Aide au développement tchèque : « ne pas faire double emploi avec les autres pays »

Ethiopie

Le gouvernement tchèque débattait ce lundi matin de la nouvelle conception de sa politique d’aide au développement de pays tiers, qui devrait se concentrer sur cinq pays choisis comme prioritaires : l’Afghanistan, la Bosnie-Herzégovine, l’Ethiopie, la Moldavie et la Mongolie. Il est prévu également un certain nombre d’actions d’aide au développement en Géorgie, au Cambodge, au Kosovo, dans les territoires autonomes palestiniens et en Serbie. Ondřej Horký est chercheur à l’Institut des relations internationales et spécialiste des politiques d’aide au développement. Il revient sur les caractéristiques de cette nouvelle conception, et notamment sur la réduction du nombre de pays désignés comme prioritaires.

« Il y a deux raisons principales à la réduction du nombre de pays. En premier lieu, il y a une tendance dans la communauté internationale à réduire le nombre de pays. Parce qu’avec beaucoup de pays prioritaires ou beaucoup de pays donateurs, c’est très difficile à coordonner, il y a beaucoup de coûts de transaction, pour que l’aide au développement soit efficace. D’autre part, le grand nombre de pays désignés en République tchèque comme prioritaires posaient déjà un problème pour le système, à cause, de la même façon, des coûts de transaction, des missions d’identification et les projets étaient trop petits pour qu’ils puissent avoir un impact important sur les communautés dans les pays du sud. »

Ethiopie
En fonction de quoi sont choisis les pays qui sont désignés comme prioritaires ?

« Il y a plusieurs critères qui devraient être utilisés pour le choix du pays. Le premier critère devrait être les besoins des pays en question. La République tchèque, comme tous les autres pays de l’UE ou de la communauté internationale, devraient mettre l’accent sur les pays les plus pauvres, qui sont généralement en Afrique subsaharienne mais aussi en Asie principalement.

Afghanistan
Les pays donateurs devraient aussi se concentrer dans les domaines où ils ont le plus d’avantages comparatifs par rapport à d’autres pays. C’est pour cela que parmi les pays que la République tchèque a choisi, on trouve plus de pays dans l’Est ou dans les Balkans, où, comme le dit le gouvernement, elle a un avantage comparatif en appliquant l’expérience de la transition que la République tchèque, comme d’autre pays d’Europe centrale et orientale, a connue dans les années 1990 et 2000. »

C’est la raison pour laquelle on retrouve l’aide au développement tchèque dans des pays comme la Bosnie-Herzégovine ou la Serbie ?

« Tout à fait. C’est cette expérience qui justifie ce choix. Mais en même temps, il est très important de dire que cette justification de l’expérience de la transition peut couvrir les intérêts des exportateurs tchèques, qui sont plutôt dans les Balkans et en Europe de l’Est qu’en Afrique subsaharienne. Donc le choix des pays prioritaires pour la République tchèque n’a pas été seulement influencé par un souci de rendre la coopération plus efficace dans le domaine de la réduction de la pauvreté, mais le ministère des Affaires étrangères a aussi été sous la pression d’autres ministères comme le ministère du Commerce et de l’Industrie, de l’Agriculture, ou des lobbies de sociétés privées. Ils mettaient donc la pression sur le ministère pour introduire des pays comme la Serbie, qui est déjà pratiquement aux portes de l’Union européenne, qui bénéficie d’aides à l’adhésion à l’UE. Mais, avec ces pressions des ministères et des sociétés privées, ce pays a été choisi parce qu’il y a de forts intérêts tchèques. »

Quel type de compétences peut apporter la République tchèque dans l’aide au développement ? Quels sont ses avantages comparatifs ?

« C’est difficile à dire. On parle en général de cette expérience de transition, mais en même temps, il n’y a pas eu d’analyses sur ces avantages comparatifs de la Tchéquie. Mais nous pouvons évoquer ce qui a été un des thèmes principaux de la présidence tchèque de l’UE, c’est-à-dire, les énergies renouvelables, où les compagnies tchèques, mais aussi les ONG, ont une bonne expérience, qui compte et qui est plus importante que d’autres pays.

Néanmoins, je reviens sur le choix des pays et leur aspect politique. Et la nouvelle conception ne réduit pas vraiment le nombre de secteurs principaux. On retrouve le secteur social, l’éducation, la santé, le développement économique en général. Donc cette nouvelle conception, même si elle réduit le nombre de pays, ne réduit pas le nombre de secteurs. Et je pense que dans les années à venir, le développement tchèque aura encore beaucoup de mal à trouver les compétences qui sont les plus importantes pour vraiment faire la différence et ne pas faire double emploi avec les tâches d’autres pays ou d’autres organisations internationales. »