Le transport routier en République tchèque : un choix privilégié par les entreprises et le gouvernement

Entre 1998 et 2003, près de 60% des crédits octroyés par des établissements bancaires européens, et destinés à des projets de transport en Europe centrale, sont allés à des projets routiers, contre seulement 18% à des projets ferroviaires. La tendance des gouvernements des nouveaux pays membres est en effet à privilégier le transport par voie routière, pour plusieurs raisons.

Photo : Jana Sustova
Jean-Louis Vallier, directeur commercial de Synergies Logistiques, entreprise de transport international ayant une succursale en Moravie, a confié son avis sur la question au micro de Radio Prague.

« A mon avis, ces investissements sont faits pour développer rapidement l'activité économique et je pense que dans ce domaine, les infrastructures routières ont un effet immédiat sur le développement économique, ce qui n'est peut-être pas le cas pour les investissements ferroviaires qui sont des investissements lourds et à long terme. Les contraintes de la technique ferroviaire sont très strictes, il faut respecter des degrés de courbes et d'inclinaisons. La route est beaucoup plus souple. »

Quels ont été les changements apportés par l'entrée des pays de l'Est dans l'UE, notamment avec l'ouverture des frontières ?

« Je ne pense pas que le trafic ait augmenté sensiblement plus que l'activité économique en Europe, simplement il a été réorienté. C'est-à-dire que les pays qui n'ont pas mis d'obstacles réglementaires ou tarifaires au transit ont vu leur trafic se développer, parce que les transporteurs ont eu le choix après l'ouverture des frontières européennes. C'est l'explication que je peux apporter à cette impression d'augmentation du trafic routier dans certains pays. L'autre raison est que les frontières étaient jusqu'à présent des pièges à camions et qu'elles ont perdu ce rôle, c'est-à-dire que les routiers circulent maintenant par exemple plus la journée et moins la nuit, alors qu'à une époque, ils étaient bloqués aux frontières et dès qu'ils pouvaient partir, ils le faisaient, à n'importe quelle heure. »

La République tchèque est-elle devenue aujourd'hui essentiellement un pays de transit étant donnée sa situation géographique ?

Photo: Štěpánka Budková
« En République tchèque, je pense que le trafic a augmenté justement parce que c'est un pays ou il n'y a pas ou peu d'obstacles au transit. Donc, le coût des infrastructures est faible, le prix du gasoil n'est pas très élevé, ce qui favorise beaucoup le passage des camions étrangers par la Tchéquie. Les transporteurs n'hésitent plus à passer une frontière pour transiter par la Tchéquie parce que c'est moins cher que l'Autriche ou l'Allemagne. »

Pourquoi les entreprises internationales vont-elles privilégier plus le transport routier que le chemin de fer ? Pour des questions de commodité ou de rapidité ?

« La première raison, c'est la rapidité. Les transporteurs routiers parlent de transit-time en heures, les transporteurs ferroviaires parlent en jours. Les transports routiers sont flexibles, et puis il faut bien se dire que même les marchandises transportées par chemin de fer finissent sur un camion, pour être transportées à l'usine, parce que très peu d'usines sont branchées directement au réseau ferré. La flexibilité et la rapidité sont les deux principaux critères pour les chargeurs, et dans leur choix, la route a un avantage très net. »

Photo : Jana Sustova
« Il y a une lourdeur dans le ferroviaire qui est liée à la fois à la structure et au fait que les entreprises ferroviaires ont été, à un moment donné, nationalisées et sont maintenant très peu adaptables et très peu flexibles, et il y a des archaïsmes qui empêchent leur développement. »

Des études prévoient que le trafic routier va être multiplié par deux d'ici 2020 en Europe. Que pensez-vous de cette prévision ?

« C'est une prévision possible mais je ne la partage pas. Parce que pour arriver à cette analyse, on projette ce qui s'est passé dans les années passées. Or il y a toujours des éléments nouveaux qui arrivent. Je pense que le prix du transport routier et du transport en général va augmenter, parce que les frais d'infrastructures augmentent, parce que le carburant augmente comme toutes les autres matières premières du monde. Cette hausse du coût du transport va faire réfléchir les chargeurs et freinera peut-être les pratiques de délocalisation un peu systématiques aujourd'hui. Sans doute qu'il augmentera si l'économie mondiale se porte bien, mais pas au rythme d'un doublement d'ici 2020. »

Auteur: Agnès Vaddé
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