Fermeture du studio Febio, la fin d’une époque dans la production audiovisuelle tchèque

Fero Fenič

Febio, un des plus prolifiques studios de production tchèque, a mis la clef sous la porte à la fin de ce mois d’août. Créé au tout début des années 1990, la société avait largement contribué au renouvellement du paysage audiovisuel après la révolution, en proposant des programmes de télévision et des films documentaires encore cultes aujourd’hui.

Česká soda
La musique de Richard Strauss, Ainsi parlait Zarathoustra, n’évoque pas forcément aux Tchèques le générique du célèbre 2001, l’Odyssée de l’espace de Kubrick, mais plutôt celui d’un programme de télévision satirique, diffusé entre 1993 et 1997 à la télévision publique tchèque. Česká soda, ou l’eau gazeuse tchèque, est un des nombreux programmes à succès produit par les studios de production Febio. Autres programmes cultes, GEN, une série de 181 portraits de personnalités tchèques, diffusée en 1993 et 1994, puis au début des années 2000. Les premiers portraits explosèrent alors les records d’audience. Ils entendaient faire découvrir au public tchèque l’élite de la nation, « Cent Tchèques, à propos desquels jusqu’à présent on ne devait pas parler et qu’on ne connaissait même pas ». Avec, entre autres, le Cestománie (ou voyage-manie) ou Jak se žije (Comment vit-on), ce sont plus de 1300 programmes de télévision qui ont été produits par ce studio indépendant. Et l’arrêt de ces activités semble bien être la fin d’une époque, comme le raconte Fero Fenič, le directeur et fondateur du studio Febio :

« Febio était un produit typique de l’époque post-révolution, quand il était possible de réaliser certaines idées, de trouver de la place pour elles à la télévision publique. L’enthousiasme des gens, y compris des cinéastes, était si grand que vous pouviez essayer des choses que vous n’auriez jamais crues possible. Mais les temps ont changé, les gens ont commencé à apprécier la valeur de l’argent plus que les idéaux, et il était de plus en plus difficile de survivre. »

Les films documentaires ont donc de moins en moins de place à la télévision, qui préfère offrir des programmes de divertissement. Mais malgré la fermeture du studio de production Febio, Fero Fenič espère mener à bout les projets engagés, et notamment un prochain film :

Fero Fenič,  photo: Febio
« C’est un film ordinaire sur la vie ordinaire de gens ordinaires. C’est l’histoire simple d’un couple en Moravie. Personne ne fait des films comme ça, parce que la plupart des réalisateurs pense qu’il n’y a pas assez pour un film. Mais il faut plus d’effort, plus de talent, pour faire un film qui coupe la respiration d’un public pendant une heure sur un sujet si ordinaire. Je crois que cela mettra en évidence les possibilités du genre, et montrera le potentiel que Febio a toujours eu. Et nous ferons encore des choses comme ça dans les années qui viennent. »

Fero Fenič, ancien étudiant de la FAMU, la prestigieuse école praguoise de cinéma, n’a pas complètement lâché l’affaire. Surtout, il reste le directeur du festival Febiofest, deuxième plus grand festival international de cinéma en République tchèque après Karlovy Vary. Malgré des difficultés financières (http://www.radio.cz/fr/article/112499), le festival continue. L’année dernière, il a attiré, à Prague ainsi que dans les régions tchèques et slovaques plus de 100 000 spectateurs.