Manifestations anti-gouvernementales pour certains, anti-communistes pour d'autres

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Après le succès des partis de gauche aux élections régionales et sénatoriales partielles d’octobre dernier, les tractations s’achèvent en vue de former les coalitions politiques qui doivent administrer les régions. Et les sociaux-démocrates ont accepté, dans de nombreux cas, de collaborer avec les communistes, ce qui n’est pas du goût de certains citoyens qui ont décidé d’exprimer leur mécontentement dans la rue. La dernière manifestation en date s’est déroulée samedi à České Budějovice où une membre du Parti communiste a été nommée conseillère à l’éducation et à la culture. Dans le même temps, plus de 20 000 personnes, dont ces communistes honnis, manifestaient à Prague contre le gouvernement de droite de Petr Nečas et sa politique d’austérité.

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Un préfet, neuf adjoints au préfet et quinze conseillers régionaux : c’est ainsi que se traduit dans les Conseils régionaux le score honorable voire historique du Parti communiste de Bohême et de Moravie (KSČM) aux élections régionales, où il est arrivé deuxième après les sociaux-démocrates. Une première depuis la révolution de velours. Des sociaux-démocrates qui ont accepté dans bien des cas de former des coalitions avec ces communistes, avec lesquels ils refusaient pourtant jusqu’alors de s’allier.

La presse s’est souvent montrée alarmante, acceptant mal ce résultat sorti des urnes, parlant d’un « vote sanction » contre la coalition gouvernementale et envisageant même parfois le retour d’un parti « réactionnaire » au pouvoir, un parti qui, contrairement à ses homologues des pays voisins, ne s’est pas réformé et n’a jamais effectué de retour critique sur sa gestion du pays entre 1948 et 1989.

Le sentiment anti-communiste très présent chez les Tchèques a pu trouver une résonance avec ces résultats et certains citoyens ont décidé d’exprimer leur désarroi comme à Zlín en Moravie, ou à Ústí nad Labem au nord de Prague. Ce week-end, c’est en Bohême du Sud, à České Budějovice, que se sont réunis près de 500 personnes, surtout des lycéens et des étudiants, pour protester contre la nomination de la communiste Vitězslava Baborová au poste de conseillère régionale à la culture et à l’éducation. Dominik Hořejší est lycéen à Třeboň, une petite ville située non loin de là. Il explique sa présence :

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« Nous ne manifestons pas contre les résultats d’élections démocratiques mais contre la formation de cette coalition décidée par le préfet de région social-démocrate Jiří Zimola. Nous pensons que par principe, les partis démocratiques, en cas de tels résultats, devraient mettre de côté leur programme pour s’allier à d’autres partis démocratiques plutôt qu’avec un parti totalitaire. »

Jan Laichman a également bravé le froid pour être présent sur la place centrale de la ville mais il apporte une voix un peu discordante de celle dominante chez les manifestants. Il arbore en effet une pancarte sur laquelle on peut lire « Ne vaut-il pas mieux voter plutôt que manifester ? » Il fait référence à l’abstention record enregistrée lors de ces élections : 63% des électeurs ont préféré aller pêcher ou cueillir des champignons. Ainsi, un peu moins de 6% de l’ensemble du corps électoral a voté pour le Parti communiste, des chiffres qui permettent de relativiser ce « péril rouge » et qui semblent avant tout témoigner du faible intérêt des Tchèques pour la politique ou pour les partis qui leur sont proposés. Aussi, Jan Laichman regrette que beaucoup de ceux qui pestent contre le score des communistes sont les mêmes qui ne sont pas allés voter.

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Parmi les manifestants anti-communistes, on trouvait également quelques personnalités du monde culturel, à l’image d’Olga Sommerová, réalisatrice dont Radio Prague a récemment parlé à l’occasion de la sortie de son film consacré à la gymnaste tchèque Věra Čáslavská. On l’écoute :

« Je respecte ces actions de la société civile et je crois que cette génération, qui, même si elle n’a pas vécu l’époque du régime communiste, sait ce que celui-ci signifie et s’y oppose. Je suis très contente que ces jeunes gens réagissent, qu’ils ne baissent pas les bras et qu’ils ne pensent pas qu’à eux car je crois à l’action et à la force de la société civile. »

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La date du 17 novembre était elle-même symbolique puisqu’elle est fêtée en République tchèque en souvenir du début de la révolution de velours en 1989 et plus généralement comme un jour de lutte pour la liberté et la démocratie. C’est ainsi que dans le même temps à Prague, d’autres personnes, dont des communistes, des syndicalistes ou encore des militants associatifs, ont choisi cette journée pour protester contre la politique d’austérité menée par la coalition gouvernementale de Petr Nečas et des réformes qui, selon eux, serviraient des intérêts privés au détriment de l’intérêt général. Ils étaient autrement plus nombreux, environ 20 000, à avoir répondu à l’appel de la plate-forme Stop vládě (Stop au gouvernement).