Le « super appel d’offres écologique » et ses milliards suscite toujours la méfiance

Depuis mardi on connaît le montant des offres déposées par les trois sociétés en compétition pour remporter l’un des contrats publics les plus importants de ces dernières années en République tchèque. Il s’agit de l’ « ekotendr », « l’appel d’offres écologique », qui doit permettre de décontaminer les sites les plus pollués du pays.

Trois offres situées entre 56 et 65 milliards de couronnes, soit approximativement entre 2,3 et 2,7 milliards d’euros : c’est après l’appel d’offres « nucléaire » pour la centrale de Temelín le plus important marché public de République tchèque et il n’en finit pas de diviser la scène politique et de faire couler de l’encre.

Les trois sociétés en course pour remporter le « gâteau » sont Marius Pedersen Engineering, avec l’offre la moins élevée à 56,8 milliards de couronnes, suivie de la société Geosan Group à 57,8 milliards de couronnes et Environmental Services du groupe J&T, avec l’offre la plus élevée à 65,5 milliards.

Jan Osuch
En dépit de l’importance de ces montants, nombreux sont ceux qui considèrent qu’ils sont surévalués, même si les dégâts écologiques du demi-siècle écoulé sont lourds. Le chef du gouvernement, Petr Nečas, qui avait déjà émis quelques doutes sur cet appel d’offres, n’est pas convaincu par la publication de ces offres. Jan Osuch est son porte-parole :

« Le premier ministre avait et a toujours une série de réserves concernant cet appels d’offres. La publication du montant des offres pour ce marché public, loin de dissiper ses doutes, n’a fait que les renforcer. »

Dans le contexte d’une coalition gouvernementale menée par deux principaux partis qui se disputent un même électorat, l’appel d’offres écologique est devenu l’un des sujets de tension entre la formation TOP09 du ministre des Finances et l’ODS du chef du gouvernement.

Une commission ad hoc ainsi que les analyses de deux sociétés de conseil doivent permettre de déterminer si les offres et la procédure correspondent à la réalité et sont conformes à la loi.

Mais pour le responsable de la branche tchèque de l’ONG anti-corruption Transparency International, David Ondráčka, l’appel d’offres écologique est avant tout une affaire politique qui sent les pots-de-vin :

« Cet appel d’offres écologique est selon moi depuis le début un non-sens économique. Il est structuré d’une telle manière qu’il est évident que les offres vont être surévaluées. »

Photo: CTK
Ce marché public pour l’élimination des dégâts sur l’environnement a été initié par le gouvernement de Mirek Topolánek en 2008. L’Etat s’était engagé à décontaminer les sites pollués lors des grandes privatisations de 1992, pour faire en sorte de nettoyer 45 années d’industrie sans pitié pour la nature pratiquée sous le régime communiste.

Dans un pays où marché public rime souvent avec corruption et financement occulte de partis politiques, le quotidien économique Hospodářské Noviny souligne que la propriété du capital de deux des trois sociétés en compétition n’est pas clairement établie et que la troisième n’exerce pas une activité liée à l’élimination de dégâts écologiques.