Le Printemps de Prague ? Non, de Cuba...

Un monde festival

"J'ai quitté le camps de travail chinois laogai en 1979. J'avais 42 ans, j'y est laissé les vingt meilleures années de ma vie. Du coup, j'ai compris que je venais d'être lâché d'une petite cage, pour me laisser enfermer dans une cage plus grande, une cage qui s'appelle la Chine. Je devais me taire, je ne pouvais pas parler. Alors je suis parti. Mais les cauchemars, je les ai toujours. J'ai dû m'habituer à vivre avec", a dit le plus connu des dissidents chinois, Harry Wu, à l'hebdomadaire tchèque Reflex. Exilé, depuis presque vingt ans, aux Etats-Unis, Harry Wu présente, au festival pragois Un monde, ses documentaires racontant l'horreur du monde carcéral chinois. Mais la Chine est loin d'être le seul pays que ce festival international du film, axé sur les droits de l'homme, place sous les projecteurs.

Film 'Le Printemps de Cuba'
En mars 2003, le régime de Fidel Castro incarcère 75 dissidents cubains : défenseurs du Projet Varela, l'équivalent de la Charte 77 anti-communiste, journalistes et écrivains. Ils sont condamnés à de lourdes peines, allant jusqu'à 28 ans de prison. Peu après la répression, deux journalistes chiliens installés en Europe centrale, Carlos Gonzales de Radio Prague et Juan Pablo Rodriquez de Vienne, débarquent à Cuba et demandent aux proches des prisonniers de raconter, devant la caméra, leurs témoignages... A partir de ces confessions, enregistrées dans l'illégalité, est né le documentaire Le Printemps de Cuba, projeté actuellement au festival Un monde. Freddy Valverde qui dirige le service espagnol de Radio Prague, a signé le scénario du film.

"Le film donne la parole par exemple à une mère, dont les trois fils sont emprisonnés. Quand la police secrète est venue les chercher, cette dame âgée a été attaquée physiquement : les policiers n'ont pas hésité à lui donner des coups de pieds. Ce qui est également très touchant, c'est le témoignage d'une autre vieille femme, qui ne peut même pas rendre visite à son petit-fils incarcéré très loin de l'endroit où elle habite. C'est aussi une manière de faire souffrir les familles des victimes : les rares visites qu'on leur accorde sont au dernier moment annulées. Mais le personnage principal du documentaire, c'est le leader de l'opposition cubaine Oswaldo Paya qui a réussi à mobiliser non seulement les dissidents, mais toute la population contre le régime cubain. Les gens n'ont plus peur de signer des pétitions, d'y inscrire leur adresses, tout cela avec l'espoir de démocratiser leur pays."

Le festival du film documentaire Un monde distribuera ses prix le jeudi 22 avril, à Prague.

Auteur: Magdalena Segertová
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