Klára Kollárová, chef sommelière : « pour connaître le vin, il faut goûter, goûter, goûter ! »

Klára Kollárová

Rencontre avec Klára Kollárová, chef sommelière du restaurant gastronomique praguois La dégustation Bohême Bourgeoise.

Klára Kollárová
Klára, vous êtes probablement la première chef sommelière femme de République tchèque. Savez-vous si vous êtes encore la seule ?

« Je pense que oui parce qu’il n’y a pas en République tchèque tant de chefs sommeliers, qu’ils soient homme ou femme, parce qu’il n’y a pas beaucoup de restaurants qui ont une équipe de sommeliers. A La dégustation, je m’occupe des factures, de la carte des vins, pour qu’elle soit renouvelée, et qu’on ait bien au restaurant tous les vins qui sont sur la carte. C’est donc plutôt un travail de femme au bureau. »

Justement, tout le monde sait ou croit savoir ce qu’est le travail d’un sommelier, notamment de goûter les vins et les conseillers à des clients, mais pouvez-vous nous expliquer avec plus de précision en quoi consiste votre métier de sommelière ?

« Oui, je dirais que le sommelier ou la sommelière est une personne qui aide le client dans le choix du vin. Bien sûr, en plus, il faut s’occuper des vins, c’est-à-dire bien les garder dans la cave. Il faut aussi calculer un prix qui soit convenable à la fois pour le client et pour le restaurant. Et on s’occupe aussi des digestifs et des apéritifs qui sont proposés aux clients. Par conséquent, il faut bien sûr connaître les vins et pour cela il faut les déguster, ce qui est la partie du travail qui est très intéressante. Bien sûr, il faut aussi reconnaître quand il y a une faute dans le vin, ce qui veut dire qu’il faut savoir comment le vin est fait et quel goût il doit avoir. »

C’est donc vous qui choisissez tous les vins qui sont actuellement dans la cave de ce restaurant. D’où viennent ces vins qui composent donc cette cave ?

« On est trois sommeliers dans ce restaurant et on travaille en même temps. Il faut donc que nous connaissions tous les trois tous les vins. On essaie donc de déguster ensemble, et on discute pour savoir si tel ou tel vin doit être ou peut être sur la carte ou pas. C’est certainement difficile parce que lorsqu’il n’y a qu’une seule personne qui choisit les vins, c’est toujours subjectif. Je pense donc que c’est très bien pour les restaurant que l’on soit trois personnes. Trois têtes donnent trois différentes idées. Je pense donc que la carte est très bien composée. Bien sûr, on essaie de montrer aux gens des vins tchèques parce qu’on est fiers de nos vins. Pour le reste, on a beaucoup de vins de France, d’Italie, d’Allemagne, d’Autriche. Mais c’est toujours en évolution. On a aussi un peu de vins d’Espagne mais rien du Portugal pour l’instant. On aimerait connaître tous les bons vins mais ce n’est pas possible parce que la cave est trop petite pour ça. On travaille aussi avec les vins du nouveau monde. »

Je crois que vous avez fait des études de lettres auparavant et vous voilà aujourd’hui sommelière. Comment êtes-vous arrivée à ce métier ?

Klára Kollárová
« Comme beaucoup d’étudiants, je ne savais pas vraiment ce que je voulais faire. J’aimais la culture et j’ai étudié l’anthropologie culturelle. Mais j’avais besoin d’argent et j’ai commencé à travailler dans une petite vinothèque, un petit bar à vins. Et je suis restée avec le vin parce que j’ai fini mes études avec un travail sur l’histoire du vin. Puis j’ai trouvé ce travail au restaurant et j’ai commencé mon travail de sommelière à La dégustation. Avant je vendais du vin dans un petit bar, mais mon vrai travail de sommelière au restaurant, je l’ai commencé ici. »

N’avez-vous pas fait une école ?

« Il n’y a pas d’école de sommeliers ici donc je n’ai pas fait d’école mais j’ai suivi des cours. »

Et des voyages, pour découvrir les vins d’Europe et d’ailleurs ?

« Oui, bien sûr, c’est la partie de notre travail qui est la plus intéressante. J’essaie de goûter les vins dans leur propre pays, dans leur terroir, pour savoir d’où ils viennent vraiment. »

Vous m’avez parlé des vins tchèques en disant que vous êtes fiers de ces vins. Vous êtes aussi propriétaire d’un bar à vins dans le quartier de Malá Strana, le Vinograf, un très bel endroit, où vous proposez beaucoup de vins tchèques. Comment faites-vous pour faire découvrir ces vins ?

« On a beaucoup de clients tchèques au Vinograf. Il faut faire une très bonne sélection. On a aussi 120 ou peut-être même 150 vins de petits vignerons tchèques et on essaie vraiment de trouver ces jeunes vignerons. Mais nous avons aussi des vins de plus grands domaines, plus connus. Mais c’est parfois difficile de trouver des bons vins parce que la qualité est diverse, selon les années et les cépages. Il faut donc bien goûter ces vins avant de les proposer dans notre bar à vins. Et c’est en partie ce qui explique le succès du Vinograf, puisque les gens qui s’y rendent savent que tous les vins sont bons. Puis on a une autre clientèle, qui sont les étrangers qui visitent Prague et qui sont souvent très surpris de la qualité des vins. »

Vous êtes propriétaire ou co-propriétaire de ce bar à vins, le Vinograf. Vous avez aussi raconté que vous consacrez une grande partie de votre temps à gérer des questions d’ordre administratif. Finalement, être sommelière, c’est presque être une « business woman » ?

« Je ne sais pas. Ça dépend de ce que vous voulez faire. Je pense qu’il faut bien sûr connaître un peu de gestion, mais ce n’est pas le plus important. »

Le plus important, c’est donc probablement le vin qui est une vraie passion pour vous, que vous transmettez avec des cours de dégustation…

« Oui, on donne des cours chez nous, au Vinograf, où nous avons une jolie cave et on essaie de faire en sorte que les gens connaissent mieux le vin. »

Pour terminer, pouvez-vous nous donner votre premier conseil pour apprendre à découvrir le vin ? Qu’est-ce qui compte le plus entre connaître l’histoire des cépages ou apprendre à développer des facultés gustatives ?

« Je pense qu’il faut déguster. C’est ce qu’il y a de plus important. Je pense qu’il faut avoir des goûts différents. Les débuts sont un peu plus difficiles parce qu’on n’a pas de point de comparaison. Il faut d’abord goûter un échantillon d’une centaine de vins et ensuite, on peut commencer à comparer les goûts. C’est cela : il faut goûter, goûter, goûter ! »


Rediffusion du 26/11/2010