Le biathlon tchèque en croisade contre le dopage

Biathlon à Oberhof, photo: ČTK

Le scandale du dopage institutionnalisé en Russie constitue, ces derniers mois, un des thèmes majeurs de l’actualité sportive. Discipline en plein développement en République tchèque ces dernières années, le biathlon a lui aussi était touché par cette affaire, de nombreux cas de dopage ayant été dénoncés. C’est la raison pour laquelle, aux côtés notamment de Martin Fourcade, très engagé, les biathlètes tchèques réclament à l’IBU (International Biathlon Union), qu’ils estiment trop passive, l’instauration de règles plus strictes que celles actuellement en vigueur pour lutter plus efficacement contre le fléau.

Michal Šlesingr  (à gauche),  photo: ČTK
Si le biathlon tchèque a fait parler de lui en fin de semaine dernière à Oberhof (Allemagne), ce n’est pas uniquement en raison des performances de ses représentants. Certes, les cinq podiums sur lesquels ils sont montés lors de cette étape de Coupe du monde qui constitue traditionnellement un des temps forts de la saison, ont marqué les esprits. Mais les Tchèques sont apparus également très actifs dans les coulisses en marge des différentes épreuves. Mercredi, à la veille de sa deuxième place dans le 10 kilomètres, Michal Šlesingr est ainsi monté au créneau pour réclamer aux dirigeants de l’IBU un durcissement des règles en vigueur.

Martin Fourcade,  photo: ČTK
Parmi les sanctions envisagées figurent notamment l’interdiction à vie pour les sportifs convaincus de dopage ne serait-ce qu'une fois durant leur carrière de participer aux Jeux olympiques ou aux championnats du monde, ou encore la réduction du nombre de biathlètes en Coupe du monde pour les fédérations nationales dont plusieurs représentants feraient l’objet d’une suspension. Comme l’a expliqué Martin Fourcade, qui s’est exprimé publiquement à Oberhof, les sportifs engagés demandent à l’IBU d’aller au-delà des règles imposées à l’échelle mondiale, à savoir les deux ans de suspension fixés par l’Agence mondiale antidopage. L’idée de base est qu'une plus grande sévérité des sanctions dissuade les biathlètes d’avoir recours à des produits interdits pour améliorer leurs performances. Bien conscient toutefois que ce n’est pas là la volonté de tout le monde, Michal Šlesingr précise quel est l’avancement des choses actuellement :

Gabriela Koukalova et Eva Puskarčíková,  photo: ČTK
« Nous discutons de tout cela entre sportifs, nous cherchons quels sont les droits et compétences. Il faut que nous soyons bien préparés de façon à pouvoir faire valoir nos exigences et à pouvoir réclamer ce que les dirigeants sont en mesure de satisfaire. Il y a certains points dont nous demandons à qu’ils soient réglés très rapidement, et d’autres à l’avenir. La situation est critique et je pense que l’IBU fait preuve d’un trop grand laxisme. »

Michal Šlesingr et les autres biathlètes tchèques sont soutenus dans leur démarche par leur fédération nationale, qui, que ce soit en République tchèque ou à l’étranger, jouit d’une excellente réputation. Et ils sont même soutenus très concrètement selon le président de la Fédération tchèque de biathlon, Jiří Hamza :

Jiří Hamza,  photo: ČT Sport
« Nous avons adressé une deuxième lettre ouverte à l’IBU depuis la publication du rapport McLaren (rapport d'enquête sur le trucage des tests antidopage lors des JO d'hiver de 2014 à Sotchi) qui fait état de trente-et-un biathlètes russes. Pour résumer, il nous semble que l’IBU ne prend pas les mesures adaptées à la gravité de la situation. Pour l’instant, les noms des coupables n’ont pas encore été communiqués et aucune sanction n’a été prise à l’encontre de la Russie. Or, nous pensons qu’une chose comme un système de dopage organisé par un Etat ne devrait plus exister aujourd’hui. »

La République tchèque, comme une bonne soixantaine de biathlètes de différents pays, exige donc des mesures rapides, concrètes et très sévères ; des mesures qui, toujours selon Jiří Hamza, doivent être le résultat d’une discussion instructive entre toutes les parties intéressées :

Biathlon à Oberhof,  photo: ČTK
« Bien sûr, nous ne pouvons rien entreprendre sans l’agrément des premiers concernés, qui sont les sportifs. Mais notre position est très claire. La question est de savoir quelle sera celle du reste du monde du biathlon. Nous avons discuté de la chose avec des pays comme la Norvège ou la France. Je pense pouvoir affirmer que la volonté de l’immense majorité est d’avoir un sport propre avec une tolérance zéro pour le dopage. Mais il faut être réaliste et aussi tenir compte du fait qu’il y a beaucoup de fédérations des pays de l’Europe de l’Est ou post-russes qui sont influentes au sein de l'IBU. C'est pourquoi il faut continuer de discuter de façon à trouver une solution qui puisse satisfaire le plus grand monde plutôt que de faire comme si rien ne s’était passé. Ce serait là la pire des solutions. »

Une hypocrisie vivement critiquée aussi par Martin Fourcade, mais qui n’est pas propre non plus seulement au biathlon.