La médaille du Premier ministre tchèque remise aux frères Mašín – les réactions sont des plus diverses

Mirek Topolánek et Josef Mašín, photo: CTK

C’était en 1953. Les communistes avaient pris le pouvoir en février 1948 et beaucoup de Tchécoslovaques n’étaient pas d’accord avec le régime totalitaire et de répression institué.

Parmi eux, des jeunes de tout juste vingt ans, Ctirad et Josef Mašín et leurs amis qui avaient fondé un petite groupe de résistance aux communistes. Ils avaient deux objectifs : donner du fil à retordre au régime et fuir la Tchécoslovaquie pour Berlin-Ouest. Les frères Mašín arrivèrent à atteindre l’ambassade des Etats-Unis dans la zone américaine de l’ancienne capitale du Reich et reçurent l’asile politique. Leurs amis eurent moins de chance, l’un fut tué, un blessé et deux autres exécutés après avoir été livrés à la Tchécoslovaquie. Dans leur cavale qui dura un mois, les jeunes gens ont tué deux policiers et un caissier tchèques ainsi que trois policiers de ce qui était l’Allemagne de l’Est.

Pour les communistes de l’époque et d’aujourd’hui encore, les frères Mašín sont des assassins, alors que pour les forces démocratiques du pays ils ont toujours été considérés comme des membres de la « Troisième résistance » contre le régime communiste, une résistance qui n’est toujours pas reconnue officiellement. Plusieurs fois déjà, des distinctions ont été proposées pour les Mašín, mais sans succès. Les deux présidents de la République tchèque indépendante, Václav Havel et Václav Klaus, ont toujours adopté une position réservée à l’égard de leur cas. C’est donc le Premier ministre Mirek Topolánek, qui vient de franchir le Rubicon, lors de sa visite officielle à Washington. Il a remis aux frères Mašín sa propre distinction, la Plaquette du chef du gouvernement. Pourquoi ce geste ? Explication du Premier ministre :

Mirek Topolánek et Josef Mašín,  photo: CTK
« Je veux ainsi commencer une très importante discussion qui devrait conduire à la reconnaissance de la Troisième résistance. Cette résistance s’est présentée sous de diverses formes. Les frères Mašín et leur groupe ont combattu l’arme à la main. En fin de compte nous sommes tous arrivés à la victoire, mais nous ne devons pas oublier que ce chemin vers la victoire de la liberté a été long. Les frères Mašín ont fait partie de ceux qui étaient à son commencement. »

Quelle a été la réaction de Josef Mašín, à Washington, en recevant les médailles, la sienne et celle de son frère qui n’a pas pu venir ?

« C’est un pas courageux qui a été fait et je pense que ce pas devait être fait et que la discussion doit vraiment commencer en Tchéquie. Nous n’avons pas fuit la Tchécoslovaquie pour améliorer notre vie. Je ne sais pas si nous y reviendrons un jour, bien que nous ayons des souvenirs nostalgiques de notre pays natal, car il est naturellement difficile de revenir dans un pays où existe encore le parti communiste qui a envoyé notre mère en prison et nos amis à l’échafaud. »

Les réactions en Tchéquie ont été des plus diverses. Le Parti civique démocrate, leader de la coalition gouvernementale, applaudit, alors que la position des deux autres partis gouvernementaux reste mitigée. Dans les rangs de l’opposition, surtout communiste, le geste du Premier ministre est très critiqué, même condamné. Au Château, le président de la République a fait savoir que « c’était une décision du Premier ministre que le chef de l’Etat respecte pleinement ».

Et les experts, comme le Directeur de l’Institut pour l’étude des régimes totalitaires, Pavel Žáček ?

« Il existe un fait, ce que les frères Mašín ont fait dans la lutte contre le régime totalitaire et pour le retour de la démocratie dans le pays. La société et la sphère politique doivent s’en faire une raison et, pour moi, il était nécessaire de prendre une position à l’égard de ce fait, de l’apprécier, de le distinguer, dans le contexte de la Guerre froide du siècle dernier. »

L’opinion publique, elle, est divisée et beaucoup de Tchèques n’ont pas la même opinion que Pavel Záček.