Ce n’est pas la première fois que la République tchèque fait l’acquisition d’un important manuscrit médiéval qui suscite autant d’intérêt : en 2005, la Galerie nationale avait acheté un fragment de la traduction latine de la célèbre Chronique de Dalimil.