Tomáš Halík, « prix Nobel de la religion »

Tomáš Halík, photo: Jiří Hošek, ČRo

Les médias tchèques évoquent ce qui serait l’équivalent du prix Nobel dans le domaine religieux. Même si cette comparaison est sans doute un poil exagérée, cela n’enlève rien au fait que c’est un prix prestigieux qui a été décerné à Tomáš Halík la semaine dernière. Le prêtre catholique et théologien tchèque s’est vu décerner le prix Templeton, récompensant « le progrès de la recherche dans le domaine des réalités spirituelles ». L'organisation nord-américaine de la Fondation John Templeton a expliqué que Tomáš Halík a été mis à l’honneur pour s’être battu pour la liberté de la religion sous l’occupation soviétique.

Tomáš Halík,  photo: Jiří Hošek,  ČRo
En République tchèque, pays réputé pour être l’un des plus athées en Europe, Tomáš Halík est l’un des rares prêtres à remplir les églises. A 65 ans, cet ancien conseiller du président Václav Havel, qui est aussi professeur de philosophie et de sociologie, commence à être un habitué des récompenses. En plus de succéder au dalaï-lama et à l’archevêque anglican sud-africain Desmond Tutu sur la liste des lauréats du prix Templeton, Tomáš Halík s’était ainsi déjà vu attribuer en 2011 le Prix du meilleur livre théologique européen pour son ouvrage intitulé Vzdáleným nablízku (Patience with God).

Cette fois, plus que pour ses talents littéraires, c’est pour son engagement sous le régime communiste que le prêtre tchèque a été distingué par la Fondation John Templeton. Il a expliqué comment il accueillait l’honneur qui lui était fait à travers ce prix :

« Je souhaiterais le considérer comme une reconnaissance de la culture spirituelle de notre pays, de laquelle Václav Havel fait partie, mais aussi Jan Patočka, qui était mon professeur. Et le hasard veut que ce prix me soit remis le jour de l’anniversaire de sa mort. Jan Patočka est décédé après avoir été interrogé pendant douze heures par la police secrète, il était de facto un martyr de la vérité et aussi mon grand maître spirituel et mon premier exemple. Par ailleurs, autre symbole fort pour moi, ce jour marque également le premier anniversaire de l’élection du pape François, quelqu’un que j’aime beaucoup. »

Et si sa lutte en faveur de la liberté, et pas seulement spirituelle, a été mis en avant, celui-ci Tomáš Halík, condamné en tant qu’ennemi du régime en 1972, a préféré évoquer l’actualité plutôt que le passé lors de la remise du prix :

Tomáš Halík,  photo: ČTK
« J’ai conscience que ma voix sera désormais plus entendue dans le monde et que ce prix donne un certain poids à mes paroles. Bien sûr, c’est une grande responsabilité. Mais cela fait maintenant déjà trois jours que je réponds aux questions des médias du monde entier, et à chaque fois je rappelle le besoin que le monde libre n’ignore pas la violation des droits de l’homme et des libertés fondamentales en Ukraine. Je pense aussi que c’est un appel à l’Union européenne pour que celle-ci soit réellement unie et forte. Et ce n’est pas par hasard que je le souligne ici en Grande-Bretagne. »

Après avoir risqué l'emprisonnement sous la période communiste au nom de la liberté de culte, Tomáš Halík, discipline de la tolérance et de la compréhension religieuses, est depuis devenu un médiateur majeur du dialogue entre les différentes confessions et les non-croyants. Et le prix Templeton, qui honore une personne vivante ayant apporté des contributions exceptionnelles pour affirmer la dimension spirituelle de la vie et s’accompagne d’un chèque de 1,3 million d’euros, confirme que la teneur universelle de son message dépasse désormais les frontières de la seule République tchèque.