Semyon Bychkov : « L’Orchestre philharmonique tchèque est un trésor »

Semyon Bychkov, photo: Česká filharmonie

L’Orchestre philharmonique tchèque sera dirigé pour les cinq ans à venir par Semyon Bychkov. Le chef d’orchestre américain d’origine russe, qui succède à Jiří Bělohlávek, décédé en mai dernier, a déjà collaboré avec ce prestigieux ensemble qui vient d’entamer sa 122e saison en tant que chef invité et directeur artistique du projet Tchaïkovski, un projet qui consiste en l’enregistrement de l’intégralité de l’œuvre symphonique du compositeur russe Piotr Ilitch Tchaïkovski. Marié à la pianiste française Marielle Labèque, Semyon Bychkov, qui a déjà dirigé de grands orchestres du monde entier, présente, dans les grandes lignes et en français, quel sera l’avenir de l’orchestre sous sa baguette :

Semyon Bychkov,  photo: Česká filharmonie
« Cet orchestre est un vrai trésor d’une tradition extraordinaire et d’un présent important. Il n’existe pas une seule personne dans le monde qui parlerait de l’Orchestre philharmonique tchèque, ou de manière plus générale de la ville de Prague et de la République tchèque, sans avoir les yeux illuminés et sans être impressionné par la beauté de cette ville, de cet orchestre, de ce pays qui a tant donné au monde. Si j’étais un violoniste, mon rêve serait de jouer avec un stradivarius. Il existe très peu de stradivarius aujourd’hui, ainsi que très peu d’artistes qui ont le privilège de jouer de cet instrument. L’Orchestre philharmonique tchèque est un orchestre que nous pouvons comparer à un stradivarius. »

Continuerez-vous à développer avec l’Orchestre philharmonique tchèque la ligne dramaturgique adoptée par votre prédécesseur, Jiří Bělohlávek, ou voulez-vous y apporter quelque chose de fondamentalement nouveau ?

« Je ne suis pas là pour faire des nouveautés. Il est inévitable que chaque artiste soit une entité entièrement différente et authentique. Mais en même temps, il y a certaines choses qui créent une liaison entre les musiciens. Cette liaison est une base de l’ADN de l’institution. Jiří Bělohlávek a hérité d’un orchestre qui avait été dirigé tout d’abord par Antonín Dvořák, puis par les chefs d’orchestre Rafael Kubelík, Václav Talich, Karel Ančerl ou Václav Neumann… Moi, je suis donc un héritier de Jiří Bělohlávek et de ses prédécesseurs. Cet ADN est forcément quelque chose qui doit continuer inévitablement. C’est une richesse qui naît avec ces différentes personnalités. »

Quelles seront vos priorités en matière de répertoire ?

« Je crois que le répertoire de cet orchestre, et de tous les orchestres, doit être extrêmement varié. L’Orchestre philharmonique tchèque est un héritier d’une tradition musicale extraordinaire, d’un grand répertoire de la musique tchèque. La musique est née dans ce pays. Il est donc tout à fait naturel que l’orchestre doit protéger et de défendre cette tradition et la musique tchèque. En même temps, chaque musicien a toujours envie de sortir de son propre pays et de vivre la musique des autres. Il est donc tout à fait naturel que la programmation de l’orchestre soit assez variée pour permettre à l’orchestre de développer son visage. De plus, vous avez un public et chaque personne peut avoir un goût différent. Quelqu’un a par exemple envie d’écouter Stravinsky et l’autre ne peut pas vivre sans Mozart. Il faut donc que chacun puisse se retrouver dans ce que nous faisons, y compris la musique contemporaine. Les gens n’arrêtent pas de créer, nous devons donc aussi reproduire la musique contemporaine. »

Allez-vous également présenter des créations mondiales des auteurs tchèques ?

L§Orchestre philharmonique tchèque,  photo: Česká filharmonie
« Tout à fait. C’est parmi les rêves partagés par l’équipe de l’orchestre. »

Jakub Hrůša et Tomáš Netopil seront les deux principaux chefs d’orchestre invités. Comment vous entendez-vous avec eux ?

« Je m’entends extrêmement bien avec eux, naturellement ! Je suis content que deux chefs d’orchestre tchèques, qui ont déjà des relations étroites avec cet orchestre, ont accepté de se joindre à moi pour partager une vision qui sera collective mais qui permettra aussi à chacun d’entre eux de réaliser leurs propres rêves qui vont enrichir l’histoire de cet orchestre. »

L’Orchestre philharmonique tchèque jouit d’une réputation internationale de plus en plus importante. Comment prévoyez-vous d’élargir ses activités à l’étranger ?

« Je crois (et je le vois) que toutes les portes dans le monde entier s’ouvrent à cet orchestre. Dans les mois à venir, nous pourrons déjà annoncer le programme de la saison prochain qui comprendra plusieurs tournées extrêmement importantes. Il y en a d’autres déjà qui sont prévues pas seulement pour la saison prochaine mais aussi pour les années à venir. »

Avez-vous d’autres plans après le projet Tchaïkovski ?

« (rires) Je le sais mais je ne peux pour l’instant pas vous le dire. Il faut d’abord terminer le projet en cours avant d’annoncer ce qui va suivre. Il y aura des projets très importants pour nous tous et je crois que vous ne serez pas déçus. »