Le bio en pleine croissance en République tchèque

Photo: Archives de Radio Prague

Avec le développement du secteur de la nourriture biologique d’une part et l’essor des marchés fermiers en ville d’autre part, les Tchèques sont en train de changer leurs habitudes alimentaires. Et si le mouvement reste lent, les récents scandales concernant les produits polonais ou la présence de viande de cheval non-attendue dans certains plats devraient lui mettre un coup de fouet. C’est bien le marché biologique, encore peu adopté par les Tchèques, qui pourrait y trouver son compte.

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Si vous habitez à Prague, ou que vous y êtes passés récemment, vous avez certainement remarqué ces petites cabanes en bois aux étals colorés, à I.P. Pavlova ou bien à Anděl, où fourmillent des Praguois venus faire leurs courses tout en profitant, le cas échant, du soleil printanier. Ces marchés fermiers, proposant des produits directement issus des producteurs locaux, fleurissent à travers le pays, montrant que des nouvelles habitudes de consommation émergent chez les Tchèques. Jan Gallas, du ministère de l’agriculture, en dessine les contours :

« On peut observer une tendance de fond qui est un intérêt croissant des consommateurs tchèques pour la qualité de leurs aliments. Ils veulent faire attention à ce qu’ils mangent, et le prix devient peu à peu un critère de second plan. Ces dernières années, de plus en plus de gens ont montré un intérêt pour la consommation de produits qui sont tout d’abord tchèques, et ensuite qui sont issus d’une production de qualité. »

Fini, donc, l’âge d’or des hypermarchés aux produits globalisés, et autres pratiques issues du libéralisme post-1989 ? Pas si sûr, ou en tout cas pas pour aujourd’hui. Chez les Tchèques, le bio n’en est pas encore à connaître un boom digne de ce nom. Il a eu énormément de mal à s’imposer jusqu’à la fin des années 2000, et n’a connu qu’une augmentation de 4,5% de son chiffre d’affaires depuis 2010. Il n’y a donc rien d’exponentiel à cette croissance, et la République tchèque est loin d’être en pointe au niveau européen : moins de 1% de la nourriture y était estampillée bio en 2011, contre 4% chez les voisins Allemands et plus de 7% au Danemark par exemple.

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En revanche, tous les observateurs s’accordent à dire qu’il s’agit d’une tendance de fond qui, toute lente soit-elle, commence à modifier en profondeur le paysage de l’économie alimentaire et la vie quotidienne des Tchèques. Il est très peu probable de la voir freiner dans les années à venir, tant la prise de conscience de l’importance du sujet paraît ancrée en Bohême et en Moravie. Derniers électrochocs en date, le scandale de la viande de cheval et celui de la prétendue piètre qualité des aliments d’importation polonaise ont remis l’agriculture biologique au cœur des préoccupations des citoyens. Et si, d’après une enquête réalisée au mois de mars, ils ne seraient que 4% à régulièrement acheter bio, ils seraient par contre plus de 40% de consommateurs occasionnels, et 8 Tchèques sur 10 auraient déjà tenté l’expérience.

C’est le prix qui est encore le principal frein à la consommation biologique. A l’inverse, dans le cas des marchés fermiers, qui ne sont pas nécessairement bio mais qui répondent aux mêmes attentes du consommateur qui se veut responsable, le coût des produits peut être en réalité plus faible avec moins d’intermédiaires dans le circuit de distribution, moins de marges commerciales, et moins de transport puisque les aliments viennent du village du coin au lieu d’être importés de l’autre bout de l’Europe ou d’Amérique du Sud.

En revanche, ces marchés échappent assez largement aux contrôles sanitaires, et Zdeněk Císař des services vétérinaires tchèques explique que lorsque c’est le cas, des problèmes existent :

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« Les infractions les plus courantes, c’est d’abord que les produits alimentaires et les matières premières proposés sur ces marchés fermiers sont directement en contact avec l’environnement extérieur. Cela signifie qu’il n’y a rien pour les protéger des clients, ce qui peut être problématique. Nous avons aussi relevé quelques ennuis avec la température. Et parfois, il y a des lacunes concernant l’origine exacte des marchandises. »

Manger bio ou faire ses courses sur un marché fermier n’est donc pas une garantie absolue de manger mieux. Mais ces nouvelles pratiques vont au-delà : elles augurent également l’envie de transformer peu à peu les pratiques commerciales et le système de production puis de distribution des produits. En ce sens, elles ont de beaux jours devant elles.