Plzeň : des ressortissants roumains victimes « d’esclavagisme moderne »

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C’est une affaire qui en a surpris plus d’un, la presse parlant, et c’est plutôt exceptionnel dans les médias nationaux, « d’esclavagisme moderne » en République tchèque : quelque 200 Roumains, recrutés par une agence de l’emploi tchèque, viennent de passer trois mois à Plzeň, dans l’ouest du pays, dans des conditions de travail et de logement indignes. Suite à une bagarre entre les travailleurs et leurs employeurs, survenue vendredi, les Roumains se sont adressés à la police, avec une demande de rapatriement.

Petra Kutálková
Selon Petra Kutálková de l’organisation La Strada, active dans la prévention de la traite humaine, la réaction des autorités tchèques a été prompte :

« Ce groupe de personnes, ayant travaillé dans une entreprise d’horticulture locale, est entré en contact direct avec la police vendredi soir. Nous sommes arrivés à Plzeň le lendemain, et dans la soirée ils étaient transportés en bus en Roumanie. D’après nos expériences, les victimes étrangères de l’exploitation ne s’adressent pas directement à la police ou alors la réaction de celle-ci n’est pas suffisamment rapide. En plus, la barrière linguistique complique les choses. Dans ce cas-là aussi, il y a eu un délai, avant l’arrivée des interprètes. Heureusement, certains Roumains ont pu se faire comprendre en russe et en anglais, ce que leur a permis de communiquer avec le représentant de notre organisation et avec la police. »

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« Mes collègues et moi, nous n’avons jamais vu des choses pareilles », a dit Markéta Schröpferová de la charité de Plzeň qui a distribué des sandwichs et des boissons aux Roumains, affamés et sans argent, avant qu’ils ne montent à bord des bus.

« Ils nous ont promis une certaine rémunération, mais finalement, on recevait 1 euro par heure. Pendant deux mois, on n’était pas payés du tout. » « Les conditions dans lesquelles nous vivions étaient affreuses : une douche pour trente personnes et souvent sans eau chaude. » « Nous avons dû faire face aux menaces des agents de sécurité. Ils ont même agressé un d’entre nous. »

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Voilà comment ces travailleurs roumains, hommes et femmes âgés de 18 à 60 ans, ont décrit leur situation à la télévision. A Plzeň, ils ont fabriqué des décorations pour l’entreprise Flora. Elle affirme avoir rempli toutes ses obligations financières envers l’agence qui recrute, pour elle, la main d’œuvre. L’enquête policière dans cette affaire est en cours : quatre personnes, un Tchèque et trois étrangers, ont été accusés, entre autres, d’enfreinte à la liberté personnelle et de coups et blessures. Alors que les 200 Roumains ont déjà rejoint leurs domiciles dans la ville d’Arad, d’autres étrangers restent dans le foyer, situé dans un village près de Plzeň et où les journalistes de la Télévision tchèque ont essayé, en vain, de pénétrer…

Les ressortissants roumains en République tchèque, sont-ils particulièrement touchés par le phénomène de la traite humaine ? Petra Kutálková de La Strada :

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« Par le passé, nous avons enregistré beaucoup de cas de ressortissants de l’ancien bloc soviétique, devenus victimes de l’exploitation. Les Vietnamiens et les Asiatiques en général ont été aussi concernés, nous avons publié un rapport sur leur situation. Ces deux dernières années, ce problème touche effectivement de plus en plus souvent les ressortissants des pays de l’Union européenne. Nous travaillons surtout avec les Roumains et les Bulgares. »

Pour leur venir en aide, La Strada a mis en place un réseau de travailleurs sur le terrain qui offrent aux étrangers une assistance dans différents domaines. De même, l’organisation a lancé, en octobre, un numéro d’urgence gratuit en tchèque, en anglais, en russe, en roumain et en moldave. Plus de détails sur www.strada.cz