L’élection par les députés d’un ancien « flic communiste » suscite l’émoi

Zdeněk Ondráček, photo: ČTK

Des manifestations se tiendront dans onze villes tchèques ce lundi soir et rassembleront probablement des milliers de personnes. Cette mobilisation est une réaction à l’élection très controversée, vendredi dernier par ses pairs, du député communiste Zdeněk Ondráček aux fonctions de président du comité parlementaire en charge du contrôle du GIBS, le service d’inspection des forces de police. L’élection de cet ancien policier qui a participé à la répression brutale des manifestations contre le régime communiste en janvier 1989, a suscité de vives réactions dans les médias aussi.

Zdeněk Ondráček,  photo: ČTK
Vojtěch Filip a beau assurer qu’il « n’y a rien eu de mal dans l’intervention de la police contre les manifestants en 1989 » et que celle-ci « n'a fait qu’assurer la sécurité », peu nombreux sont ceux à avoir la même interprétation de l'histoire que le leader du parti communiste. Même son vice-président Jiří Dolejš a reconnu sur l’antenne de la Télévision tchèque que l’intervention des forces de l’ordre, à coups de matraques et de canons à eau, dans le centre de Prague il y bientôt trente ans de cela, n’avait « pas été la bonne décision », tout en précisant néanmoins que Zdeněk Ondráček n’avait alors rien fait d’illégal et s'était contenté d'appliquer les ordres de ses supérieurs.

Comme souvent en République tchèque depuis la révolution, la question du passé de certains élus et de leur implication dans la vie politique post-communiste revient sur le devant de l’actualité, quelques semaines seulement après la confirmation par la justice slovaque que le Premier ministre Andrej Babiš a bien collaboré en qualité d’agent avec l’ancienne police secrète (cf. : http://www.radio.cz/fr/rubrique/infos/la-justice-slovaque-a-rejete-la-plainte-dandrej-babis-accuse-de-la-collaboration-avec-la-stb). L’élection du « flic » Zdeněk Ondráček, député depuis 2013, pose toutefois un autre problème : elle confirme, dans une certaine mesure, le retour aux affaires d’un parti communiste tchèque jamais réformé après 1989.

Dans une analyse intitulée « La victoire du nihilisme politique » et publiée dans son édition de ce lundi, le quotidien Hospodářské noviny estime qu’il « se passe en Tchéquie des choses qui, il y a encore un an de cela, auraient été inimaginables ». […] « A la direction de la Chambre des députés figure Tomio Okamura, un homme dont les idées sont, comme le dit justement le président de la Cour constitutionnelle Pavel Rychetský, ‘racistes, xénophobes et néonazies’. C’est choquant », regrette l’auteur, qui se demande un peu plus loin qui a installé Zdeněk Ondráček et Tomio Okamura dans leurs fonctions. « Andrej Babiš bien évidemment », s’empresse-t-il de répondre avant d’expliquer que si on ne peut pas soupçonner le Premier ministre de sympathiser avec les positions des deux hommes incriminés, on peut en revanche « le soupçonner d’un nihilisme politique absolu. Il a besoin des bolchéviques et des nationalistes pour soutenir son gouvernement et c’est pourquoi il leur donne tout ce qu’ils veulent ».

Andrej Babiš,  photo: ČTK
Ce lundi toutefois, le même Andrej Babiš a fait savoir que le groupe parlementaire du mouvement ANO, dont il est le leader et dont les membres occupent la majorité des fauteuils ministériels au sein du gouvernement démissionnaire, débattrait ce mardi de la révocation de Zdeněk Ondráček de ses nouvelles fonctions à la tête de la commission chargé du contrôle des forces de police.

Avant cela donc, cela n’empêchera pas des milliers de Tchèques de manifester leur ras-le-bol ce lundi soir, notamment dans le centre de Prague sur la place Venceslas. Les auteurs de l'appel au rassemblement publié sur Facebook expliquent que cette « élection est une suite épouvantable de la tendance de ces derniers temps où les opinions extrémistes sont légitimées comme une nouvelle norme dans la société. »