Dominique Houdart, le créateur des Padox

Les Padox
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Plus de 200 spectacles présentés dans des salles et à ciel ouvert, des compagnies théâtrales de toute la République tchèque et de huit pays européens. Une programmation bouillonnante, qui mêle théâtre "classique", marionnettes, théâtre gestuel et musique... Le festival Théâtre des régions d'Europe qui anime, jusqu'au 30 juin prochain, le noyau historique de Hradec Kralove, en Bohême de l'Est, fête, en pleine forme, son onzième anniversaire. J'ai rencontré, devant un chapiteau dressé dans le parc du centre-ville, un des habitués du festival, Dominique Houdart.

"Ce festival m'a permis de découvrir le théâtre tchèque que je connaissais déjà pas mal : je suis venu en 1968, pendant le Printemps de Prague et j'ai découvert deux grands auteurs, Havel et Topol. Au retour, j'ai même monté une pièce de Topol. Donc vous voyez, je suis assez proche de la culture tchèque. Connaître ce festival, ça été une très belle opportunité pour nous, car revenant tous les ans, cela nous permet de voir évoluer les grands metteurs en scène, comme Vladimir Moravek, de voir les marionnettes tchèques, comment elles sont proches encore de la tradition, mais avec des recherches quelque fois très étonnantes. Cela m'a aussi permis de militer pour le théâtre tchèque en France."

Mais comparé aux dimensions françaises, le festival de Hradec est quand même petit, je crois...

"Je ne trouve pas... Bon, il est aux dimensions de la ville. Ce n'est pas le Festival d'Avignon, mais je le trouve beaucoup plus humain. A force de revenir, on reconnaît des gens... Il y a une dame qui vient de passer à vélo, tout à l'heure, près du chapiteau, elle a dit : 'J'ai vu Zazie dans le métro l'année dernière. A quelle heure vous jouez ce soir ?' Ici, on a le vrai contact, alors qu'Avignon, c'est la fournaise et le grand tourbillon. J'aime ce festival à dimension humaine et à dimension d'une ville superbe."

Metteur en scène et chef d'une compagnie théâtrale parisienne, qui porte son nom et celui de Jeanne Heuclin, Dominique Houdart est le père des personnages fictifs, qu'il a baptisés les Padox. Il s'agit de créatures en latex, à la mi-chemin entre l'homme et la bête, dans lesquels glissent les comédiens. Les Padox, le public de Hradec les connaît bien et cette année, ils sont de retour au festival : mercredi, ils se sont présentés sous le chapiteau, dans un spectacle inspiré des Quatre saisons de l'année de Vivaldi. Ce jeudi, ils sont descendus dans la rue, afin de découvrir la ville... Mais qui sont ces bonhommes ? Dominique Houdart...

"Les Padox, c'est une envie que j'ai eu à un moment de notre existence de créer un personnage de théâtre pour notre époque. Personnage, ce n'est pas un rôle. C'est Arlequin, Guignol, Sganarelle etc. Il y a assez peu de grands personnages de théâtre que les gens peuvent reconnaître facilement. C'est un peu ambitieux de ma part, mais je me suis dit qu'au XXe siècle, depuis Ubu, il n'y avait rien eu. Alors pour les XXe et XXIe siècles, je propose, doucement, Padox. Il fallait que ce soit un personnage un peu international, donc il ne parle pas français, il est muet, il s'exprime par les gestes et par la gentillesse. C'est à la fois un bébé et un vieillard, il ne sait rien, parce qu'il vient d'ailleurs. Padox ne s'impose pas, il essaye de s'assimiler à la population, donc il agit par mimétisme. Au début, il y avait trois Padox, qui jouaient ensemble dans la rue, trois professionnels. Avec eux, on est venus à Hradec, il y a cinq ans. L'année suivante, on a fabriqué quarante costumes de Padox et on est revenu, parce que cette multiplication permettait, et c'était notre objectif, de faire jouer non pas des professionnels, mais des gens de la ville que nous visitions. Donc il y a eu une bonne trentaine d'habitants de Hradec Kralove, des étudiants pour la plupart, qui ont travaillé avec nous. Cela été un très beau moment, très fort. La population ici a magnifiquement bien réagi, avec l'humour qu'on connaît aux Tchèques..."

Auteur: Magdalena Segertová
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