En Bohême du Nord, escalade des tensions envers la minorité rom

Nový Bor, photo: CTK

Une quarantaine de personnes arrêtées, six personnes blessées, dont trois officiers de police, des dizaines d’armes confisquées. Tel est le bilan de la journée de samedi, au cours de laquelle forces de police et sympathisants d’extrême-droite se sont affrontés à Varnsdorf, en Bohême du Nord.

Nový Bor,  photo: CTK
Les tensions entre population non-rom et minorité rom n’ont fait qu’escalader depuis la fin du mois d’août. Rappelons que deux incidents sont à l’origine d’une vague de protestations de la population locale. Un groupe de Roms avait alors attaqué à la machette les clients d’une salle de jeu de la ville de Nový Bor et quinze jours après, un autre groupe de jeunes Roms avait agressé plusieurs personnes dans la ville de Rumburk. A la peur et à la colère ont suscité la mobilisation des locaux. Et le gouvernement s’est vu dans l’obligation de renforcer les effectifs de police dans la région.

Varnsdorf,  photo: CTK
A ces tensions entre habitants des différentes villes du nord de la Bohême, sont venues se greffer les interventions d’extrémistes de droite, mobilisés par le Parti ouvrier, prêts à en découdre, comme ce samedi, à Varnsdorf. Toutefois, Petr Uhl, intellectuel très investi dans la défense de droits des Roms sous le régime communiste et depuis la révolution de velours, tient à modérer l’idée de tensions ethniques exacerbées dans la région et replace celle-ci dans une perspective historique plus large :

« Il serait faux de penser qu’il y a une bataille, un combat entre la majorité tchèque, non-rom et la minorité rom. On peut comparer cela un peu à la situation en Angleterre il y a un ou deux mois. Des adolescents rom, qui sont déracinés sur le plan de la culture commune, ont attaqué des gens, parce qu’ils n’ont ni argent, ni perspective. Ils commettent des délits mais aussi contre les Roms qui sont installés dans la région depuis une vingtaine d’années. C’est le même phénomène qu’en Grande-Bretagne. Quant à la majorité tchèque, il faut rappeler qu’ils sont eux-mêmes des nouveaux venus parce que la région, en 1945, était à 90% peuplées d’Allemands. Ceux-ci ont été expulsés après la guerre. La région a alors été repeuplée par des gens de l’intérieur du pays, mais aussi avec des Roms de Slovaquie. La situation explosive à l’heure actuelle est aussi le résultat de cette histoire des soixante-dix dernières années. »

Varnsdorf,  photo: CTK
La situation était telle que pendant la journée de samedi, sans doute encouragés par le noyau dur des néo-nazis présents, certains slogans racistes fusaient toutefois des rangs mêmes des habitants.

Tandis qu’à Nový Bor et à Rumburk, les manifestations prévues se sont déroulées dans un calme relatif, avec notamment des rassemblements en soutien de la minorité rom, c’est à Varnsdorf que la situation a dégénéré en fin de journée. Le ministre de l’Intérieur, Jan Kubice, estime que l’intervention des forces de police était nécessaire :

Jan Kubice,  photo: CTK
« Ce que la police a fait sur place, c’est une solution extrême. Personne ne le souhaite a priori. L’utilisation de la force pose évidemment problèmes, mais elle peut s’avérer nécessaire. Le premier groupe de personnes violentes qui ont attaqué la police était en fait des gens venus d’autres régions de République tchèque : je trouve que c’est plutôt une bonne nouvelle, cela veut dire que les habitants de Varnsdorf ne se sont pas placés du côté du Parti ouvrier. »

Il y a quelques temps, le présidium de la police a fait appel à Kumar Vishnawatan, un travailleur social d’origine indienne, spécialiste de la question rom, afin d’apporter son aide sur place dans la région. Grâce à sa présence notamment, les citoyens tchèques ne se sont que peu mélangés aux manifestants de l’extrême-droite.

En attendant, si le calme est revenu dans le nord de la Bohême, de nouvelles manifestations extrémistes sont prévues pour le week-end prochain.