Refus des quotas de réfugiés : « Nous ne violons aucune règle »

Photo: World Bank Photo Collection via Foter.com / CC BY-NC-ND

Le gouvernement tchèque a envoyé à la Commission européenne une lettre expliquant son refus des quotas de répartition de migrants depuis l’Italie et la Grèce. Prague avait jusqu’à ce jeudi pour envoyer ses justifications, liées à la procédure d’infraction lancée contre la République tchèque, la Pologne et la Hongrie à la mi-juin, et qui peut aboutir, si aucune solution n’est trouvée, à une saisie de la Cour de justice européenne, à Luxembourg, et à des sanctions financières.

Milan Chovanec, ,  photo: Filip Jandourek,  ČRo
D’après le ministre de l’Intérieur, Milan Chovanec, la conclusion du texte est catégorique : la République tchèque ne viole pas la législation européenne. Le social-démocrate explique les arguments présentés :

« En 2015, quand la majorité des Etats membres ont voté en faveur du système de répartition par quotas des réfugiés, nous avons demandé à la Commission de nous fournir davantage d’explications. Jusqu’alors, nous n’avons reçu aucune réponse. Nous avons par exemple demandé comment la Commission européenne voulait assurer que les réfugiés relocalisés restent sur le territoire d’un Etat dans lequel ils ne veulent pas vivre. Par exemple, la Lituanie et la Lettonie ont relocalisé un grand nombre de migrants, mais 70 % de ces personnes ne sont plus là. Elles sont quelque part en Europe, personne ne sait où exactement. Le système est donc dysfonctionnel. Sinon, nous essayons de montrer à la Commission européenne, à l’aide de différentes lettres, que nous avons négocié aussi bien avec les Grecs qu’avec les Italiens et qu’ils ne nous ont pas permis de soumettre les candidats proposés à la relocalisation à un contrôle de sécurité complexe. L’Italie a même rompu la communication. »

Selon le projet adopté en septembre 2015, la Tchéquie était censée accueillir 2600 personnes dans le cadre du système de relocation par quotas des réfugiés arrivés en Grèce et en Italie. Pour l’heure, le pays n’a été capable d’en faire venir que douze. De plus, le gouvernement a annoncé, en juin dernier, qu’il n’accueillerait plus aucun demandeur d’asile. A en croire Milan Chovanec, artisan de la politique de fermeté tchèque à l’égard des migrants, la République tchèque se veut solidaire et ne refuse pas totalement l’idée de l’accueil d’un certain nombre de migrants. Pour le ministre social-démocrate, les torts seraient à chercher du côté de l’Italie et de la Grèce :

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« Aucun pays de l’UE ne remplit les quotas. La Commission européenne a tout simplement décidé que les pays qui avaient accueilli moins de 1 % du nombre total des personnes prévues sont les coupables, tandis que ceux qui avaient accueilli 2 % de ces personnes ne le sont pas. Cela est absurde et il est nécessaire de protester. Nous ne violons aucune règle. Au contraire, nous sommes l’un des pays les plus actifs quant au nombre de policiers envoyés aux frontières de l’UE et de l’espace Schengen, ainsi qu’au regard de l’aide financière. Nous déclarons clairement que nous sommes prêts à collaborer avec nos partenaires des autres pays à construire de grands centres de rétention pour les réfugiés car la République tchèque possède de nombreuses expériences dans ce domaine. Nous sommes prêts à nous engager dans des projets utiles. Mais si le contrôle préalable de sécurité aux candidats à la relocalisation en Italie et en Grèce consiste en une seule et unique question, à savoir s’ils sont des terroristes ou non, nous n’accepterons pas ces personnes-là sur notre territoire. »

A la question de savoir si cette position tchèque n’est pas illégitime étant donné que les engagements sur l’accueil de réfugiés sont issus d’un vote démocratique et ont été adoptés par une majorité qualifiée contre la République tchèque, Milan Chovanec répond :

« La situation se répète toujours : nous prenons une position et c’est seulement un an plus tard que les autres Etat découvrent que les Tchèques avaient raison. Ils commenceront à s’en rendre compte petit à petit bien qu’ils ne l’avoueront jamais. Mais ils réutiliseront les mêmes arguments. Je serais très ravi de voir que notre résistance vigoureuse pousse certains à réfléchir afin que nous commencions à chercher une vraie solution au problème des migrations. Aujourd’hui, nous faisons face à un grand problème, celui des migrations depuis la Libye vers l’Italie. Nous ne sommes pas capables d’arrêter cet afflux de migrants économiques puisque nous n’avons pas la possibilité de les renvoyer vers la Libye. Bien que notre refus des quotas n’ait pas été politiquement tout à fait correct, il s’agit d’une décision de bon sens. »

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Dans une lettre publiée jeudi dernier et adressée à son homologue italien, Marco Minniti, Milan Chovanec a d’ailleurs proposé de demander au gouvernement à débloquer 800 000 euros afin de soutenir les activités de l’UE en Libye et, par conséquent, de faire baisser le nombre de migrants se dirigeant vers l’Italie. Le ministre tchèque de l’Intérieur s’est également dit prêt à envoyer sur place davantage de policiers qui pourraient aider leurs collègues italiens à expulser les réfugiés vers le pays d’origine.