Affaire Skripal : la Tchéquie expulse également des diplomates russes

L'ambassade de Russie à Prague, photo: ČTK

La tension monte entre les pays de l’OTAN et la Russie. Lundi, les Etats-Unis et quatorze pays de l’Union européenne ont annoncé l’expulsion de diplomates russes de leur territoire en réaction à la tentative d’assassinat de l’ancien espion Sergueï Skripal début mars sur le sol britannique, que Londres attribue à Moscou. La République tchèque figure au nombre de ces Etats.

Martin Stropnický,  photo: ČTK
« Nous déclarons trois membres du personnel diplomatique de l’ambassade de la Fédération de Russie en République tchèque persona non grata. Dans sa note, le ministère des Affaires étrangères demande à l’ambassade de la Fédération de Russie à ce que ces trois représentants diplomatiques et leur famille aient quitté le territoire de la République tchèque au plus tard le 1er avril de cette année. »

Le ministre des Affaires étrangères du gouvernement démissionnaire Martin Stropnický (ANO) a communiqué la décision tchèque en conférence de presse. Un acte qui s’inscrit dans la suite logique du sommet de l’UE de la semaine passée et de l’expression de la solidarité des capitales européennes envers le Royaume-Uni, après une attaque « sans précédent sur le sol européen », d’après les propres mots de M. Stropnický. Les Britanniques accusent les Russes d’avoir tenté d’assassiner un ancien espion double, Sergueï Skripal, et sa fille, à l’aide d’un gaz innervant qu’ils présentent comme de type « Novitchok ».

C’est l’autre point qui a motivé la décision tchèque, car Moscou, qui nie toute implication, a par ailleurs estimé que cette substance pourrait provenir de certains pays, dont la Tchéquie. Le Premier ministre Andrej Babiš réfute en bloc :

Andrej Babiš,  photo: ČTK
« Les Russes ont dépassé les bornes quand ils ont dit que la substance létale ‘Novitchok’ pourrait venir de chez nous. C’est tout simplement un mensonge. Je réfute totalement cette allégation depuis le moment où la Russie l’a exprimée. »

Dans le monde politique tchèque, ces expulsions sont plutôt bien accueillies, avec cependant quelques voix discordantes comme celles des communistes qui s’inquiètent de la montée des tensions avec une puissance nucléaire.

De son côté, le chef de l’Etat Miloš Zeman, connu pour ses sympathies à l’égard de Poutine, ne pouvait visiblement pas rester inactif. Lundi, il s’est entretenu avec Michal Koudelka, le chef du BIS, les services de renseignements tchèques, lesquels alertent régulièrement sur l’activité du renseignement russe en Tchéquie et sur la capacité russe à y propager de fausses informations.

Le président a demandé à M. Koudelka que ses équipes déterminent si des substances de type « Novitchok » ont pu être produites ou stockées sur le territoire tchèque. Pour la ministre de la Défense Karla Šlechtová (ANO), qui participait à la réunion, c’est plutôt une bonne idée pour mettre fin aux spéculations sur le sujet :

L'ambassade de Russie à Prague,  photo: ČTK
« Ce n’est vraiment pas superflu et ce n’est certainement pas inutile. Je considère que le BIS est précisément bien placé pour vérifier ces informations. Je savais que nous discuterions de ce point avec M. le président et j’espère que les résultats correspondront aux informations dont je dispose sous le régime du secret. »

D’après Martin Stropnický, l’ambassadeur russe à Prague ne s’attendait pas à l’initiative tchèque et a été déplaisamment surpris. Face à l’action coordonnée des pays occidentaux, la Russie a réagi en rejetant à nouveau toute responsabilité dans l’affaire Skripal et en estimant que leur décision était une grave erreur. Le Kremlin précise qu’en vertu du principe de réciprocité, des mesures de rétorsion seront prises contre les capitales concernées.