Rudolf Vejrych, peintre oublié de l’entre-deux-guerres

Photo: Martin Salajka

La Galerie Nová síň, située rue Voršilská, dans le centre historique de Prague, accueille jusqu’au 10 mars une exposition des peintures de Rudolf Vejrych, peintre injustement oublié, qui s’intéressait aux natures mortes, aux paysages et à la figure féminine. Organisée à l’occasion des 130 ans de la naissance de Rudolf Vejrych, l’exposition a été préparée par la famille de l’artiste.

Photo: Martin Salajka
Rudolf Vejrych est né en 1882 à Podmokly nad Labem, dans une famille modeste, mais aux enfants doués. Son frère Karel était un excellent pianiste, sa talentueuse sœur Ela a épousé le peintre Max Švabinský et Rudolf était membre du groupe artistique nommé Mánes et excellent professeur de peinture.

Rudolf Vejrych entame sa carrière de peintre au début du XXème siècle, à l’époque des grands changements dans le domaine des Beaux arts, caractérisée par l’émergence de nouveaux styles et mouvements. La Première république tchécoslovaque avait un haut niveau culturel et artistique et c’est peut être une des raisons de la méconnaissance actuelle de l’œuvre de Rudolf Vejrych. Il reste à tort dans l’ombre de son beau-frère plus célèbre, Max Švabinský, qui était son modèle artistique au début, mais la source de son malheur personnel plus tard – Švabinský tombera en effet amoureux de la femme de Vejrych, Anna, sonnant finalement le glas des deux mariages.

Kozlov,  photo: Archives de Radio Prague
Les premières œuvres de Vejrych laissent entrevoir sa famille, le paysage aux alentours de Kozlov, un lieu auquel il était très attaché, des portrait et figures féminines. Le portraitiste a eu la possibilité d’étudier la peinture française de près à plusieurs reprises grâce à la bourse qui lui a été accordée par l’Ecole tchèque des Beaux Arts. Il a trouvé son inspiration chez les peintres intimistes français Bonnard et Vuillard. Il est également attiré par l’art roman, une influence qu’explique l’historienne de l’art, Jana Orlíková :

Jana Orlíková  (à gauche),  photo: Martin Salajka
« Ce peintre était dans une recherche intensive. Il se plongeait totalement dans ce qu’il avait découvert tant et si bien, que dans chaque période de sa création, il était complètement différent. En étant attentif, on peut découvrir un point commun et c’est la certitude, que la beauté vaut la peine d’être représentée. Comprendre une œuvre d’art comme équivalent de son sens est typiquement français et italien. Un message ne doit pas nécessairement être ajouté, il suffit de représenter la beauté pure qui apaise le chagrin. »

Photo: Martin Salajka
Un grand nombre de peintures et de dessins souligne la beauté et le charme d’Anna Procházková, le grand amour et la muse inspiratrice de Rudolf Vejrych. La naissance de leur fille Zuzanka ouvre une nouvelle période de création, le motif de l’enfant apparaît. La guerre interrompt sa production, le divorce est encore plus dévastateur. Vejrych revient aux peintures des paysages et des motifs sociaux pour couronner son œuvre par le retour aux nus féminins modernes, qui mélangent la chasteté du corps féminin à l’arrière-plan joyeux et multicolore de la peinture. Ces tableaux rayonnants prennent à juste titre une place centrale dans cette exposition attractive et touchante. Zuzana Nováková-Ševčíková a gardé quelques souvenirs émouvants de son grand-père :

Zuzana Nováková-Ševčíková,  photo: Martin Salajka
« J’ai quelques souvenirs personnels de lui, il était très gentil, calme, mais il savait se fâcher aussi. Il était hors de lui quand nous ne le comprenions pas. Il souriait toujours, mais je ne l’ai jamais vu rire. Mais sa deuxième femme Božena riait souvent comme une folle. »

L’exposition pragoise présente tous les talents de Rudolf Vejrych et laisse entrevoir l’esprit de l’artiste. Elle est unique par sa taille et par la présence des peintures provenant de collections privées, habituellement inaccessibles au public.